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Le Conseil constitutionnel et le législateur

Georges BERGOUGNOUS - Professeur associé à l'Université de Paris I Panthéon-Sorbonne

Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel n° 38 (Dossier : Le Conseil constitutionnel et le Parlement) - janvier 2013

Résumé : Le contrôle de constitutionnalité, dans ses méthodes comme ses effets, traduit sinon trahit la grande proximité des préoccupations du législateur qui anime le Conseil. Aussi bien, ce dernier s'emploie-t-il à le protéger, au besoin contre lui-même, et comprend mieux que tout autre juge ses contraintes. Il reste attentif aux circonstances qui expliquent, si elles ne les justifient toujours, les choix qu'il opère et prend la mesure des considérations d'intérêt général qui s'attachent à l'intervention ou au maintien d'une loi.


La cause est désormais entendue. Le Conseil constitutionnel est devenu l'incontournable garant de l'État de droit qui en fait respecter les principes par un législateur toujours malhabile, sinon malfaisant, et on n'attend plus que l'artiste qui en exprimera les mérites en brossant, à l'image de l'admirable « bon gouvernement » d'Ambrogio Lorenzetti ornant le Palazzo pubblico de Sienne, la fresque du « bon juge constitutionnel ». Les choses avaient pourtant mal commencé : du « chien de garde de l'exécutif » au « canon braqué vers le Parlement » en passant par l'institution « qui rend des services et non des arrêts », le Conseil a suscité d'emblée la méfiance de l'opposition parlementaire. Et lorsque s'affranchissant de son strict rôle d' « organe régulateur de l'activité des pouvoirs publics » (1), le Conseil a pris son envol en n'hésitant pas à censurer la violation interne de la constitutionnalité, s'y est ajoutée celle des majorités successives, comme les lois concernant les nationalisations (2) ou le droit d'asile (3) en sont d'emblématiques exemples. Mais ce faisant et grâce aux alternances, il a acquis une stature institutionnelle et une autorité morale d'autant plus marquantes qu'au même moment le Parlement s'enfonçait dans un discrédit durable. Au demeurant, qu'il ait pu apparaître comme le défenseur de l'exécutif ou qu'il soit devenu celui des droits de l'homme, on retrouve toujours la même idée sous-jacente : dresser en face du législateur, du moins du législateur parlementaire, suspect de prétendre recouvrer ses prérogatives passées, un organe qui fasse respecter la norme suprême, prise en sa double nature de charte attributive de compétence et d'énoncé des droits et libertés, un organe qui assure ce que, en quelques mots sublimes, à l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, les hommes de 1789 ont assigné à toute Constitution : la séparation des pouvoirs et la garantie des droits.

Et il est exact que le Conseil s'est employé avec ardeur à remplir cette mission : il veille scrupuleusement à l'équilibre des institutions, en s'appuyant sur la conception française de la séparation des pouvoirs (4) et n'hésite pas à sanctionner un législateur s'aventurant dans un domaine réservé (5). Il est le vigilant défenseur des droits fondamentaux et des libertés essentielles, face aux excès de pouvoir législatifs, en accordant une protection toute particulière aux libertés de premier rang, auxquelles le Conseil demande « le moins de sacrifices sur l'autel de la conciliation » (6) des normes constitutionnelles. Il combat résolument la dégradation de la législation, source d'insécurité juridique pour le justiciable (7). Parallèlement, il n'a eu de cesse de juridictionnaliser ses procédures, de développer le contradictoire face à un législateur le plus souvent réticent. Ce dernier, au contraire, limité et concurrencé dans ses initiatives par des règles constitutionnelles contraignantes et par l'essor du droit européen, semble assumer le déclin de la loi, tandis que la médiocrité du « droit qui bavarde » et la « logorrhée législative » (8) sont stigmatisées à l'envi.

Tout cela est exact, et a fait l'objet de brillantes analyses doctrinales, dont l'acuité le dispute à l'érudition. Pour autant, les liens qui s'établissent entre le Parlement législateur et le Conseil constitutionnel, dont les membres nommés le sont pour les deux tiers par les présidents des assemblées et pour la totalité après avis des commissions parlementaires compétentes depuis la révision constitutionnelle de 2008, légitiment une autre approche. Que le Conseil annule, valide la loi ou en donne l'interprétation conforme à la Constitution, il agit toujours au côté du législateur qu'il protège (I) et accompagne (II).

I - Le Conseil protège le législateur

Institution spécifique, qui rend des décisions en forme juridictionnelle, le Conseil n'apparaît pas comme une instance étrangère, éloignée du législateur qu'il protège tout à la fois contre lui-même (A) et contre l'intrusion d'autres juges (B).

