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Résumé des travaux de l'Assemblée générale et du deuxième Congrès de l'Association des Cours constitutionnelles ayant en partage l'usage du français (ACCPUF)

Cahiers du Conseil constitutionnel n° 9 - février 2001

Libreville, 13-15 septembre 2000

L'Association des Cours constitutionnelles ayant en partage l'usage du français (ACCPUF), qui réunit trente neuf institutions, a tenu à Libreville sa deuxième Assemblée générale et son deuxième Congrès du 13 au 15 septembre 2000. Trente institutions étaient effectivement représentées ; plus d'une centaine de participants ont suivi les travaux.

I. L'Assemblée générale

L'Assemblée générale a voté un règlement intérieur en complément des statuts, également modifiés à cette occasion, désigné un nouveau bureau et adopté un programme triennal.

- Le nouveau Bureau qui fonctionnera pour trois années consécutives, rassemble :

- en qualité de président, la présidente de la Cour constitutionnelle du Gabon,

- en qualité de premier vice-président, la présidente de la Cour suprême du Canada,

- en qualité de deuxième vice-président, la présidente de la Cour constitutionnelle du Bénin,

- en qualité de troisième vice-président, le président du Conseil constitutionnel de Djibouti,

- en qualité de trésorier, le président de la Cour constitutionnelle de Roumanie,

- enfin comme membre de droit, en tant que président sortant de l'association, le président du Conseil constitutionnel français.

Il comporte en outre, et n'ayant pas voix délibérative, un observateur de l'agence intergouvernementale de la francophonie et le secrétaire général de l'association.

- Le programme de travail adopté pour l'exercice triennal 2001-2003 s'inscrit dans la continuité des efforts déployés depuis la création de l'association conformément à ses objectifs.

A.

Le premier objectif est un objectif d'ordre documentaire. Il vise à accroître les ressources de droit comparé disponibles en matière de droit constitutionnel francophone.

Depuis 1997, l'ACCPUF a publié trois ouvrages de référence :

- les Actes de son premier Congrès consacré au principe d'égalité en novembre 1997 ;

- le Bulletin n° 1, synthèse des jurisprudences francophones relatives à ce même principe d'égalité, paru en novembre 1998 ;

- enfin le Bulletin n° 2, recueil des textes régissant l'organisation et le fonctionnement des institutions membres. Cette troisième publication est disponible depuis novembre 1999 à la fois sur papier, sur CD-Rom et sur le site Internet de l'association (www.accpuf.org).

L'année 2000 sera quant à elle consacrée à la publication des Actes du deuxième Congrès ainsi qu'à la mise à jour du Bulletin n° 2.

Il est prévu un Bulletin de jurisprudence en 2001 ; en 2002, un Bulletin préparant le troisième Congrès et en 2003 les Actes du troisième Congrès qui se tiendra à Ottawa.

B.

Le second objectif consiste à favoriser la diffusion de la jurisprudence des Cours constitutionnelles de l'espace francophone et, ultimement, à participer au renforcement de l'autorité de ces institutions. La création d'un observatoire, outil de veille de l'activité des Cours et de l'actualité constitutionnelle francophone, devrait permettre d'atteindre cet objectif.

Neutre et impartial, cet observatoire devrait porter à la connaissance de tout intéressé, depuis le site Internet de l'ACCPUF :

- les décisions importantes des Cours constitutionnelles,

- les communiqués de presse de ces institutions,

- les changements dans leur composition etc.

La diffusion sur le réseau des communiqués de presse préparés par les juridictions elles-mêmes constitue la clé de voûte de ce projet.

Les juges peuvent avoir besoin de la presse pour préserver leur indépendance mais à trop livrer ils risquent aussi de faire perdre au débat juridique la sérénité qu'il doit impérativement conserver.

En ce qui concerne les juridictions de nature constitutionnelle ce paradoxe est encore plus frappant. Car, si les exigences du débat démocratique veulent que le public soit informé des décisions générales de justice qui les concernent, la complexité de celles-ci en rend délicate leur vulgarisation.

Pourtant, la plupart des Cours constitutionnelles se plient à cet exercice civique qui consiste à délivrer, en même temps que la décision, un communiqué de presse qui expose les principaux faits et/ou points de droit soulevés par la requête et jugés par l'institution.

D'ores et déjà, les communiqués des Cours française, canadienne et roumaine sont régulièrement mis en ligne *.

Il est donc proposé d'héberger sur le site de l'association ces communiqués d'annonce ou de décision finale afin de maintenir une veille de jurisprudence constitutionnelle en liaison étroite et sous le contrôle des Cours.

Plusieurs organes de presse, dont RFI, ont montré leur intérêt pour l'ouverture d'une telle rubrique qui pourrait encourager les Cours à mieux assurer encore leur fonction pédagogique.

C.

Enfin, le troisième objectif consiste à renforcer la coopération entre les institutions membres par la mise en place de la base de données jurisprudentielle qui permettra à chaque Cour constitutionnelle de prendre connaissance des précédents rendus par ses homologues.

