Décision

Décision n° 93-1226/1246 AN du 22 septembre 1993

A.N., Paris (1ère circ.)
Rejet

Le Conseil constitutionnel,

Vu la requête présentée par M. Gabriel Lagouge, demeurant à Paris (16e), enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 6 avril 1993 et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 21 et 28 mars 1993 dans la 1re circonscription de Paris pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;

Vu la requête présentée par M. Brice Lalonde, demeurant à Paris (4e), enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 7 avril 1993 et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 21 et 28 mars 1993 dans la 1re circonscription de Paris pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;

Vu les observations du ministre de l'intérieur, enregistrées comme ci-dessus les 20 avril et 22 juin 1993 ;

Vu le mémoire en défense présenté par M. Laurent Dominati, enregistré comme ci-dessus le 26 avril 1993 ;

Vu les observations en réplique de M. Brice Lalonde, enregistrées comme ci-dessus les 11 mai, 8 juin et 14 juin 1993 ;

Vu les observations en défense présentées par M. Laurent Dominati, enregistrées comme ci-dessus le 27 mai 1993 ;

Vu les observations du ministre de l'intérieur, enregistrées comme ci-dessus le 22 juin 1993 ;

Vu les nouvelles observations en défense de M. Lalonde, enregistrées comme ci-dessus le 9 juillet 1993 ;

Vu l'article 59 de la Constitution ;

Vu l'ordonnance no 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu le code électoral ;

Vu la loi no 88-227 du 11 mars 1988 modifiée relative à la transparence financière de la vie politique ;

Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant que la requête de MM. Lalonde et Lagouge sont dirigées contre les mêmes opérations électorales ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par une seule décision ;

2. Considérant que M. Lalonde, candidat de « l'Entente des écologistes », arrivé en troisième position avec un nombre de voix inférieur à 12,5 p. 100 des électeurs inscrits dans la 1re circonscription du département de Paris, soutient qu'il a été empêché de se maintenir au second tour à la suite de manoeuvres frauduleuses et d'irrégularités qui ont affecté ses propres résultats et la sincérité du scrutin ; qu'en particulier il fait valoir que les déclarations de candidature de M. Jean-Claude Ribardiere et de Mme Emilienne Herckel, respectivement candidats des « Nouveaux Ecologistes » et de « Génération verte » seraient irrégulières et que l'intitulé de leurs mouvements aurait été utilisé à seule fin de tromper les électeurs ;

3. Considérant qu'en se déclarant incompétent pour connaître du contentieux relatif aux actes préliminaires aux opérations électorales, le juge judiciaire a respecté les règles régissant sa compétence ; que M. Lalonde ne saurait prétendre qu'il a de ce fait été victime d'une rupture d'égalité par rapport aux autres candidats ;

Sur les griefs tirés d'irrégularités relatives aux déclarations de candidatures :

4. Considérant qu'en dehors du cas prévu à l'article L.O. 160 du code électoral le préfet ne peut pas refuser l'enregistrement d'une candidature ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 9 de la loi du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique, la déclaration de rattachement à un parti ou groupement de partis qu'indique un candidat à l'élection législative est une formalité facultative qui ne lie pas le candidat pour le choix de son étiquette électorale ;

6. Considérant en outre qu'en application des articles L. 154, L. 155 et R. 99 du code électoral un candidat n'est pas tenu de mentionner une appellation ou étiquette politique sur sa déclaration de candidature ;

7. Considérant que si, en application de l'article L. 158 du code électoral, le cautionnement est une formalité substantielle de la déclaration de candidature, il ne résulte pas de ce texte que le candidat doive s'acquitter lui-même de cette obligation ; que la caution de Monsieur Ribardiere a bien été versée en son nom au trésorier-payeur général et que, de ce fait, cette déclaration n'est pas entachée d'irrégularité

Sur les griefs tirés de l'abus de propagande électorale :