A - Le Conseil protège le législateur contre lui-même

Tout en respectant la vie intime des assemblées dans leurs chambres respectives, le Conseil veille à la paix des ménages et partant, au « bon déroulement du débat démocratique » (9). Il ne sanctionne les violations des règlements qu'autant qu'elles constituent des violations de la Constitution elle-même, mais vérifie que les parlementaires, comme le Gouvernement font un usage qui ne soit pas manifestement excessif de leurs droits (10). Et lorsqu'une procédure est utilisée par la majorité, de manière quelque peu abusive voire détournée, pour couper court au débat, le Conseil prend en compte les circonstances dans lesquelles elle est intervenue, par exemple le fait qu'elle constitue une réponse à une obstruction caractérisée de l'opposition. (11) Le Conseil sait au demeurant se montrer pragmatique et inventif, afin sans doute de faciliter le travail du législateur et l'adoption des lois, même si le résultat peut susciter de légitimes critiques. Il n'a ainsi pas hésité à « absou(dre) de façon surprenante une violation pourtant patente des règles constitutionnelles de procédure parlementaire, à savoir l'exigence du vote personnel » (12) en voulant peut-être « donner à un texte prohibitif devenu obsolète une portée restreinte » (13). Il n'est toutefois pas certain qu'en protégeant ainsi le législateur de la censure, le Conseil ait contribué à assurer la clarté et la sincérité du travail législatif_._ Par la même décision (14), dans le souci de protéger le législateur des excès auxquels sa propre jurisprudence consacrant le caractère illimité du droit d'amendement pouvait conduire, il a en revanche inventé des « limites inhérentes » à ce droit de nature qualitative - sur l'ampleur et la portée - qui s'attirèrent les foudres de la doctrine comme des assemblées (15) et se sont révélées un remède pire que le mal. Heureusement, opérant un de ses rares revirements de jurisprudence, le Conseil a substitué des limites objectives aux limitations subjectives en constitutionnalisant progressivement à partir de 1998 « l'entonnoir », c'est-à-dire le rétrécissement progressif du débat aux seules dispositions restant en discussion. En se fondant sur l'économie de l'article 45 de la Constitution et notamment son premier alinéa, le Conseil a jugé que « les adjonctions ou modifications qui peuvent être apportées après la première lecture par les membres du Parlement et par le Gouvernement doivent être en relation directe avec une disposition restant en discussion ». Cette jurisprudence, apparemment restrictive, est en réalité protectrice du Parlement. Auparavant en effet, l'exercice quasiment illimité du droit d'amendement était du même ordre que la liberté du loup dans la bergerie, permettant l'insertion tardive de dispositions sans que les parlementaires eux-mêmes aient pu en prendre réellement connaissance. La nouvelle jurisprudence a depuis lors trouvé son plein épanouissement dans le cadre plus vaste de l'action engagée par le Conseil en faveur de la qualité de la législation et qui s'est traduite par la référence, dans l'énoncé des normes constitutionnelles applicables, à l'article 6 de la Déclaration de 1789 et par la constitutionnalisation des exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire (16). Le Conseil se montre particulièrement attentif au respect des droits de l'ensemble des parlementaires de manière à ce que les travaux législatifs puissent se dérouler dans une sérénité propre à garantir ces exigences. Ainsi, une limitation du temps de parole (17) ou la fixation d'une durée maximale pour l'examen de l'ensemble d'un texte (18) doivent-elles les respecter pour être conformes à la Constitution, tandis qu'une mesure de clôture automatique (19) les méconnaît, car elle pourrait avoir pour effet d'interdire aux membres d'un groupe d'opposition d'intervenir dans la discussion d'un article.

C'est en se fondant sur les mêmes principes, ancrés dans la Déclaration de 1789, que le Conseil impose au législateur de respecter le domaine que la Constitution lui assigne. Certes, « la révolution n'a pas eu lieu » (20) car « la Constitution n'a pas entendu frapper d'inconstitutionnalité une disposition de nature réglementaire contenue dans une loi » même si le Conseil a voulu stigmatiser en 2005 les dérives constatées (21) comme il l'a également fait s'agissant des lois organiques (22). Mais c'est surtout sur le plan qualitatif que le Conseil s'est employé à faire assurer ce respect par le législateur (23). Ainsi pourchasse-t-il les dispositions inintelligibles ou à portée incertaine, « afin de prémunir les sujets de droit contre une interprétation contraire à la Constitution ou contre le risque d'arbitraire » (24), celles qui sont dénuées de portée normative, car « la loi a pour vocation d'énoncer des règles et doit par suite être revêtue d'une portée normative » (25), celles qui sont d'une complexité excessive, au motif que « l'égalité devant la loi énoncée par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et « la garantie des droits » requise par son article 16 ne seraient pas effectives si les citoyens ne disposaient pas d'une connaissance suffisante des règles qui leur sont applicables et si ces règles présentaient une complexité inutile » (26), ou encore celles renvoyant à une loi ultérieure pour apporter les précisions manquantes dans la loi déférée, car ce serait pour le législateur méconnaître sa compétence (27). Le législateur ne saurait en effet se défausser sur d'autres de la noble mission qu'il a de remplir, en reportant « sur des autorités administratives ou juridictionnelles le soin de fixer des règles dont la détermination n'a été confiée par la Constitution qu'à la loi » (28). C'est à lui de fixer le champ d'application et la portée de cette dernière. Au même moment pourtant, le président du Conseil constitutionnel, regrettant que l'article 37 se vide de son contenu, se demandait si le Conseil n'y avait pas contribué « en décelant trop prestement une »incompétence négative« dans le seul fait qu'un encadrement législatif soit »taisant« sur tel ou tel point » (29). Mais ce n'est en rien contradictoire, car l'incompétence négative a trouvé de nouveaux espaces avec le principe de clarté de la loi, « qui découle de l'article 34 de la Constitution, et l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité de la loi, qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration de 1789 » (30) ; et l'abandon du principe de clarté (31), loin d'affaiblir cette approche qualitative, la conforte au contraire, puisque lui est substituée la sanction de la méconnaissance de l'article 34 lui-même.

Soucieux que le législateur n'abdique pas ses responsabilités au profit notamment d'autorités juridictionnelles, le Conseil veille également à ce que ces dernières ne concurrencent pas son contrôle.

