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L'avenir de la jurisprudence Blocage des prix et des revenus

Jean-Bernard AUBY - Professeur à l'Université de Paris II (Panthéon-Assas)

Cahiers du Conseil constitutionnel n° 19 (Dossier : Loi et réglements) - janvier 2006

I. Le Conseil constitutionnel ne peut censurer l'empiètement du législateur sur le domaine du règlement

Dans sa décision 143-DC du 30 juillet 1982, Blocage des prix et des revenus, le Conseil constitutionnel admettait qu'il ne lui était pas possible, dans le cadre de la procédure de contrôle de constitutionnalité de l'article 61, de censurer l'empiétement du législateur sur le domaine du règlement :

« Considérant... que, si les articles 34 et 37, alinéa 1er, de la Constitution établissent une séparation entre le domaine de la loi et celui du règlement, la portée de ces dispositions doit être appréciée en tenant compte de celles des articles 37, alinéa 2, et 41 ; que la procédure de l'article 41 permet au Gouvernement de s'opposer au cours de la procédure parlementaire et par la voie d'une irrecevabilité à l'insertion d'une disposition réglementaire dans une loi, tandis que celle de l'article 37, alinéa 2, a pour effet, après la promulgation de la loi et par la voie d'un déclassement, de restituer l'exercice de son pouvoir réglementaire au Gouvernement et de donner à celui-ci le droit de modifier une telle disposition par décret ; que l'une et l'autre de ces procédures ont un caractère facultatif ; qu'il apparaît ainsi que, par les articles 34 et 37, alinéa 1er, la Constitution n'a pas entendu frapper d'inconstitutionnalité une disposition de nature réglementaire contenue dans une loi, mais a voulu, à côté du domaine réservé à la loi, reconnaître à l'autorité réglementaire un domaine propre et conférer au Gouvernement, par la mise en oeuvre des procédures spécifiques des articles 37, alinéa 2, et 41, le pouvoir d'en assurer la protection contre d'éventuels empiétements de la loi. »

Vingt-trois ans plus tard, sans renoncer à cette jurisprudence, le Conseil, dans sa décision Avenir de l'École, n° 2005-512 DC du 21 avril 2005, s'est néanmoins reconnu le droit de constater, dans le cadre de la procédure de l'article 61, le caractère réglementaire de dispositions de la loi qui lui était soumise :

« Considérant que les articles 19, 22, 33 et 34 de la loi déférée se bornent respectivement à instituer dans chaque académie une commission sur l'enseignement des langues vivantes étrangères, à modifier la terminologie relative à un organisme déjà existant, à prévoir la création et les conditions d'attribution d'un label de »lycée des métiers", à définir le « projet d'école ou d'établissement » et le règlement intérieur que doivent adopter les écoles et établissements d'enseignement scolaire public ; qu'ils ne mettent en cause ni « les principes fondamentaux... de l'enseignement », qui relèvent de la loi en vertu de l'article 34 de la Constitution, ni aucun autre principe ou règle que la Constitution place dans le domaine de la loi ; que ces dispositions ont, à l'évidence, le caractère réglementaire ".

Voici donc qu'une inflexion jurisprudentielle de réelle importance est apportée à une jurisprudence dont on connaissait les forts enjeux et le poids concret. Nous nous poserons deux questions. La première est de savoir comment interpréter et évaluer la portée du résultat combiné des deux décisions. On essaiera ensuite de déterminer si la survenance de la seconde ne risque pas, par effet retour, de forcer le Conseil à revenir sur la première.

II. Comment en est-on arrivé à la situation actuelle ?

La décision Blocage des prix et des revenus était en soi quelque chose de d'autant plus surprenant que, si l'on avait imaginé une fonction principale pour la procédure de l'article 61 aux origines de la Constitution, c'était bien de faire respecter par le Parlement la frontière entre le domaine de la loi et celui du règlement.

Seulement on sait, au moins depuis un certain colloque tenu à Aix-en-Provence en 1977, que le diagnostic d'enfermement du législateur dans un étroit domaine que l'on avait porté à l'examen de la Constitution en 1958 était inexact. « La révolution n'a pas eu lieu », comme il a été dit alors : parce que le Conseil constitutionnel a donné une interprétation extensive des dispositions des articles 34 et 37, parce qu'il a admis que d'autres normes que celles contenues dans ces articles contribuaient à fonder la compétence du législateur, parce qu'il s'est avéré que la distinction entre le champ de la loi et celui du règlement était davantage verticale qu'horizontale, et qu'au législateur, était confié le domaine éminent de la mise en cause des règles et principes essentiels, etc.

