Page

Résumés analytiques des décisions rendues au cours du trimestre

Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel n° 53 - octobre 2016

Les décisions du conseil constitutionnel font l'objet, sous la forme d'abstrats, d'une analyse exhaustive, synthétique et systématique en fonction d'une nomenclature comportant seize titres principaux. Ces abstrats sont reproduits dans le présent article et sont précédés d'une table des matières permettant de les identifier en fonction des concepts juridiques qui apparaissent dans les motifs des décisions.

NORMES CONSTITUTIONNELLES

DÉCLARATION DES DROITS DE L’HOMME ET DU CITOYEN DU 26 AOÛT 1789

Article 8

Proportionnalité des peines et des sanctions

Selon l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée ». Les principes ainsi énoncés ne concernent pas seulement les peines prononcées par les juridictions pénales mais s'étendent à toute sanction ayant le caractère d'une punition. Le principe de nécessité des délits et des peines ne fait pas obstacle à ce que les mêmes faits commis par une même personne puissent faire l'objet de poursuites différentes aux fins de sanctions de nature administrative ou pénale en application de corps de règles distincts. Si l'éventualité que deux procédures soient engagées peut conduire à un cumul de sanctions, le principe de proportionnalité implique qu'en tout état de cause le montant global des sanctions éventuellement prononcées ne dépasse pas le montant le plus élevé de l'une des sanctions encourues.

(2016-545 QPC, 24 juin 2016, cons. 8, JORF n° 0151 du 30 juin 2016, texte n° 110)

Selon l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée ». Les principes ainsi énoncés ne concernent pas seulement les peines prononcées par les juridictions pénales mais s'étendent à toute sanction ayant le caractère d'une punition. Le principe de nécessité des délits et des peines ne fait pas obstacle à ce que les mêmes faits commis par une même personne puissent faire l'objet de poursuites différentes aux fins de sanctions de nature administrative ou pénale en application de corps de règles distincts. Si l'éventualité que deux procédures soient engagées peut conduire à un cumul de sanctions, le principe de proportionnalité implique qu'en tout état de cause le montant global des sanctions éventuellement prononcées ne dépasse pas le montant le plus élevé de l'une des sanctions encourues.

(2016-546 QPC, 24 juin 2016, cons. 8, JORF n° 0151 du 30 juin 2016, texte n° 111)

OBJECTIFS DE VALEUR CONSTITUTIONNELLE

Retenus

Pluralisme

L'article 4 de la loi organique de modernisation des règles applicables à l'élection présidentielle insère, dans l'article 3 de la loi du 6 novembre 1962, un nouveau paragraphe I bis fixant les règles applicables au traitement audiovisuel de la campagne pour l'élection du Président de la République, lequel comprend, d'une part, la reproduction et les commentaires des déclarations et écrits des candidats et, d'autre part, la présentation de leur personne.

En prévoyant l'application du principe d'équité au traitement audiovisuel des candidats à l'élection du Président de la République pendant la période allant de la publication de la liste des candidats jusqu'à la veille du début de la campagne « officielle », le législateur organique a, d'une part, entendu favoriser, dans l'intérêt des citoyens, la clarté du débat électoral. Il a entendu, d'autre part et dans le même but, accorder aux éditeurs de services de communication audiovisuelle une liberté accrue dans le traitement de l'information en période électorale, qui ne saurait remettre en cause les principes fixés par le législateur et dont l'application relève du conseil supérieur de l'audiovisuel. Si ces éditeurs conservent un rôle déterminant de diffusion de l'information à destination des citoyens en période électorale, leur diversité a été renforcée. Il existe en outre d'autres modes de diffusion qui contribuent à l'information des citoyens en période électorale sans relever de réglementations identiques. Compte tenu de ces évolutions, en adoptant les dispositions de l'article 4 de la loi organique, le législateur a opéré une conciliation qui n'est pas manifestement déséquilibrée entre les exigences constitutionnelles de pluralisme des courants d'idées et d'opinions et de liberté de communication.