B - Le Conseil protège le législateur contre les autres juges

La diminutio capitis infligée par la Constitution de 1958 à la loi, jusque là norme souveraine, par la soumission à un contrôle de constitutionnalité le fut toutefois avec ménagement, tant en ce qui concerne la saisine, alors limitée aux quatre plus hautes autorités de l'État agissant entre le vote et la promulgation, que les normes de constitutionnalité applicables, du moins dans l'esprit des rédacteurs de la Constitution. On sait ce qu'il en advint, en 1971 et en 1974, avant que le constituant, contrarié auparavant à deux reprises, parachève l'édifice en 2008. Mais au-delà de leur participation à la construction de l'État de droit, le législateur constituant ou organique comme le Conseil constitutionnel ont conjuré le risque d'un contrôle diffus de constitutionnalité que les circonstances auraient pu imposer d'introduire, voire que le juge ordinaire aurait pu de lui-même pratiquer pour pallier la carence, en jugeant que « l'état actuel du droit français » (32) qui justifiait son abstention sous la IIIe République ne la justifiait plus sous la Ve. S'il s'était interdit cette audace, ce même juge aurait pu toutefois approfondir les potentialités de l'exception de caducité, dont il fait un usage très parcimonieux. Les mécanismes spécifiques des articles 61 et 62 ont ainsi épargné au législateur un autre contrôle de constitutionnalité que celui du Conseil et lorsque le juge ordinaire s'aventure sur ce terrain, ce n'est pas pour apprécier celle des lois, mais interpréter les normes constitutionnelles applicables, encore qu'il le fasse rarement de manière divergente. (33) Aussi bien l'introduction d'un contrôle a posteriori par voie d'exception fut-elle effectuée avec le plus grand soin par le Parlement constituant puis par le législateur organique et le Conseil constitutionnel, ce dernier, en examinant obligatoirement le contenu d'un texte qui l'intéressait au premier chef, apparaissant plus que jamais comme un co-législateur organique. Les risques du contrôle diffus furent alors évités au profit d'un contrôle demeurant objectif (34), concentré entre les mains du Conseil. La logique suivie aurait pu conduire à ouvrir alors le prétoire constitutionnel au justiciable, sans que le juge ordinaire intervienne comme un premier juge de constitutionnalité. Afin de prévenir l'encombrement, le recours à un filtre juridictionnel fut toutefois adopté, mais avec la ferme intention qu'il ne devienne pas un bouchon, comme la jurisprudence de la Cour de cassation a pu un temps le laisser penser, ce qui a conduit à quelques ajustements organiques (35), sans préjudice d'aménagements plus « musclés » si le juge avait persévéré (36). Et surtout, ceci expliquant sans doute cela, on doit à l'audace du législateur organique d'avoir fait de ce nouveau contrôle une « voie expresse » (37), une question prioritaire de constitutionnalité, indépendante des autres questions de droit, que le juge doit traiter sans délai, dans le but qu'elle ne soit pas tarie d'avance par le contrôle de conventionnalité.

On sait depuis 1975 (38) que si les traités ont une valeur supérieure à celle des lois, conformément à l'article 55 de la Constitution, ils ne constituent pas pour autant des normes de référence du contrôle de constitutionnalité, et qu'il appartient donc aux juges ordinaires, pour peu qu'ils renoncent à la théorie de la loi écran, de procéder au contrôle de conventionnalité, ce à quoi ils se sont employés presque immédiatement pour le juge judiciaire (39), et à partir de 1989 pour le juge administratif (40). Cette jurisprudence robuste sauvegardait la spécificité du contrôle de constitutionnalité et de la Constitution elle-même en les préservant d'une dilution qu'aurait sans doute mal compris le législateur, au prix d'une soumission de la loi au juge ordinaire en ce qui concerne les instruments internationaux. Pour autant, cette construction se révélait inadaptée lorsque les droits et libertés que la Constitution garantit le sont également, sous une forme plus ou moins proche, par des conventions internationales, comme la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ou le droit communautaire, a fortiori depuis que ce dernier intègre la Charte européenne des droits fondamentaux. En outre, l'approfondissement continu du droit de l'Union, l'apport du droit communautaire dérivé à la législation nationale dont une large part se borne à le transposer, invitait le Conseil à s'en saisir, sans pour autant renoncer à la jurisprudence de 1975. C'est ainsi qu'en découvrant toutes les potentialités de l'article 88-1 de la Constitution, le Conseil a amorcé en 2004 une évolution jurisprudentielle lui permettant d'intervenir. Il a fait de la transposition des directives une exigence constitutionnelle, à laquelle il ne pourrait être fait obstacle qu'en raison d'une disposition expresse (41) et spécifique (42) de la Constitution. Comme le Traité établissant une Constitution pour l'Europe - qui sera finalement rejeté par le peuple français - risquait de remettre en cause cette exception, le Conseil s'appuya sur une de ses dispositions précisant que l'Union respecte l'identité des États membres « inhérente à leurs structures fondamentales et constitutionnelles » pour sauvegarder ladite exception (43) nonobstant la primauté de principe du droit communautaire. Poursuivant cette évolution, le Conseil a reconnu sa compétence pour déclarer non conforme à l'article 88-1 une disposition législative manifestement incompatible avec la directive qu'elle a pour objet de contrôler (44). Ainsi, les deux contrôles sont-ils appelés à se combiner, « le constituant ayant consacré l'existence d'un ordre juridique communautaire intégré à l'ordre juridique interne et distinct de l'ordre juridique international » (45) et le législateur pourra alors voir déclarée conforme par le Conseil une loi méconnaissant la directive qu'elle a pour objet de transposer si cette méconnaissance est justifiée par le respect d'une règle ou d'un principe « inhérent à l'identité constitutionnelle de la France » (46). Dans ce mouvement garantissant une réserve de constitutionnalité, une extension des compétences du Conseil au contrôle de la conformité de la loi aux traités relatifs aux droits et libertés fondamentaux, comme l'appelait de ses voeux le président Debré devant le comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions (47), aurait pu opportunément être envisagée, mais le constituant de 2008 ne s'engagea pas sur cette voie.

C'est à cette aune qu'il faut prendre la mesure de la priorité de la QPC. Il eût été « désolant (que) le vice de la loi étant purgé par le contrôle de conventionnalité, il n'y (ait) plus lieu de recourir au contrôle de constitutionnalité » (48), alors que la volonté explicite du constituant avait été « de permettre au justiciable de se placer à l'abri de la Constitution », ce qui conduisait « à laver le linge sale en famille » (49). Le Conseil a clairement validé cette approche en jugeant qu'« en imposant l'examen par priorité des moyens de constitutionnalité avant les moyens tirés du défaut de conformité d'une disposition législative aux engagements internationaux de la France, le législateur organique a entendu garantir le respect de la Constitution et rappeler sa place au sommet de l'ordre juridique interne » (50). Puis en réponse à l'imbroglio (51) né des arrêts de la Cour de cassation du 16 avril 2010 (52) qui ont renvoyé à la Cour de justice de l'Union européenne la question de la compatibilité entre le caractère prioritaire de la question de constitutionnalité et les principes du droit de l'Union européenne, le Conseil a dû alors « donn(er) un mode d'emploi de l'articulation entre contrôle de constitutionnalité et contrôle de conventionnalité » (53) qui respecte les exigences du droit communautaire et préserve l'adroit mécanisme institué par le constituant et le législateur organique.