La décision Blocage ajoutait sa pierre de liberté : si le Gouvernement le laisse faire - car, d'une part, rien ne l'oblige à déposer des projets de loi contenant des dispositions relevant du domaine du règlement, d'autre part, il dispose de la procédure de l'article 41 pour s'opposer aux propositions et amendements parlementaires qui sortent du domaine de la loi -, le Parlement peut légiférer au-delà du domaine de la loi. De toute façon, dit le Conseil, le Gouvernement peut à tout moment reprendre le sujet dans son giron et modifier les dispositions que le Parlement a adoptées à l'extérieur du domaine de la loi en usant de la procédure de délégalisation de l'article 37, alinéa 2, de la Constitution.

Cette décision était aussi « discutable en droit », comme l'a écrit Bruno Genevois(1), qu'elle était baignée d'excellentes justifications pratiques. Elle était assurément discutable en droit en ce qu'elle admettait que le gardien de la constitutionnalité n'avait pas à s'émouvoir de ce qui était pourtant, apparemment, une incompétence : c'est-à-dire une forme d'irrégularité que notre droit public considère habituellement comme à ce point grave qu'il lui confère un caractère d'ordre public. La justification tirée par le Conseil du fait que les procédures parallèles de l'article 37, alinéa 2, et de l'article 41 présentaient un caractère facultatif avait du mal à convaincre : aucune des deux n'ayant l'immense portée avérée de celle de l'article 61 - contrôler la constitutionnalité de la loi -, leur discrétionnarité ne projette aucune ombre sur l'attachement du système à l'État de droit.

La décision n'en était pas moins fondée sur d'excellents motifs pratiques. Du point de vue des équilibres institutionnels, comme du point de vue de l'efficacité de la production normative, elle était même impeccable. Si le Gouvernement veut éviter l'intrusion du Parlement dans son domaine, il dispose de l'irrecevabilité de l'article 41. S'il veut laisser faire, ou s'il a laissé passer par mégarde des dispositions de nature réglementaire, il peut rattraper les choses à tout moment par la procédure de délégalisation, qui est une procédure simple, et rapide. Le Gouvernement peut l'employer à tout moment, discrétionnairement, même si sa décision de ne pas en user est, sur le principe, susceptible de recours(2), et, conformément aux dispositions de l'ordonnance du 7 novembre 1958, le Conseil se prononce dans un délai d'un mois, de huit jours même quand le Gouvernement déclare l'urgence : on peut difficilement faire plus commode ! Le Gouvernement peut donc à tout instant, et facilement, récupérer son pouvoir : les équilibres institutionnels sont saufs. Le pouvoir réglementaire peut à tout instant, et facilement, modifier ce que la législateur a adopté dans son domaine : l'efficacité de la production normative y trouve son compte.

Il y a des cas dans lesquels on se passe même de la délégalisation. Par exemple, lorsqu'on fait adopter un code par le législateur, rien n'empêche de lui demander d'abroger au passage des dispositions de forme législative et de nature réglementaire : la place est libre, dès lors, pour le Gouvernement, qui peut reprendre les normes abrogées, en forme réglementaire, sans avoir à passer par la procédure de l'article 37, alinéa 2(3).

S'il en était besoin, on pouvait trouver à la décision une autre justification pratique. C'est qu'il est très certainement plus facile de faire respecter une limite de compétence « vers le haut » que « vers le bas » : on conçoit mieux, intellectuellement, ce que c'est que de mettre en cause un principe essentiel ou une règle essentielle, que ce que c'est que d'aller trop loin dans les détails, de s'immiscer dans la mise en oeuvre. C'est pourtant bien l'objet de la procédure de délégalisation, qui est d'usage courant, objectera-t-on. La prise en compte de la jurisprudence de contrôle de constitutionnalité qui, parfois, impose au législateur de ne pas trop laisser la bride sur le cou au pouvoir réglementaire, de lui donner des indications suffisantes sur la façon dont il doit mettre en oeuvre la loi, indique bien que l'exercice de délimitation « vers le bas » n'est par essence pas aisé. Le législateur qui rentre dans les détails continue sur son élan, le pouvoir réglementaire qui pénètre dans le domaine de la loi s'est nécessairement montré très hardi à un moment ou à un autre.

