Décision

Décision n° 93-1491 AN du 4 novembre 1993

A.N., Loir-et-Cher (1ère circ.)
Inéligibilité

Le Conseil constitutionnel,

Vu, enregistrée sous le numéro 93-1491 au secrétariat général du Conseil constitutionnel, le 4 août 1993, la lettre du président de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques par laquelle celui-ci communique la décision en date du 23 juillet 1993 de la commission de saisir le Conseil constitutionnel, juge de l'élection, de la situation de M. Jacky Deforges, candidat lors de l'élection législative qui a eu lieu les 21 et 28 mars 1993 dans la 1re circonscription de Loir-et-Cher ;

Vu les observations présentées par M. Deforges, enregistrées comme ci-dessus le 10 septembre 1993 ;

Vu la Constitution, notamment son article 59 ;

Vu l'ordonnance no 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu le code électoral ;

Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 52-12 du code électoral « chaque candidat ou candidat tête de liste soumis au plafonnement prévu à l'article L. 52-11 est tenu d'établir un compte de campagne retraçant, selon leur origine, l'ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l'ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l'élection, par lui-même ou pour son compte, au cours de la période mentionnée à l'article L. 52-4 » qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 52-15 du code précité : « La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques approuve et, après procédure contradictoire, rejette ou réforme les comptes de campagne » que le deuxième alinéa de l'article L.O. 128 du code électoral dispose que : « Est ... inéligible pendant un an à compter de l'élection celui qui n'a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits par l'article L. 52-12 et celui dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit » qu'enfin, conformément aux prescriptions de l'article L.O. 136-1 du code électoral, il incombe à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques de saisir le Conseil constitutionnel du cas de tout candidat susceptible de se voir opposer les dispositions du deuxième alinéa de l'article L.O. 128 ;

2. Considérant que, selon les dispositions de l'article L. 52-17 du même code, la différence éventuellement constatée entre une dépense et le prix habituellement pratiqué est réputée constituer un don effectué par la personne physique ou morale concernée ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 52-4 du code électoral : « Pendant l'année précédant le premier jour du mois d'une élection et jusqu'à la date du tour de scrutin où l'élection a été acquise, un candidat à cette élection ne peut avoir recueilli des fonds en vue du financement de sa campagne que par l'intermédiaire d'un mandataire nommément désigné par lui, qui est soit une association de financement électorale, soit une personne physique dénommée » le mandataire financier " « qu'il est spécifié au troisième alinéa de l'article L. 52-5 du code électoral qu'une association de financement électorale » ne peut recueillir de fonds que pendant la période prévue à l'article L. 52-4 " que les mêmes prescriptions s'imposent à un mandataire financier en vertu du troisième alinéa de l'article L. 52-6 ; que si les dispositions des articles précités, en raison de la finalité qu'elles poursuivent, ne font pas obstacle à ce que figurent dans le compte de campagne des recettes correspondant à des versements postérieurs à l'élection, c'est à la condition que ces versements aient fait l'objet d'engagements souscrits antérieurement à l'élection ;

3. Considérant qu'il ressort de l'examen du compte de campagne déposé par M. Jacky Deforges et des pièces qui y sont annexées que ce candidat a bénéficié, le 17 avril 1993, d'un rabais exceptionnel de 26 092 F sur une facture de 69 974 F qui avait été établie le 26 février 1993 par une entreprise, à raison de prestations effectuées en vue de la campagne de l'intéressé que l'avantage ainsi consenti, qui n'avait fait l'objet d'aucun engagement antérieur au 28 mars 1993, date du tour de scrutin où l'élection a été acquise, constitue un don effectué, eu égard à la date à laquelle il a été reçu, en méconnaissance des dispositions précitées du code électoral ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a prononcé le rejet du compte de campagne de ce candidat ; qu'il appartient par suite au Conseil constitutionnel de constater que M. Deforges est inéligible, en application de l'article L.O. 128 du code électoral, pour une durée d'un an à compter du 28 mars 1993,

Décide :
Article premier :
M. Jacky Deforges est déclaré inéligible, en application de l'article L.O. 128 du code électoral, pour une durée d'un an à compter du 28 mars 1993.
Article 2 :
La présente décision sera notifiée à M. Deforges, au président de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 4 novembre 1993, où siégeaient : MM. Robert BADINTER, président, Robert FABRE, Marcel RUDLOFF, Georges ABADIE, Jean CABANNES, Jacques LATSCHA, Jacques ROBERT et Mme Noëlle LENOIR.
Le président,
Robert BADINTER

Journal officiel du 14 novembre 1993, page 15749
Recueil, p. 429
ECLI : FR : CC : 1993 : 93.1491.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.4. Recettes produites au compte de campagne
  • 8.3.5.4.2. Recettes devant figurer dans le compte
  • 8.3.5.4.2.1. Remises, rabais, prix inférieurs aux prix habituellement pratiqués

Le candidat a bénéficié, le 17 avril 1993, d'un rabais exceptionnel de 26 092 F sur une facture de 69 974 F qui avait été établie le 26 février 1993 par une entreprise, à raison de prestations effectuées en vue de sa campagne. L'avantage ainsi consenti, qui n'avait fait l'objet d'aucun engagement antérieur au 28 mars 1993, date du tour de scrutin où l'élection a été acquise, constitue un don effectué, eu égard à la date à laquelle il a été reçu, en méconnaissance des dispositions L. 52-4 et L. 52-17 du code électoral.

(93-1491 AN, 04 novembre 1993, cons. 2, 3, Journal officiel du 14 novembre 1993, page 15749)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.4. Recettes produites au compte de campagne
  • 8.3.5.4.4. Dons consentis à un candidat par une personne physique (article L. 52-8, alinéa 1er, du code électoral)
  • 8.3.5.4.4.2. Période

Les dispositions des articles L. 52-4, L. 52-5 et L. 52-6 du code électoral, en raison de la finalité qu'elles poursuivent, ne font pas obstacle à ce que figurent dans le compte de campagne des recettes correspondant à des versements postérieurs à l'élection, à la condition que ces versements aient fait l'objet d'engagements souscrits antérieurement à l'élection.
C.E., 18 décembre 1992, Moutoussamy, Lebon, p. 457
C.E., 18 décembre 1992, Schwartzenberg, Lebon, p. 457

(93-1491 AN, 04 novembre 1993, cons. 2, 3, Journal officiel du 14 novembre 1993, page 15749)
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