Dès lors, dans le cadre du contrôle spécifique de constitutionnalité aux effets erga omnes, qu'il ait désormais lieu avant la promulgation ou après l'entrée en vigueur de la loi, le Conseil constitue bien toujours le seul interlocuteur du législateur. Le Parlement comme le Conseil ne se sont toujours pas résolus à ce que la loi devienne, pour reprendre la forte expression de Guy Carcassonne, « une sorte de paillasson sur lequel n'importe quel juge, à l'invitation de n'importe quel justiciable, peut s'essuyer les pieds » (54).

II - Le Conseil accompagne le législateur

Dans le contrôle qu'il opère sur le législateur, le Conseil constitutionnel « organe essentiel du processus législatif et de la régulation politique » (55), entend l'accompagner en entretenant un étroit dialogue avec lui (A) et en respectant ses choix (B).

A - Le Conseil entretient un étroit dialogue avec le législateur

En rappelant les conditions dans lesquelles s'effectue le contrôle de constitutionnalité a priori, alors seul existant, dont les parlementaires exercent de fait le monopole, et en en déduisant que son « objet est non de gêner l'exercice du pouvoir législatif mais d'assurer sa conformité à la Constitution » (56), le Conseil a clairement signifié que ce contrôle constitue une étape de la procédure législative, ce qui n'est pas sans conséquence sur la réception par le législateur de ses décisions. En outre, avant même que la révision constitutionnelle de 2008 en ait prévu explicitement la possibilité dans le cadre de la QPC, le Conseil, à la suite de la jurisprudence « AC ! » de son voisin du Palais-Royal (57), s'est arrogé le droit de différer l'entrée en vigueur d'une inconstitutionnalité, pour laisser au législateur le temps d'y remédier (58). Dans les deux cas, l'intervention du Conseil s'inscrit dans le cadre de l'action législative et c'est en cela qu'en reprenant la formule de Bernard Chenot (59), on peut soutenir que le Conseil est un « rouage presque permanent du pouvoir législatif ». Il peut ainsi inviter le législateur à adopter une nouvelle disposition, opérant un contrôle à double détente - automatique dans le cadre des lois organiques et des règlements des assemblées, dépendant des saisines pour les lois ordinaires - d'autant plus pertinent que les motifs de sa censure auront été précis. Ainsi, la censure des dispositions relatives aux perquisitions fiscales au motif « qu'elles ne précisent pas l'acception du terme »infraction" ... et ne limitent donc pas clairement le domaine ouvert aux investigations en question ; qu'elles n'assignent pas de façon explicite au juge ayant le pouvoir d'autoriser les investigations des agents de l'administration la mission de vérifier de façon concrète le bien-fondé de la demande qui lui est soumise ; qu'elles passent sous silence les possibilités d'intervention et de contrôle de l'autorité judiciaire dans le déroulement des opérations autorisées ; qu'enfin elles n'interdisent pas une interprétation selon laquelle seules les visites effectuées dans des locaux servant exclusivement à l'habitation devraient être spécialement autorisées par le juge, de telle sorte que, a contrario, les visites opérées dans d'autres locaux pourraient donner lieu à des autorisations générales » (60) permet-elle un an plus tard au législateur de prévoir un dispositif qui « ne méconnaît aucune des exigences constitutionnelles assurant la conciliation du principe de la liberté individuelle et des nécessités de la lutte contre la fraude fiscale telles qu'elles ont été explicitées par la décision du 29 décembre 1983 (61). Ce dialogue avec le législateur peut désormais résulter de la combinaison des contrôles a priori et a posteriori, une disposition censurée dans le cadre d'une QPC étant rectifiée par une loi dont le Conseil sera ensuite saisi, soit immédiatement après son adoption, soit éventuellement une fois entrée en vigueur. Plus que jamais, le Conseil est donc conduit à fournir un mode d'emploi au législateur.

Au demeurant, il s'inscrit ainsi dans la tradition kelsénienne du juge aiguilleur. Qu'il indique la marche à suivre pour remédier par la loi à l'inconstitutionnalité, ou qu'il suggère, car il lui arrive de le faire (62), de procéder à une modification constitutionnelle pour atteindre le résultat recherché, il ne porte pas un jugement sur la valeur morale de la loi, mais sanctionne la forme plus que le fond. Procède de la même démarche la décision de rejet d'une QPC portant sur l'inconstitutionnalité de l'interdiction du mariage entre personnes du même sexe, en reprenant le standard selon lequel « il est à tout moment loisible au législateur, statuant dans le domaine de sa compétence, d'adopter des dispositions nouvelles dont il lui appartient d'apprécier l'opportunité et de modifier des textes antérieurs ou d'abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d'autres dispositions, dès lors que, dans l'exercice de ce pouvoir, il ne prive pas de garanties légales des exigences de caractère constitutionnel » (63). Ce faisant, le Conseil prend garde de s'aventurer sur le terrain du débat politique et se borne à remplir sa compétence d'attribution, en donnant toutes indications utiles pour assurer la conformité de la loi à la Constitution. Il peut s'agir, en cas de censure, des moyens d'y remédier, comme lorsqu'il déterminait les conditions que devaient remplir les perquisitions fiscales pour être régulières (64), ou celles que devaient respecter les servitudes d'installation et d'exploitation de moyens de diffusion par voie hertzienne (65). Ce peut être également, lorsque le Conseil sauve une disposition de la censure pour incompétence négative, l'édiction de réserves d'interprétation constructives qui complètent une loi imprécise. Ainsi, le Conseil apporte-t-il des garanties au PACS, en précisant qu'il suppose « outre une résidence commune, une vie de couple » ainsi qu'une « aide mutuelle et matérielle » (66). Ces ajouts à la loi font parfois l'objet de critiques, au motif que le Conseil se substituerait au législateur, mais celles-ci manquent de pertinence dès lors qu'ils sont bien souvent issus des travaux parlementaires et procèdent donc du dialogue entre le Conseil et ce dernier. Tel est le cas, par exemple, des conditions exigées de la « taxe d'inhabitation » instituée par la loi de lutte contre les exclusions (67), qui reprennent des engagements du Gouvernement en séance publique. Et lorsque les travaux se révèlent sibyllins ou ambigus, le Conseil n'hésite pas à s'appuyer sur l'intention du législateur, comme lorsqu'il précise, s'agissant de la conservation des enregistrements effectués dans le cadre de la lutte contre la criminalité organisée, que « le législateur a nécessairement entendu que les séquences de la vie privée étrangères aux infractions en cause ne puissent en aucun cas être conservées dans le dossier de la procédure » (68).