(2016-729 DC, 21 avril 2016, cons. 8 et 13, JORF n° 0098 du 26 avril 2016, texte n° 4)

NORMES LÉGISLATIVES ET RÉGLEMENTAIRES

ÉTENDUE ET LIMITES DE LA COMPÉTENCE LÉGISLATIVE

Incompétence négative

Absence d'incompétence négative

Le législateur a épuisé sa compétence

L'article 4 de la loi organique de modernisation des règles applicables à l'élection présidentielle insère, dans l'article 3 de la loi du 6 novembre 1962, un nouveau paragraphe I bis fixant les règles applicables au traitement audiovisuel de la campagne pour l'élection du Président de la République, lequel comprend, d'une part, la reproduction et les commentaires des déclarations et écrits des candidats et, d'autre part, la présentation de leur personne.

Les premier à quatrième alinéas de ce paragraphe I bis déterminent les règles applicables pendant la période allant de la publication de la liste des candidats jusqu'à la veille du début de la campagne « officielle », comme l'avait recommandé le Conseil constitutionnel dans ses observations. Le premier alinéa prévoit que les éditeurs de services de communication audiovisuelle respectent, sous le contrôle du conseil supérieur de l'audiovisuel, le principe d'équité en ce qui concerne la reproduction et les commentaires des déclarations et écrits des candidats et la présentation de leur personne. Les deuxième à quatrième alinéas confient au conseil supérieur de l'audiovisuel le soin de veiller au respect de ce principe par les éditeurs de services de communication audiovisuelle en fonction, d'une part, du critère de « la représentativité des candidats » et, d'autre part, du critère de « la contribution de chaque candidat à l'animation du débat électoral ». Le troisième alinéa précise que le critère de la représentativité des candidats s'apprécie « en particulier, en fonction des résultats obtenus aux plus récentes élections par les candidats ou par les partis et groupements politiques qui les soutiennent et en fonction des indications de sondages d'opinion ». Le cinquième alinéa de ce paragraphe I bis détermine les règles applicables pendant la période allant du début de la campagne « officielle » jusqu'au tour de scrutin où l'élection est acquise. Il prévoit que les éditeurs de services de communication audiovisuelle respectent, sous le contrôle du conseil supérieur de l'audiovisuel, le principe d'égalité. Le sixième alinéa de ce paragraphe I bis prévoit que le respect des principes d'équité et d'égalité est assuré « dans des conditions de programmation comparables ». Le conseil supérieur de l'audiovisuel est chargé, en précisant ces conditions, de veiller au respect de ces principes. Le dernier alinéa de ce paragraphe I bis prévoit que, pendant la période allant de la publication de la liste des candidats jusqu'au tour de scrutin où l'élection est acquise, le conseil supérieur de l'audiovisuel publie, au moins une fois par semaine, le relevé des temps consacrés, d'une part, à la reproduction et au commentaire des déclarations et écrits des candidats et, d'autre part, à la présentation de leur personne.

En vertu du premier alinéa de l'article 13 de la loi du 30 septembre 1986 : « Le conseil supérieur de l'audiovisuel assure le respect de l'expression pluraliste des courants de pensée et d'opinion dans les programmes des services de radio et de télévision, en particulier pour les émissions d'information politique et générale ». Les critères de « la représentativité des candidats » et de « la contribution de chaque candidat à l'animation du débat électoral » introduits au paragraphe I bis de l'article 3 de la loi du 6 novembre 1962 sont de nature à permettre d'assurer un traitement équitable des candidats à l'élection du Président de la République. Il appartient au conseil supérieur de l'audiovisuel de veiller à l'application de ces critères et, en outre, de préciser les « conditions de programmation comparables » destinées à assurer le respect des principes d'équité, puis d'égalité à compter de la publication de la liste des candidats. Les mesures arrêtées par le conseil supérieur de l'audiovisuel, qui ne sauraient ajouter d'autres critères ou conditions à ceux relevant de la loi organique, sont soumises à l'avis préalable du Conseil constitutionnel et, le cas échéant, au contrôle du juge de l'excès de pouvoir. Ainsi, le législateur organique n'a pas méconnu l'étendue de sa compétence.