III. La flexibilité a été interprétée comme une dérive de la loi

Le problème est que la flexibilité qui avait ainsi été introduite dans les règles de délimitation du champ législatif a apporté sa contribution à un phénomène que beaucoup ont interprété comme une dérive de la loi.

On a peine à croire que la crainte éprouvée généralement en 1958 était que la Constitution ait enfermé le législateur dans les limites d'un terrible carcan. À l'heure actuelle, ce que les observateurs relèvent plutôt, c'est une sorte d'inflation de la loi, qui déborde de détails techniques, empiète fréquemment sur le domaine du règlement, se répand en dispositions qui sont plus proclamatoires qu'autre chose, est animée d'une grande instabilité, etc.

Le Gouvernement contribue d'ailleurs au mouvement. Les dispositions « bavardes » de la loi ont souvent leur origine dans ses projets. Le fait que des amendements ou propositions parlementaires pénètrent clairement dans le domaine réglementaire ne le choque pas beaucoup : la preuve en est administrée par la désuétude de fait de la procédure de l'article 41(4). Parfois, le Gouvernement encourage même l'empiétement (5).

Le président du Conseil constitutionnel s'était, lui, ému publiquement de ce laisser-aller dans son discours de voeux du 3 janvier 2005. On s'attendait à un virage jurisprudentiel.

IV. Le Conseil pouvait envisager d'abandonner purement et simplement la solution de l'arrêt « Blocage des prix et des revenus »

Cela n'aurait scandalisé personne.

Il a préféré l'amender fortement, et ce dans une décision quasiment toute entière vouée à la censure des dérives évoquées plus haut, puisqu'elle commence par déclarer certaines dispositions non conformes à la Constitution parce que beaucoup trop vagues et violant par là le principe de clarté de la loi ainsi que l'objectif de valeur constitutionnelle et d'accessibilité de la loi(6). C'est la non-normativité qui est ici sanctionnée.

Dans un second temps, c'est à la réglementarité de diverses autres dispositions que le Conseil s'en prend. Non pas pour déclarer ces dispositions non conformes à la Constitution : la solution de la décision Blocage... n'est pas démentie. Mais tout simplement pour les déclarer de caractère réglementaire, exactement comme il l'aurait fait si la loi, une fois promulguée, lui avait été soumise dans le cadre de la procédure de l'article 37, alinéa 2.

Y avait-il quelque objection à ce que les deux procédures soient ainsi traitées comme alternatives ? Le Conseil a considéré que les termes larges de l'article 37 - qui, en vérité, ne se réfère pas à une procédure particulière, mais impose simplement l'intervention du juge constitutionnel lorsque le texte de forme législative est postérieur à 1958 - permettaient une réponse négative.

On pourrait épiloguer en plaidant que la voie de l'article 37, alinéa 2, est bien organisée par un texte spécial - les articles 24 et suivants de l'ordonnance du 7 novembre 1958 -, ou que la loi soumise au Conseil dans le cadre de la procédure de l'article 61 n'est peut-être pas encore un « texte de forme législative » - seul type d'acte pouvant faire l'objet d'une délégalisation en vertu de l'article 37. Mais cela ne serait pas très utile, la voie de l'article 61 étant elle aussi organisée par un texte - la même ordonnance du 7 novembre 1958, d'ailleurs -, cependant que les actes sur lesquels se penche le Conseil dans la procédure de l'article 61, s'ils n'ont pas encore plein statut d'opposabilité, sont déjà bien lois, et peuvent donc être dits « textes de forme législative » là où leur contenu est matériellement réglementaire.

V. Nous voici donc dotés d'un mécanisme supplémentaire de délégalisation, à caractère préventif

Sommes-nous sûrs de bien savoir comment il fonctionnera ?

Notons d'abord que son secret repose sur la conviction de ce que le Gouvernement saisira bien la balle au bond, qu'il n'aura pas d'hésitation sur le fait que la déclaration de réglementarité émise dans le cadre de la procédure de l'article 61 est bien l'équivalent de celles qui sont faites dans le cadre de la procédure habituelle de délégalisation a posteriori: qu'il n'hésitera donc pas à modifier par décret ce qui aura fait l'objet de cette déclaration. Le Gouvernement ne se lancera que s'il est sûr de voir le Conseil d'État se trouver en communion d'idées, sur tout cela, avec le Conseil constitutionnel.