B - Le Conseil respecte les choix du législateur

À l'instar de Jules Grévy faisant part dans son premier message aux assemblées de son intention de « n'entrer jamais en lutte contre la volonté nationale », le Conseil affirme d'emblée dès l'une des toutes premières saisines intervenues après la réforme constitutionnelle de 1974 qu'il n'a pas le même pouvoir d'appréciation que le législateur (69). En conséquence, « il ne lui revient pas de rechercher si l'objectif que s'est assigné le législateur aurait pu être atteint par d'autres voies, dès lors que les modalités retenues ne sont pas manifestement inappropriées à l'objectif poursuivi » (70). Et si dans un célèbre obiter dictum, il souligne que la loi votée par le Parlement n'exprime la volonté générale que dans le respect de la Constitution (71), son contrôle est marqué par la prudence, et il s'interdit de juger l'intention du législateur. Ainsi, n'a-t-il jamais sanctionné et sans doute recherché si ce dernier avait commis un détournement de pouvoir, et dans l'une des rares hypothèses où la question s'est présentée à lui (72), la sanction eût été « incongrue, à la fois par un manque de délicatesse envers le Parlement et par le fait qu'elle aurait affirmé l'existence d'intentions qui ne sont jamais évidentes même si elles sont hautement probables » (73). Aussi bien a-t-il préféré dans le cas en cause sanctionner l'erreur de droit, portant sur la qualification juridique des faits (74). En outre, si le Conseil se refuse à contrôler les finalités poursuivies par le législateur, il n'exerce qu'un contrôle restreint sur les moyens mis en oeuvre pour les atteindre. Certes, le contrôle de l'erreur manifeste, qui s'exerce dans l'ensemble du contentieux constitutionnel, a parfois atteint une intensité telle que la thèse du contrôle restreint peine à en rendre compte (75), comme l'exemple du contrôle de la constitutionnalité de l'écart démographique entre les circonscriptions pour les élections au congrès de la Nouvelle-Calédonie en est l'illustration bien connue. (76) Pour autant, le Conseil respecte l'appréciation discrétionnaire par le législateur du choix des moyens, même s'il les juge non pertinents, dès lors qu'ils ne sont pas manifestement inappropriés. Ainsi, le critère retenu pour faire bénéficier certaines « entreprises innovantes en phase de croissance » d'une exonération de cotisations sociales, n'est pas « manifestement inapproprié » et « ne peut dès lors être déclaré contraire à la Constitution par le Conseil constitutionnel, lequel ne dispose pas d'un pouvoir d'appréciation identique à celui du Parlement ». (77)

Le contrôle de l'erreur manifeste, notion souvent mal comprise par les parlementaires, qui se demandent comment la représentation nationale peut commettre des erreurs d'appréciation qui soient manifestes, s'est au demeurant mué en contrôle de proportionnalité, ou plus exactement de disproportion manifeste. Le Conseil vérifie ainsi que les atteintes portées à tel droit ou liberté ne sont pas disproportionnées. Mais alors que l'article 8 de la Déclaration de 1789 en énonçant qu'une peine doit être strictement et évidemment nécessaire pourrait induire un contrôle renforcé du type de celui pratiqué par le Conseil d'État dans l'arrêt « Benjamin », (78) le Conseil contrôle l'absence de disproportion manifeste entre l'infraction et la peine encourue. (79) Ainsi le pouvoir d'appréciation et de décision du législateur est-il préservé, le Conseil se gardant de paraître s'aventurer sur le terrain de l'opportunité (80).

C'est toutefois dans la définition des objectifs que s'assigne le législateur pour réaliser l'intérêt général, notion au demeurant souple, « indéfinissable en ce sens que selon les temps, les lieux, et les opinions, elle reçoit des contenus fort variables » (81), que le Conseil se montre le plus respectueux de la liberté du législateur (82) et de ses choix politiques, par delà les alternances. En effet, « concurrencée par la loi européenne, qui ne s'inscrit pas dans la logique de la démocratie parlementaire, la loi nationale reste, dans son domaine de compétence et dans le respect de la Constitution, l'expression irremplaçable de la volonté générale. » (83) Et pour atteindre son but, la loi pourra porter atteinte à des droits et libertés constitutionnels, n'encourant la censure que si les restrictions prévues apparaissent disproportionnées au regard des finalités poursuivies. Mieux encore, afin d'aider le législateur, le Conseil a dégagé la catégorie des objectifs de valeur constitutionnelle (OVC), qui, s'ils permettent de garantir l'effectivité de droits et libertés constitutionnels (84), ont dès l'origine permis d'y porter atteinte, en les limitant pour des motifs d'intérêt général, les OVC paraissant même être « l'intérêt général en situation » (85). Tel est par exemple le cas de la sauvegarde de l'ordre public (86), de la lutte contre la fraude fiscale (87) ou de la recherche des auteurs d'infraction (88).