(2016-729 DC, 21 avril 2016, cons. 8, 9 et 15, JORF n° 0098 du 26 avril, 2016 texte n° 4)

POUVOIR RÉGLEMENTAIRE

Pouvoir réglementaire national -- Modalités d'exercice (voir Domaine de la loi et du règlement)

Consultations diverses

Organismes dont les avis ne lient aucune autorité publique (voir Titre 14 : Autorités indépendantes)

L'article 11 de la loi du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel crée un « conseil national de l'éducation populaire et de la jeunesse ». Il lui donne compétence pour émettre des avis sur les projets de loi et de décret concernant l'éducation populaire et la jeunesse qui lui sont soumis. Ce conseil peut être saisi de toute question d'intérêt général et faire toutes propositions en ce domaine. Le même article renvoie la composition, le fonctionnement et les modalités de désignation de ses membres à un décret en Conseil d'État. L'article 12 de la même loi du 17 juillet 2001 crée un « conseil national de la jeunesse » présidé par le ministre chargé de la jeunesse. Il émet des avis et formule des propositions sur les questions que lui soumet son président. Il peut réaliser des études et faire des propositions sur tout sujet d'ordre économique, social ou culturel intéressant directement les jeunes et il établit un rapport d'activité annuel, déposé auprès de chacune des assemblées du Parlement. Sa composition et les modalités de désignation de ses membres relèvent d'un décret en Conseil d'État. Ces dispositions ne mettent en cause aucun principe ou règle que la Constitution place dans le domaine de la loi et ont donc un caractère réglementaire.

(2016-263 L, 16 juin 2016, cons. 1 et 2, JORF n° 0141 du 18 juin 2016, texte n° 69)

DROITS ET LIBERTÉS

NOTION DE « DROITS ET LIBERTÉS QUE LA CONSTITUTION GARANTIT » (ART. 61-1)

Constitution du 4 octobre 1958

Article 34

La méconnaissance par le législateur de l'étendue de sa compétence dans la détermination de l'assiette ou du taux d'une imposition n'affecte par elle-même aucun droit ou liberté que la Constitution garantit. Par suite, le grief tiré de la méconnaissance par le législateur de sa compétence en matière de règles concernant l'assiette de la taxe générale sur les activités polluantes doit être écarté.

(2016-537 QPC, 22 avril 2016, cons. 13, JORF n° 0097 du 24 avril 2016, texte n° 29)

Normes de référence ou éléments non pris en considération

Objectifs de valeur constitutionnelle

Les mots « de la taxe prévue à l'article 266 sexies et » figurant au premier alinéa de l'article 268 ter du code des douanes ne sont en tout état de cause pas inintelligibles.

(2016-537 QPC, 22 avril 2016, cons. 14, JORF n° 0097 du 24 avril 2016, texte n° 29)

PRINCIPES GÉNÉRAUX APPLICABLES AUX DROITS ET LIBERTÉS CONSTITUTIONNELLEMENT GARANTIS

Garantie des droits

Droit au recours

Procédure administrative

Les articles 62 et 63 du code des douanes ont pour objet de faciliter la recherche des infractions douanières. À cette fin, ils autorisent les agents des douanes à accéder à bord et à visiter, pour le premier, tous les navires circulant dans la zone maritime du rayon des douanes ou sur les voies navigables et, pour le second, tous les navires se trouvant dans un port, dans une rade ou à quai. Ils ne leur permettent ni de saisir, ni de retenir, des objets ou documents mais les autorisent uniquement à accéder aux lieux et à les visiter.

En premier lieu, le premier alinéa du paragraphe V de chacun de ces deux articles institue, au profit de l'occupant des locaux d'un navire, affectés à un usage privé ou d'habitation, la possibilité de contester, par voie d'action, le déroulement des opérations de visite devant le premier président de la cour d'appel. Le législateur a ainsi prévu une voie de recours au profit de l'occupant de ces locaux lui permettant de faire contrôler par les juridictions compétentes la régularité des opérations conduites en application des articles 62 ou 63 du code des douanes. En adoptant ces dispositions, le législateur a voulu garantir le droit au respect de la vie privée et, en particulier, de l'inviolabilité du domicile de ces occupants.

En second lieu, le propriétaire du navire ou d'un objet saisi à l'occasion de ces opérations de visite dispose, s'il fait l'objet de poursuites pénales, de la faculté de faire valoir, par voie d'exception, la nullité de ces opérations, sur le fondement des articles 173 ou 385 du code de procédure pénale. Il peut également invoquer l'irrégularité de ces opérations à l'appui d'une demande tendant à engager la responsabilité de l'État du fait de la saisie.

En réservant à l'occupant des locaux d'un navire, affectés à un usage privé ou d'habitation, la possibilité de contester par voie d'action la régularité des opérations de visite, compte tenu des voies de contestation ouvertes aux personnes intéressées à un autre titre, le législateur n'a pas porté atteinte au droit des personnes intéressées de contester la régularité des opérations de visite. Dès lors, le grief concernant la méconnaissance du droit à un recours juridictionnel effectif doit être rejeté.