Il ne devrait pas y avoir de grand mystère sur le statut intermédiaire des dispositions déclarées réglementaires, avant leur modification. Très vraisemblablement, comme les dispositions déclarées réglementaires dans le cadre de la procédure « classique » de délégalisation, elles conserveront le caractère formel de la loi, et ne pourront donc faire l'objet d'aucun recours : elles ne seront vulnérables, comme toute loi, qu'au contrôle de conventionnalité qui conduirait un juge à faire prévaloir sur elles des normes internationales ou européennes.

Aux chapitres de l'initiative et de l'ampleur de la délégalisation, le commentaire que le site internet du Conseil consacre à la décision Avenir de l'École verse la pièce suivante : le juge constitutionnel devrait « se limiter (aux dispositions) qui sont expressément contestées ou, si le grief tiré des empiétements est »transversal", aux plus caractéristiques des dispositions réglementaires du texte ". Les auteurs de la saisine, faut-il préciser, avaient benoîtement plaidé que la loi comportait « de nombreuses dispositions sans aucune portée législative ».

L'idée selon laquelle le tri faisant apparaître les dispositions de nature réglementaire pourrait ne pas être exhaustif n'est pas très choquante : après tout, s'il pense que des dispositions autres que celles épinglées par le Conseil sont de nature réglementaire, et s'il veut les modifier, le Gouvernement pourra toujours user de la procédure « classique » de délégalisation.

La jurisprudence viendra nous indiquer si la déclaration de « réglementarité » peut intervenir d'office, ou si elle doit nécessairement être demandée comme les commentaires autorisés le suggèrent. On sait en tous les cas déjà qu'elle peut être demandée, et qu'elle peut l'être par d'autres que le Gouvernement.

VI. Au demeurant, on voit bien que la solution de la décision « Avenir de l'École » devrait - aussi, surtout ? - avoir un effet dissuasif

Comme la délégalisation a posteriori (7), la délégalisation préventive s'abstient d'être une déclaration d'inconstitutionnalité. Elle n'en a pas moins un aspect stigmatisant, vexatoire : à travers elle, le Parlement s'entend dire qu'il s'est mêlé de ce qui ne le regardait pas, qu'il a laissé aller sa plume, et le Gouvernement qui a inspiré ou laissé faire en prend aussi pour son grade.

On peut donc prévoir une nouvelle inflexion dans les occupations respectives de l'espace normatif par le législateur et le pouvoir réglementaire. Le balancier devrait aujourd'hui repartir vers un peu plus de concision législative. Ce dont on pourra se réjouir, si le pouvoir réglementaire ne profite pas de l'ouverture pour se laisser lui-même aller à la prolixité.

VII. On pardonnera au commentateur universitaire de dire que le dispositif juridique résultant des décisions « Blocage des prix et des revenus » et « Avenir de l'École » le laisse cependant un peu sur sa faim théorique

Et ceci sur deux plans.

La définition juridique de la loi est-elle, dans notre système, formelle ou matérielle ? La loi se reconnaît-elle à la façon dont elle est émise ou à ce sur quoi elle porte ? Notre tradition doctrinale était plutôt dans le sens d'une définition formelle : le législateur pouvant intervenir sur ce qu'il veut, on ne peut reconnaître la loi qu'à son auteur et à sa procédure. La lecture initiale que l'on a faite des dispositions des articles 34 et 37 de la Constitution de 1958 a donné l'impression que l'élément matériel s'introduisait fortement. À la découverte de la décision Blocage des prix et des revenus, on a eu le sentiment que cet élément ne pesait pourtant pas lourd, puisque le législateur pouvait bel et bien toujours intervenir dans tout domaine sans qu'il en résultât une inconstitutionnalité.

La décision Avenir de l'École réintroduit la considération matérielle. Le législateur peut bien toujours émettre des règles en tout domaine - si le Gouvernement n'use pas de l'irrecevabilité de l'article 41 -, mais celles qu'il émet hors du domaine de la loi pourront être marquées au fer rouge de la « réglementarité ». Dans la loi victime de la délégalisation a priori, il y aura des dispositions vraiment législatives, d'autres qui, de forme législative, auront dès l'origine été désignées comme matériellement réglementaires. Le tout sera formellement loi, mais, matériellement, personne ne sera dupe. La loi s'identifiera, certes, toujours par ses caractères formels, mais dans le sein de certaines d'entre elles, des plages matériellement réglementaires seront repérées.

Liée à celle qui vient d'être évoquée, il y a une autre question théorique, qui est de savoir de quelle nature est la règle de délimitation des choses de la loi et de celles du règlement, telle qu'elle résulte des articles 34 et 37 - auquel on joindra l'article 41. Est-ce ou non une règle de compétence ?