Dès lors, en faisant siens les buts d'intérêt général poursuivis par le législateur, le Conseil autorise des atteintes aux droits constitutionnellement garantis, qu'il concilie avec ces buts et éventuellement avec d'autres objectifs d'intérêt général (89). Il a ainsi pu accompagner les politiques mises en oeuvre par le législateur en suscitant parfois d'ailleurs les critiques de la doctrine lui reprochant d'admettre trop aisément les justifications avancées par le législateur pour limiter les droits et libertés (90), ou, selon la formule célèbre de Jean Rivero, de « filtrer le moustique et de laisser passer le chameau » (91). En particulier, depuis une vingtaine d'années, le Conseil, confronté à la multiplication de lois pénales sécuritaires, aurait desserré ses contraintes et admis, au nom de la sauvegarde de l'ordre public, des atteintes aux grands principes qui ont fait le droit pénal moderne (92). Mais, en admettant que cette évolution soit avérée, elle traduit le respect de la volonté du législateur, dont il n'appartient pas au Conseil de juger des choix mais seulement de vérifier si leur mise en oeuvre porte des atteintes disproportionnées aux droits et libertés constitutionnellement garantis. Pour ce faire, la méthode de conciliation utilisée prend la forme d'un curseur de constitutionnalité que le Conseil déplace selon les cas « dans une zone de plus grande tolérance que d'ordinaire » (93). À cette aune, il n'est pas étonnant que le juge constitutionnel ait renoncé au même moment à la méthode dite de « l'effet cliquet » (94), d'ailleurs limitée aux seuls droits et libertés de « premier rang », qui voudrait que le législateur ne puisse réglementer les conditions d'exercice d'un droit qu'en vue de le rendre plus effectif, et qu'il se borne désormais à exiger de ce dernier qu'il ne prive pas de garanties légales des exigences constitutionnelles lorsqu'il modifie ou abroge des textes pour leur substituer d'autres dispositions moins protectrices. Il en va de la liberté d'action de la représentation nationale, qui serait sans cela rendue inopérante par la « dérive de »constitutionnalisation« de certaines lois, qui ne pourraient plus être modifiées à raison de l'expression de règles constitutionnelles qu'elles contiennent ». (95)

Le contrôle de constitutionnalité, dans ses méthodes comme ses effets, traduit sinon trahit la grande proximité des préoccupations du législateur qui anime le Conseil. Ce dernier comprend mieux que tout autre juge ses contraintes, reste attentif aux circonstances qui expliquent, si elles ne les justifient toujours, les choix qu'il opère et prend la mesure des considérations d'intérêt général qui s'attachent à l'intervention ou au maintien d'une législation.

Sans doute, cette écoute et cette sensibilité trouvent-elles leur source dans la culture dominante des membres du Conseil qui, à en croire l'un d'eux, n'est autre que celle du Parlement. (96)

(1) Cons. const., déc. n° 62-20 DC du 6 novembre 1962, cons. 2.

(2) Cons. const., déc. n° 81-632 DC du 16 janvier 1982.

(3) Cons. const., déc. n° 93-325 DC du 13 août 1993.

(4) Cons. const., déc. n° 86-224 DC du 23 janvier 1987, cons. 15.

(5) Voir la sèche censure, fondée sur la séparation des pouvoirs, de la modification du traitement du Président de la République et du Premier ministre, soulevée d'office ; décision n° 2012-654 DC du 9 août 2012, cons. 81 et 82.

(6) Georges Vedel, in La Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et la jurisprudence, PUF, 1989, p. 61.

(7) Cons. const., déc. n° 2001-455 DC du 12 janvier 2002, cons. 9.

(8) Conseil d'État, Rapport public 1991, La Documentation française, 1992, p. 20.

(9) Cons. const., déc. n° 95-370 DC du 30 décembre 1995, cons. 10.

(10) Ibid., cons. 11.

(11) Ibid., cons. 12 et Cons. const., déc. n° 93-329 DC du 13 janvier 1994, cons. 22

(12) Georges Vedel, « Excès de pouvoir administratif et excès de pouvoir législatif (II) », Cahiers du Conseil Constitutionnel, n° 2, 1997, p. 84.

(13) Ibid.

(14) Cons. const., déc. n° 86-225 DC du 23 janvier 1987, cons. 8.

(15) Exceptionnellement, les présidents des deux assemblées exprimèrent des critiques publiques (V. Le Monde du 29 janvier 1987) et la doctrine ne fut pas en reste. Voir, par exemple, Pierre Avril et Jean Gicquel. Pouvoirs n° 41, p. 201 et n° 42, p. 169) ou Guy Carcassonne. Ibid., n° 41, p. 163.

(16) V. décisions n° 2004-500 DC du 29 juillet 2004 ; n° 2005-512 DC du 21 avril 2005 ; n° 2005-532 DC du 19 janvier 2006 ; n° 2006-533 DC du 16 mars 2006, n° 2007-553 DC du 3 mars 2007 ; n° 2008-564 DC du 19 juin 2008 ; n° 2009-580 DC du 10 juin 2009 ; n° 2009-581 DC du 25 juin 2009 ; n° 2010-603 DC du 11 février 2010 ; n° 2010-605 DC du 12 mai 2010 ; n° 2010-607 DC du 10 juin 2010 ; n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 ; n° 2010-618 DC du 9 décembre 2010 ; n° 2011-624 DC du 12 mai 2011 ; n° 2011-631 DC du 9 juin 2011 ; n° 2012-649 DC du 15 mars 2012.

(17) Cons. const., déc. n° 2009-581 DC du 25 juin 2009, cons. 20.

(18) Ibid., cons. 25.

(19) Ibid., cons. 29.

(20) Selon l'expression de Jean Rivero, Actes du colloque d'Aix-en-Provence, Paris, PUF, 1978, p. 263.