(2016-541 QPC, 18 mai 2016, cons. 5 à 10, JORF n° 0116 du 20 mai 2016, texte n° 91)

Procédure pénale

Les troisième et quatrième alinéas de l'article 145-4 du code de procédure pénale sont relatifs aux permis de visite demandés au cours de l'instruction. Ils ne prévoient une voie de recours qu'à l'encontre des décisions refusant d'accorder un permis de visite aux membres de la famille de la personne placée en détention provisoire au cours de l'instruction. Ni ces dispositions ni aucune autre disposition législative ne permettent de contester devant une juridiction une décision refusant un permis de visite dans les autres hypothèses, qu'il s'agisse d'un permis de visite demandé au cours de l'instruction par une personne qui n'est pas membre de la famille ou d'un permis de visite demandé en l'absence d'instruction ou après la clôture de celle-ci.

L'article 39 de la loi du 24 novembre 2009, relatif à l'accès au téléphone des détenus, ne prévoit aucune voie de recours à l'encontre des décisions refusant l'accès au téléphone à une personne placée en détention provisoire.

Au regard des conséquences qu'entraînent ces refus pour une personne placée en détention provisoire, l'absence de voie de droit permettant la remise en cause de la décision du magistrat, excepté lorsque cette décision est relative au refus d'accorder, durant l'instruction, un permis de visite au profit d'un membre de la famille du prévenu, conduit à ce que la procédure contestée méconnaisse les exigences découlant de l'article 16 de la Déclaration de 1789. Elle prive également de garanties légales la protection constitutionnelle du droit au respect de la vie privée et du droit de mener une vie familiale normale. Censure pour méconnaissance du droit à un recours juridictionnel effectif.

(2016-543 QPC, 24 mai 2016, cons. 12 à 14, JORF n° 0124 du 29 mai 2016, texte n° 42)

Les troisième et quatrième alinéas de l'article 145-4 du code de procédure pénale imposent au juge d'instruction une décision écrite et spécialement motivée pour refuser de délivrer un permis de visite à un membre de la famille de la personne détenue, lorsque le placement en détention provisoire excède un mois. Ils prévoient que cette décision peut être déférée par le demandeur au président de la chambre de l'instruction, qui doit statuer dans un délai de cinq jours. Toutefois ces dispositions n'imposent pas au juge d'instruction saisi de telles demandes de statuer dans un délai déterminé sur celles-ci. S'agissant d'une demande portant sur la possibilité pour une personne placée en détention provisoire de recevoir des visites, l'absence de tout délai déterminé imparti au juge d'instruction pour statuer n'ouvre aucune voie de recours en l'absence de réponse du juge. Cette absence de délai déterminé conduit donc à ce que la procédure applicable méconnaisse les exigences découlant de l'article 16 de la Déclaration de 1789. Elle prive également de garanties légales la protection constitutionnelle du droit au respect de la vie privée et du droit de mener une vie familiale normale. Censure pour méconnaissance du droit à un recours juridictionnel effectif.

(2016-543 QPC, 24 mai 2016, cons. 15 et 16, JORF n° 0124 du 29 mai 2016, texte n° 42)

Sécurité juridique

Atteinte à un acte ou à une situation légalement acquise

L'imposition due par le contribuable à raison de plus-values placées en report d'imposition est liquidée selon des règles fixées par le législateur postérieurement à la période au cours de laquelle le fait générateur de l'imposition est intervenu. Les dispositions contestées excluent, de manière rétroactive, le bénéfice de l'abattement pour durée de détention aux plus-values placées en report d'imposition avant la date de leur entrée en vigueur.

Lorsque le législateur permet à un contribuable, à sa demande, d'obtenir le report de l'imposition d'une plus-value, le contribuable doit être regardé comme ayant accepté les conséquences du rattachement de cette plus-value à l'année au cours de laquelle intervient l'événement qui met fin au report d'imposition. En particulier, l'imposition de la plus-value selon le taux applicable l'année de cet événement ne porte, par elle-même, atteinte à aucune exigence constitutionnelle.