8. Considérant que M. Lagouge, candidat dans la 1re circonscription de Paris, fait valoir que des tracts de M. Dominati ont été diffusés au cours de la campagne électorale en violation de l'article L. 165 du code électoral, mais qu'il n'est pas établi ni même allégué par le requérant que cette diffusion ait revêtu un caractère massif de nature à altérer la sincérité du scrutin ;

Sur les griefs tirés de manoeuvres frauduleuses :

9. Considérant que la référence à l'écologie, terme passé dans le langage politique courant, figurant comme titre sur les affiches et bulletins de vote de plusieurs autres candidats, ne saurait être considérée comme l'expression d'une concurrence déloyale ayant créé un préjudice particulier ou exclusif au candidat de « l'Entente des écologistes » qu'en outre il n'appartient pas au juge de l'élection d'apprécier la sincérité de l'adhésion des candidats aux idées dont ils se réclament ;

10. Considérant en revanche que, tant par l'intitulé de sa candidature « Génération verte » que par le graphisme de ses bulletins de vote et affiches, Mme Herckel a cherché à imiter les documents de propagande de « l'Entente des écologistes » mais que ces agissements constitutifs d'une manoeuvre ne sauraient, dans les circonstances de l'espèce et compte tenu du faible nombre de voix obtenues par Mme Herckel, avoir mis en cause le résultat de l'élection ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requêtes de MM. Lagouge et Lalonde ne sauraient être accueillies,

Décide :
Article premier :
Les requêtes de MM. Gabriel Lagouge et Brice Lalonde sont rejetées.
Article 2 :
La présente décision sera notifiée à l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 22 septembre 1993, où siégeaient : Robert BADINTER, président ; Robert FABRE, Maurice FAURE, Marcel RUDLOFF, Georges ABADIE, Jean CABANNES, Jacques LATSCHA, Jacques ROBERT et Mme Noëlle LENOIR.
Le président,
Robert BADINTER

Journal officiel du 28 septembre 1993, page 13492
Recueil, p. 247
ECLI : FR : CC : 1993 : 93.1226.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.2. Candidatures
  • 8.3.2.2. Cautionnement

Si, en application de l'article L. 158 du code électoral, le cautionnement est une formalité substantielle de la déclaration de candidature, il ne résulte pas de ce texte que le candidat doive s'acquitter lui-même de cette obligation, la caution pouvant être versée en son nom.

(93-1226/1246 AN, 22 septembre 1993, cons. 7, Journal officiel du 28 septembre 1993, page 13492)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.2. Candidatures
  • 8.3.2.3. Déclaration de candidature
  • 8.3.2.3.3. Recevabilité de la déclaration de candidature
  • 8.3.2.3.3.2. Recours du préfet devant le tribunal administratif (voir également : Déclaration de candidature - Candidatures de liste - Refus de déclaration de candidature)

En dehors du cas prévu à l'article L.O. 160 du code électoral, il n'appartient pas au préfet de refuser l'enregistrement d'une candidature.

(93-1226/1246 AN, 22 septembre 1993, cons. 4, Journal officiel du 28 septembre 1993, page 13492)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.2. Candidatures
  • 8.3.2.3. Déclaration de candidature
  • 8.3.2.3.3. Recevabilité de la déclaration de candidature
  • 8.3.2.3.3.3. Incompétence du juge judiciaire

Il n'appartient pas au juge judiciaire de se prononcer sur la validité d'une déclaration de candidature, qui constitue un acte préliminaire aux opérations électorales.

(93-1226/1246 AN, 22 septembre 1993, cons. 3, Journal officiel du 28 septembre 1993, page 13492)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.4. Campagne électorale - Pressions, interventions, manœuvres
  • 8.3.4.2. Manœuvres ou interventions relatives à la situation politique des candidats
  • 8.3.4.2.1. Appartenance ou " étiquette " politique

Il n'appartient pas au juge de l'élection d'apprécier la sincérité de l'adhésion des candidats aux idées dont ils se réclament. La référence à l'écologie, choisie par plusieurs candidats, ne saurait être considérée comme l'expression d'une concurrence déloyale.

(93-1226/1246 AN, 22 septembre 1993, cons. 9, Journal officiel du 28 septembre 1993, page 13492)
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