(21) Cons. const., déc. n° 2005-512 DC du 21 avril 2005, cons. 23, par laquelle le Conseil a déclassé de lui-même des dispositions étrangères au domaine de la loi dans le cadre du contrôle de l'article 61C.

(22) Traditionnellement, le Conseil se bornait à déclasser des dispositions de nature ordinaire figurant dans une loi organique ; la présence excessive de telles dispositions dans la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale l'a conduit à considérer que « l'introduction dans un texte de loi organique de dispositions n'ayant pas cette nature pourrait en fausser la portée ». Décision n° 2005-519 DC du 29 juillet 2005, cons. 42.

(23) On se reportera avec intérêt à la contribution de Damien Chamussy, « Procédure parlementaire et qualité de la législation : la contribution du Conseil constitutionnel à la sécurité juridique », in Conseil d'État, Rapport public 2006, p. 349.

(24) Cons. const., déc. n° 2001-455 DC du 12 janvier 2002, cons. 9.

(25) Cons. const., déc. n° 2004-500 DC du 29 juillet 2004, cons. 12.

(26) Cons. const., déc. n° 2003-473 DC du 26 juin 2003, cons. 5.

(27) Cons. const., déc. n° 2004-499 DC du 29 juillet 2004, cons. 12.

(28) Cons. const., déc. n° 2004-500 DC du 29 juillet 2004, cons. 13.

(29) Voeux du président du Conseil constitutionnel, M. Pierre Mazeaud, au Président de la République, 3 janvier 2005.

(30) Cons. const., déc. n° 2001-455 DC du 12 janvier 2001, cons. 9.

(31) Cons. const., déc. n° 2006-540 DC du 27 juillet 2006, cons. 9.

(32) Conclusions Latournerie sous CE, Sect., 6 novembre 1936, Arrighi.

(33) V. cependant sur la qualification de principe fondamental reconnu par les lois de la République de l'interdiction de l'extradition dans un but politique, CE, Ass., 3 juillet 1996, Koné, Rec., p. 255, ou sur la portée de l'article 68 de la Constitution, Cass., Ass. plén., 10 octobre 2001, Breisacher, Bulletin criminel 2001, n° 206, p. 660.

(34) À cet égard, il ne faut pas s'étonner du peu de succès rencontré par la curieuse disposition de la loi organique (article 23-8 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958) ouvrant aux présidents des assemblées la possibilité de présenter des observations.

(35) La loi organique du 22 juillet 2010 a ainsi supprimé la formation spéciale de la Cour de cassation chargée d'examiner les questions de constitutionnalité au profit d'un renvoi aux formations habituelles.

(36) Rapport d'information n° 2838 (XIIIe législature) de M. Jean-Luc Warsmann sur l'évaluation de la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution, p. 18 à 22, et audition de Guy Carcassonne, p. 53.

(37) Guy Carcassonne, La QPC, Dalloz, 2011, p. 62.

(38) Cons. const., déc. n° 74-54 DC du 15 janvier 1975, cons. 1 à 7.

(39) Cass., chambre mixte, 24 mai 1975, Société des Cafés Jacques Vabre, JCP, 1975, II, 18180 bis, conclusions Touffait.

(40) CE, Ass., 20 octobre 1989, Nicolo, Rec., p. 190.

(41) Cons. const., déc. n° 2004-496 DC du 10 juin 2004, cons. 7.

(42) Cons. const., déc. n° 2004-498 DC du 29 juillet 2004, cons. 7.

(43) Cons. const., déc. n° 2004-505 DC du 19 novembre 2004, cons. 12.

(44) Cons. const., déc. n° 2006-540 DC du 27 juillet 2006, cons. 17 à 20 et pour une application positive, décision n° 2006-543 DC du 30 novembre 2006, cons. 4 à 9.

(45) Cons. const., déc. n° 2004-505 DC précitée, cons. 11.

(46) À laquelle le Conseil fait désormais référence en lieu et place des dispositions expresses et spécifiques.

(47) Consultable sur le site du Conseil constitutionnel http://www.conseil-constitutionnel.fr.

(48) Guy Carcassonne, La QPC, op. cit., p. 68.

(49) Ibid.

(50) Cons. const., déc. n° 2009-595 DC du 3 décembre 2009, cons. 14.

(51) E. Saulnier-Cassia, « Imbroglio autour de la question prioritaire de constitutionnalité », D., 27 mai 2010, n° 20, p. 1234.

(52) Cass., 16 avril 2010, Melki et Abdeli, n° 10-40.001 et 10-40.002.

(53) Guillaume Drago, Contentieux constitutionnel français, PUF, 3e éd., 2011, p. 464.

(54) « Faut-il maintenir la jurisprudence issue de la décision n° 74-54 DC du 15 janvier 1975 ? », Cahiers du Conseil constitutionnel, n° 7, 1999, p. 99.

(55) Dominique Rousseau, Droit du contentieux constitutionnel, Montchrestien, 9e éd., p. 47 et 49.

(56) Cons. const., déc. n° 85-197 du 23 août 1985, cons. 20.

(57) CE, Ass., 11 mai 2004 Association AC ! et autres, nos 255886, 255887, 255888, 255889, 255890, 255891 et 255892.

(58) Cons. const., déc. n° 2008-564 DC du 19 juin 2008, cons. 58.

(59) Discours lors de la séance publique annuelle de l'Académie des sciences morales et politiques, 9 décembre 1985.

(60) Cons. const., déc. n° 83-164 DC du 29 décembre 1983.

(61) Cons. const., déc. n° 84-184 DC du 29 décembre 1984.