En revanche, si le report d'imposition d'une plus-value s'applique de plein droit, dès lors que sont satisfaites les conditions fixées par le législateur, le montant de l'imposition est arrêté, sans option du contribuable, selon des règles, en particulier de taux, qui peuvent ne pas être celles applicables l'année de la réalisation de la plus-value. Dans cette hypothèse, seul un motif d'intérêt général suffisant peut justifier que la plus-value soit ainsi rétroactivement soumise à des règles de liquidation qui n'étaient pas déterminées à la date de sa réalisation. En l'espèce aucun motif d'intérêt général ne justifie l'application rétroactive de telles règles de liquidation à une plus value placée, antérieurement à leur entrée en vigueur, en report d'imposition obligatoire.

Par suite, les dispositions contestées ne sauraient, sans porter atteinte aux situations légalement acquises, avoir pour objet ou pour effet de conduire à appliquer des règles d'assiette et de taux autres que celles applicables au fait générateur de l'imposition de plus-values mobilières obligatoirement placées en report d'imposition. Sous cette réserve, le grief tiré de la méconnaissance de l'article 16 de la Déclaration de 1789 doit être écarté.

(2016-538 QPC, 22 avril 2016, cons. 12 à 15, JORF n° 0097 du 24 avril 2016, texte n° 30)

Autre mesure rétroactive

Conditions de la rétroactivité

L'imposition due par le contribuable à raison de plus-values placées en report d'imposition est liquidée selon des règles fixées par le législateur postérieurement à la période au cours de laquelle le fait générateur de l'imposition est intervenu. Les dispositions contestées excluent, de manière rétroactive, le bénéfice de l'abattement pour durée de détention aux plus-values placées en report d'imposition avant la date de leur entrée en vigueur.

Lorsque le législateur permet à un contribuable, à sa demande, d'obtenir le report de l'imposition d'une plus-value, le contribuable doit être regardé comme ayant accepté les conséquences du rattachement de cette plus-value à l'année au cours de laquelle intervient l'événement qui met fin au report d'imposition. En particulier, l'imposition de la plus-value selon le taux applicable l'année de cet événement ne porte, par elle-même, atteinte à aucune exigence constitutionnelle.

En revanche, si le report d'imposition d'une plus-value s'applique de plein droit, dès lors que sont satisfaites les conditions fixées par le législateur, le montant de l'imposition est arrêté, sans option du contribuable, selon des règles, en particulier de taux, qui peuvent ne pas être celles applicables l'année de la réalisation de la plus-value. Dans cette hypothèse, seul un motif d'intérêt général suffisant peut justifier que la plus-value soit ainsi rétroactivement soumise à des règles de liquidation qui n'étaient pas déterminées à la date de sa réalisation. En l'espèce aucun motif d'intérêt général ne justifie l'application rétroactive de telles règles de liquidation à une plus value placée, antérieurement à leur entrée en vigueur, en report d'imposition obligatoire.

Par suite, les dispositions contestées ne sauraient, sans porter atteinte aux situations légalement acquises, avoir pour objet ou pour effet de conduire à appliquer des règles d'assiette et de taux autres que celles applicables au fait générateur de l'imposition de plus-values mobilières obligatoirement placées en report d'imposition. Sous cette réserve, le grief tiré de la méconnaissance de l'article 16 de la Déclaration de 1789 doit être écarté.

(2016-538 QPC, 22 avril 2016, cons. 12 à 15, JORF n° 0097 du 24 avril 2016, texte n° 30)

Liberté et responsabilité

Applications

Les dommages qui résultent des accidents du travail survenus par le fait ou à l'occasion du travail dans les collectivités d'outre-mer auxquelles les dispositions du décret n° 57-245 du 24 février 1957 sont applicables ainsi qu'en Nouvelle-Calédonie donnent droit à une indemnisation forfaitaire, en vertu de l'article 27 de ce décret, au titre de l'incapacité ou du décès de la victime. Les caisses de compensation des prestations familiales et des accidents du travail prennent en charge cette indemnisation. Les dispositions de l'article 34 de ce décret confèrent à la victime d'un accident du travail dû à la faute inexcusable de l'employeur ou à ses ayants droit un droit à majoration de ces indemnités. Cette victime ou ses ayants droit ne peuvent engager une action en responsabilité contre l'employeur afin d'obtenir la réparation des dommages objets de ces indemnités, lesquelles compensent forfaitairement la perte de salaire résultant de l'incapacité ou du décès.