La plus spontanée des réponses est qu'il s'agit bien d'une règle de répartition des compétences. Et pourtant, la décision Avenir de l'École nous confirme que sa méconnaissance par le législateur ne constitue pas une violation de la Constitution, alors que le franchissement de la frontière qu'elle trace est une illégalité, de la nature d'une incompétence, et donc d'ordre public, lorsqu'elle est le fait du pouvoir réglementaire.

C'est à se demander si en vérité les règles combinées des articles et 41 n'ont pas, pour le législateur, la simple valeur de règles de procédure. Tout se passe en effet comme si, à l'instar du Parlement anglais, le notre était compétent pour prendre des normes dans tout secteur, y compris le domaine réglementaire. Cependant que le Gouvernement, également compétent en matière réglementaire cela va de soi, peut faire prévaloir sa compétence, évincer le Parlement voulant entrer ou étant entré dans le domaine du règlement, par trois voies : préventivement en ne présentant pas de projets de loi sortant du domaine de la loi et/ou en utilisant les moyens de l'article 41, après le vote de la loi et avant sa promulgation en demandant au Conseil constitutionnel de procéder à des délégalisations a priori, ensuite, en usant de la délégation classique, a posteriori.

On objectera qu'une même norme ne peut pas être règle de compétence pour l'un, règle de procédure pour l'autre. Voire ! Dans les rapports normatifs hiérarchiques, il n'est pas impossible qu'une même délimitation des rôles soit règle de compétence pour l'autorité inférieure, qui ne peut aucunement décider en dehors du champ qui lui est dévolu, et règle de procédure pour l'autorité supérieure qui peut en usant de certaines formalités, contourner la délimitation de son pouvoir : par exemple, la délimitation des pouvoirs entre l'État et les territoires d'outre-mer est pleinement une règle de compétence pour ces derniers, mais elle a essentiellement le sens d'une règle de procédure pour l'État, qui peut toujours la modifier par les formalités de la loi organique.

On aimerait bien que le Conseil constitutionnel nous en dise plus, non seulement sur les données techniques de la procédure dont il a admis l'existence dans la décision du 21 avril 2005, mais aussi sur le sens général de ce qui résulte de la combinaison entre celle-ci et la décision Blocage des prix et des revenus. L'avenir de celle-ci parait assuré, ce dont on n'aurait pas juré il y a quelque temps, mais elle ne nous a pas encore pleinement livré les clefs du temple normatif dont elle est l'un des gardiens.


  1. La jurisprudence du Conseil constitutionnel. Principes directeurs, Éditions STH.
  2. CE, Sect., 3 déc. 1999, Association ornithologique et mammologique de Saône-et-Loire, Rec. 379, concl. F. Lamy.
  3. Guillaume Drago, Contentieux constitutionnel français, Thémis, 1998, p. 251.
  4. Dominique Rousseau, Droit du contentieux constitutionnel, Montchrestien, 2001, p. 281.
  5. Chantal Cans, « La délégalisation : un encouragement au désordre », RD publ., 1999, n° 5, p. 1439.
  6. Suivant la formule figurant dans la jurisprudence du Conseil depuis la décision n° 2001-455 DC du 12 janv. 2002.
  7. Le Conseil précise bien qu'il ne lui appartient pas de contrôler la constitutionnalité des dispositions que le Gouvernement lui soumet, mais seulement d'apprécier si elles relèvent du domaine législatif ou du domaine réglementaire : décision n° 95-177 L du 8 juin 1995.

(1) La jurisprudence du Conseil constitutionnel. Principes directeurs, Éditions STH.
(2) CE, Sect., 3 déc. 1999, Association ornithologique et mammologique de Saône-et-Loire, Rec. 379, concl. F. Lamy.
(3) Guillaume Drago, Contentieux constitutionnel français, Thémis, 1998, p. 251.
(4) Dominique Rousseau, Droit du contentieux constitutionnel, Montchrestien, 2001, p. 281.
(5) Chantal Cans, « La délégalisation : un encouragement au désordre », RD publ., 1999, n° 5, p. 1439.
(6) Suivant la formule figurant dans la jurisprudence du Conseil depuis la décision n° 2001-455 DC du 12 janv. 2002.
(7) Le Conseil précise bien qu'il ne lui appartient pas de contrôler la constitutionnalité des dispositions que le Gouvernement lui soumet, mais seulement d'apprécier si elles relèvent du domaine législatif ou du domaine réglementaire : décision n° 95-177 L du 8 juin 1995.