(62) Par exemple, quand saisi à nouveau de quotas de sexes à des élections locales, le Conseil rappelle « que, en l'état, et pour les motifs énoncés dans la décision susvisée du 18 novembre 1982, la qualité de citoyen ouvre le droit de vote et l'éligibilité dans des conditions identiques à tous ceux qui n'en sont exclus ni pour une raison d'âge, d'incapacité ou de nationalité, ni pour une raison tendant à préserver la liberté de l'électeur ou l'indépendance de l'élu, sans que puisse être opérée aucune distinction entre électeurs ou éligibles en raison de leur sexe » (Cons. const. déc. n° 98-407 DC du 14 janvier 1999, cons. 12) ou encore lorsqu'il considère « qu'en ouvrant au législateur, fût-ce à titre expérimental, dérogatoire et limité dans le temps, la possibilité d'autoriser la collectivité territoriale de Corse à prendre des mesures relevant du domaine de la loi, la loi déférée est intervenue dans un domaine qui ne relève que de la Constitution » (Cons. const., déc. n° 2001-454 DC du 17 janvier 2002, cons. 21).

(63) Cons. const., déc. n° 2010-92 QPC du 8 janvier 2011, cons. 5.

(64) Cons. const., déc. n° 83-164 DC précitée.

(65) Cons. const., déc. n° 85-198 DC du 13 décembre 1985, cons. 12.

(66) Cons. const., déc. n° 99-419 DC, cons. 27 et 28.

(67) Cons. const., déc. n° 98-403 DC du 29 juillet 1998, cons. 10 à 20.

(68) Cons. const., déc. n° 2004-492 DC du 2 mars 2004, cons. 65.

(69) Cons. const., déc. n° 74-54 DC du 15 janvier 1975, cons. 1.

(70) Cons. const., déc. n° 2003-468 DC du 3 avril 2003, cons. 42.

(71) Cons. const., déc. n° 85-197 du 23 août 1985 précitée, cons. 27.

(72) Cons. const., déc. n° 84-181 DC du 11 octobre 1984.

(73) Georges Vedel, « Excès de pouvoir administratif et excès de pouvoir législatif (II) », op. cit., p. 86.

(74) Cons. const., déc. n° 84-181 DC précitée, cons. 49 et 50.

(75) V. en ce sens, Dominique Rousseau, Droit du contentieux constitutionnel, op. cit., p. 152.

(76) Cons. const., déc. n° 85-196 DC du 8 août 1985, cons. 16 et 17, et n° 85-197 DC précitée, cons. 34 et 35.

(77) Cons. const., déc. n° 98-402 DC du 25 juin 1998, cons. 17.

(78) CE, 19 mai 1933, Rec., p. 541.

(79) Cons. const., déc. n° 87-237 DC du 30 décembre 1987 et 96-377 DC du 16 juillet 1996. V. en particulier le commentaire critique d'Eric Spitz, RFDA, 1997, p. 539.

(80) Louis Favoreu, RDP, 1986. 436, cité par D. Rousseau, op. cit., p. 151.

(81) Georges Vedel, préface à F. Rangeon, L'idéologie de l'intérêt général, Economica, 1986, p. 3.

(82) Vito Marinese, L'idéal législatif du Conseil constitutionnel, thèse dactyl. Paris X-Nanterre, 2007, p. 223.

(83) Bertrand Mathieu, La loi, Dalloz, 3e éd., p. 131.

(84) Pierre de Montalivet, Les objectifs de valeur constitutionnelle, Dalloz, 2006.

(85) Selon la formule de Nicolas Molfessis, qui ajoute que « Les objectifs de valeur constitutionnelle sont un instrument façonné de toutes pièces par le Conseil constitutionnel pour justifier l'atteinte qu'une loi visant à protéger l'intérêt général pourrait porter à un droit constitutionnel...(et qu'ils) sont donc la subtile marque du rôle que le Conseil entend jouer dans la défense de l'intérêt général, au mépris de droits constitutionnels qui, eux, sont énoncés sans ambiguïté dans les textes dont le Conseil est censé assurer le respect ». Justices, Dalloz, n° 3, 1996. 330.

(86) Cons. const., déc. n° 82-141 DC du 27 juillet 1982, cons. 5.

(87) Cons. const., déc. n° 99-424 DC du 29 décembre 1999, cons. 52.

(88) Cons. const., déc. n° 2004-492 DC du 2 mars 2004, cons. 4. et n° 2011-192 QPC du 10 novembre 2011, cons. 21.

(89) Ainsi, des délais pour la réalisation des prescriptions de diagnostics et de fouilles d'archéologie préventive tendent à concilier l'intérêt général qui s'attache à la préservation du patrimoine archéologique avec des principes constitutionnels tels que le droit de propriété et la liberté d'entreprendre, ainsi qu'avec d'autres objectifs d'intérêt général tels que le développement économique et l'aménagement du territoire. Décision n° 2003-480 DC du 31 juillet 2003, cons. 6.

(90) P. Wachsmann, « Des chameaux et des moustiques. Réflexions critiques sur le Conseil constitutionnel », in Textes réunis par Véronique Champeil-Desplats et Nathalie Ferré, Frontières du droit, critique des droits. Billet d'humeur en l'honneur de Danièle Lochak, LGDJ, Recherches et travaux du Réseau européen Droit & Société à la Maison des sciences de l'homme, Vol. 14, 2007, p. 281. cité par V. Marinese, op. cit., p. 231.

(91) J. Rivero, « Filtrer le moustique et laisser passer le chameau. À propos de la décision du Conseil constitutionnel du 20 janvier 1981 », AJDA, 1981, p. 275.

(92) Dominique Rousseau, Droit du contentieux constitutionnel, op. cit., p. 505 et 511-512.

(93) Comme l'observe Karine Roudier, Le contrôle de constitutionnalité de la législation antiterroriste. Étude comparée des expériences espagnole, française et italienne, Paris, LGDJ, 2012. Prix de thèse du Conseil constitutionnel 2012.

(94) Cons. const., déc. n° 2003-485 DC du 4 décembre 2003, cons. 2.

(95) Guillaume Drago, Contentieux constitutionnel français, op. cit., p. 402.

(96) Alain Lancelot, Cahiers du conseil constitutionnel n° 25 (dossier : 50e anniversaire), août 2009, p. 23.