D'une part, en instaurant un régime d'assurance sociale des accidents du travail et des maladies professionnelles dans les territoires d'outre-mer, le décret du 24 février 1957 a mis en œuvre les exigences énoncées par le onzième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946. Pour concilier le droit des victimes d'actes fautifs d'obtenir la réparation de leur préjudice avec la mise en œuvre des exigences résultant du onzième alinéa du Préambule de 1946, il était loisible au législateur d'instaurer un régime spécifique de réparation de l'accident du travail dû à une faute inexcusable de l'employeur se substituant partiellement à la responsabilité de ce dernier.

D'autre part, les dispositions de l'article 34 du décret du 24 février 1957, en garantissant l'automaticité, la rapidité et la sécurité de la réparation des accidents du travail dus à une faute inexcusable de l'employeur, poursuivent un objectif d'intérêt général. Compte tenu de la situation particulière d'un salarié dans le cadre de son activité professionnelle, la dérogation au droit commun de la responsabilité pour faute, résultant de la réparation forfaitaire de la perte de salaire, n'institue pas des restrictions disproportionnées par rapport à l'objectif d'intérêt général poursuivi. Toutefois, les dispositions contestées ne sauraient, sans porter une atteinte disproportionnée au droit des victimes d'actes fautifs, faire obstacle à ce que ces mêmes personnes puissent demander à l'employeur réparation de l'ensemble des dommages non couverts par les indemnités majorées accordées en vertu des dispositions du décret du 24 février 1957, conformément aux règles de droit commun de l'indemnisation des dommages. Sous cette réserve, les dispositions de l'article 34 du décret du 24 février 1957 ne méconnaissent pas le principe de responsabilité.

(2016-533 QPC, 14 avril 2016, cons. 5 à 9, JORF n° 0090 du 16 avril 2016, texte n° 81)

DROIT DE PROPRIÉTÉ

Protection contre la privation de propriété

Notion de privation de propriété

Les dispositions du second alinéa du paragraphe I de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme permettent à l'autorité administrative de subordonner la délivrance d'un permis de construire ou l'absence d'opposition à une déclaration de travaux à l'institution d'une servitude interdisant ou limitant l'usage, en période hivernale, des chalets d'alpage ou des bâtiments d'estive non desservis par des voies et réseaux. La servitude instituée en vertu des dispositions contestées n'entraîne pas une privation de propriété au sens de l'article 17 de la Déclaration de 1789 mais une limitation à l'exercice du droit de propriété.

(2016-540 QPC, 10 mai 2016, cons. 4 à 6, JORF n° 0110 du 12 mai 2016, texte n° 39)

Contrôle des atteintes à l'exercice du droit de propriété

Absence d'atteinte au droit de propriété contraire à la Constitution

Les dispositions du second alinéa du paragraphe I de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme permettent à l'autorité administrative de subordonner la délivrance d'un permis de construire ou l'absence d'opposition à une déclaration de travaux à l'institution d'une servitude interdisant ou limitant l'usage, en période hivernale, des chalets d'alpage ou des bâtiments d'estive non desservis par des voies et réseaux.

En permettant d'instituer une telle servitude, le législateur a voulu éviter que l'autorisation de réaliser des travaux sur des chalets d'alpage ou des bâtiments d'estive ait pour conséquence de faire peser de nouvelles obligations de desserte de ces bâtiments par les voies et réseaux. Il a également voulu garantir la sécurité des personnes en période hivernale. Ainsi le législateur a poursuivi un motif d'intérêt général. Le champ d'application des dispositions contestées est circonscrit aux seuls chalets d'alpage et bâtiments d'estive conçus à usage saisonnier et qui, soit ne sont pas desservis par des voies et réseaux, soit sont desservis par des voies et réseaux non utilisables en période hivernale. La servitude qu'elles prévoient ne peut être instituée qu'à l'occasion de la réalisation de travaux exigeant un permis de construire ou une déclaration de travaux. Elle s'applique uniquement pendant la période hivernale et ne peut excéder ce qui est nécessaire compte tenu de l'absence de voie ou de réseau. La décision d'établissement de la servitude, qui est subordonnée à la réalisation, par le propriétaire, de travaux exigeant un permis de construire ou une déclaration de travaux, est placée sous le contrôle du juge administratif. Le propriétaire du bien objet de la servitude dispose de la faculté, au regard des changements de circonstances, d'en demander l'abrogation à l'autorité administrative à tout moment. Il résulte de l'ensemble de ces motifs que les dispositions contestées ne portent pas au droit de propriété une atteinte disproportionnée à l'objectif poursuivi. Le grief tiré de la méconnaissance de l'article 2 de la Déclaration de 1789 doit donc être écarté.