Cet outil documentaire de droit comparé constitue un outil privilégié de coopération professionnelle dont la raison d'être est double : éclairer le juge constitutionnel qui doit trancher une question de droit nouvelle ou controversée, mais aussi lui permettre d'asseoir plus fortement sa jurisprudence en se référant, le cas échéant, dans sa motivation, à des solutions similaires prononcées par les Cours étrangères.

La mise en place de la base de données jurisprudentielle francophone est au coeur du projet de mise en réseau des Cours constitutionnelles actuellement mené par l'association.

Dans cette optique, l'exercice triennal 1997-2000 a consacré de nombreuses ressources en vue d'approfondir la coopération avec la Commission européenne pour la démocratie par le droit dite Commission de Venise qui développe depuis 1993 une base de données des jurisprudences constitutionnelles européennes. Ces réalisations exemplaires de l'espace européen constituent une référence utile pour l'ACCPUF ; s'ajoute le fait que huit Cours membres de l'association sont également membres de la Commission de Venise (Cour d'arbitrage de Belgique, Cour constitutionnelle de Bulgarie, Cour suprême du Canada, Conseil constitutionnel de France, Cour constitutionnelle de Moldavie, Cour constitutionnelle de Roumanie, Cour constitutionnelle de Slovénie, Tribunal fédéral suisse).

L'accord de coopération avec la Commission de Venise (Vaduz, 30 avr. 1999) a ainsi permis à l'association d'acquérir une méthode similaire de traitement des jurisprudences à celle de l'espace européen. Cette méthode consiste en l'utilisation du même outil d'indexation : le thésaurus systématique de la Commission de Venise que cinq séminaires régionaux de formation ont contribué à divulguer aux collaborateurs des Cours constitutionnelles membres de l'ACCPUF.

L'accueil réservé à ces séminaires, la participation massive des membres de l'association et le travail d'indexation commencé par les Cours participantes sont de réels encouragements.

La perspective d'une fusion de la base de données ACCPUF et de celle de la Commission de Venise est aujourd'hui évoquée.

Intellectuellement, il s'agirait de poursuivre le travail d'indexation des décisions des Cours constitutionnelles de l'espace francophone avec le thésaurus de la Commission de Venise.

Techniquement, l'ACCPUF et la Commission de Venise pourraient disposer d'une interface commune pour accéder à la fois aux décisions des juges constitutionnels francophones et à celles des Cours européennes, enfin aux jurisprudences de la Cour européenne des droits de l'homme ou encore de la Cour constitutionnelle sud-africaine. Il est également prévu d'intégrer les résolutions de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples.

II. Les travaux du Congrès

Les travaux du Congrès se sont quant à eux tenus sur deux journées, les 14 et 15 septembre 2000 et portaient sur « L'accès au juge constitutionnel : modalités et procédures ». Chacune des Cours participantes a produit un rapport national comprenant plusieurs dizaines de rubriques suivant un questionnaire établi par le bureau de l'association.

Ces informations rassemblées ont été synthétisées autour de trois thèmes majeurs.

Le jeudi 14 au matin, un premier rapport présenté par la Cour constitutionnelle du Bénin, sous la présidence de la Haute Cour constitutionnelle de Madagascar, a permis d'aborder le droit au recours dans toute sa diversité. Certaines Cours, dont la Cour gabonaise, l'ouvrent très largement et l'autorisent sur de nombreux textes, d'autres ont des pratiques à la fois plus étroites et abstraites.

Les travaux du jeudi après-midi ont porté sur la question centrale de la recevabilité des requêtes. Le rapport présenté par le Conseil constitutionnel du Maroc, sous la présidence du Conseil constitutionnel du Cambodge, a permis d'identifier les différentes formalités qui sont imposées au requérant pour pouvoir user de son droit au recours et les différentes procédures que les Cours ont adopté pour l'admettre dans les meilleures conditions.

Le vendredi 15 au matin sous la présidence du Conseil constitutionnel du Sénégal et introduit par le rapport du Tribunal fédéral suisse, les congressistes ont discuté de la délicate question des conditions du procès équitable. Il ne suffit pas en effet de pouvoir accéder au juge constitutionnel, il est également nécessaire que devant lui se déroule un procès dans lequel les droits des parties en présence soient également garantis. Les débats autour de ce thème ont été très enrichissants et ont notamment permis de mettre en valeur une distinction fondamentale entre contentieux constitutionnels et notamment entre celles des Cours qui se prononcent avant la promulgation de la loi et celles qui tranchent le litige concret né à l'occasion de l'application de la loi ou d'une autre norme.

La Cour constitutionnelle gabonaise, dans le rapport général final, a noté cette diversité tout en relevant certaines constantes. Les juridictions constitutionnelles ont le souci d'interpréter les textes qui réglementent le droit au recours devant elles de manière souple, extensive et libérale. Parallèlement elles ont, bien qu'elles soient souvent appelées à statuer dans des délais brefs, le souci de préserver les droits des parties dans les contentieux concrets et/ou la transparence de la procédure dans le contentieux abstrait.

Les travaux du Congrès seront intégralement publiés d'ici à la fin de l'année 2000 et diffusés sur le site Internet de l'association à l'adresse suivante : http://www.accpuf.org