(2016-540 QPC, 10 mai 2016, cons. 4, 5 et 7 à 10, JORF n° 0110 du 12 mai 2016, texte n° 39)

LIBERTÉ D'EXPRESSION ET DE COMMUNICATION

Communication audiovisuelle

L'article 4 de la loi organique de modernisation des règles applicables à l'élection présidentielle insère, dans l'article 3 de la loi du 6 novembre 1962, un nouveau paragraphe I bis fixant les règles applicables au traitement audiovisuel de la campagne pour l'élection du Président de la République, lequel comprend, d'une part, la reproduction et les commentaires des déclarations et écrits des candidats et, d'autre part, la présentation de leur personne.

En prévoyant l'application du principe d'équité au traitement audiovisuel des candidats à l'élection du Président de la République pendant la période allant de la publication de la liste des candidats jusqu'à la veille du début de la campagne « officielle », le législateur organique a, d'une part, entendu favoriser, dans l'intérêt des citoyens, la clarté du débat électoral. Il a entendu, d'autre part et dans le même but, accorder aux éditeurs de services de communication audiovisuelle une liberté accrue dans le traitement de l'information en période électorale, qui ne saurait remettre en cause les principes fixés par le législateur et dont l'application relève du conseil supérieur de l'audiovisuel. Si ces éditeurs conservent un rôle déterminant de diffusion de l'information à destination des citoyens en période électorale, leur diversité a été renforcée. Il existe en outre d'autres modes de diffusion qui contribuent à l'information des citoyens en période électorale sans relever de réglementations identiques. Compte tenu de ces évolutions, en adoptant les dispositions de l'article 4 de la loi organique, le législateur a opéré une conciliation qui n'est pas manifestement déséquilibrée entre les exigences constitutionnelles de pluralisme des courants d'idées et d'opinions et de liberté de communication.

(2016-729 DC, 21 avril 2016, cons. 8 et 13, JORF n° 0098 du 26 avril 2016, texte n° 4)

PRINCIPES DE DROIT PÉNAL ET DE PROCÉDURE PÉNALE

Champ d'application des principes de l'article 8 de la Déclaration de 1789

Transposition en matière de répression administrative

L'amende civile instituée par la troisième phrase du deuxième alinéa du paragraphe III de l'article L. 442-6 du code de commerce, qui sanctionne les pratiques restrictives de concurrence, a la nature d'une sanction pécuniaire. Le principe selon lequel nul n'est punissable que de son propre fait lui est applicable.

(2016-542 QPC, 18 mai 2016, cons. 7, JORF n° 0116 du 20 mai 2016, texte n° 92)

Principes de nécessité et de proportionnalité

Absence de méconnaissance des principes de nécessité et de proportionnalité des peines

Détermination des infractions et des peines

L'article 1729 du code général des impôts institue, en cas de manquement délibéré du contribuable, une majoration de 40 % qui est portée à 80 % dans certains cas d'abus de droit ou si le contribuable s'est rendu coupable de manœuvres frauduleuses. Ces sanctions financières préviennent et répriment les insuffisances volontaires de déclaration de la base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt. La nature de ces sanctions financières est directement liée à celle des infractions réprimées. Les taux de majoration fixés par le législateur ne sont pas manifestement disproportionnés.

Prises isolément, les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts ne sont donc pas contraires aux principes de nécessité des délits et des peines et de proportionnalité des peines.

(2016-545 QPC, 24 juin 2016, cons. 10 et 11, JORF n° 0151 du 30 juin 2016, texte n° 110)

Les dispositions contestées de l'article 1741 du code général des impôts punissent d'une amende de 37 500 euros, doublée en cas de fraude aggravée, et d'un emprisonnement de cinq ans quiconque a « volontairement dissimulé une part des sommes sujettes à l'impôt ». En cas de récidive dans un délai de cinq ans, ces sanctions sont élevées à une amende de 100 000 euros et un emprisonnement de dix ans. Des peines complémentaires, d'une part, de privation des droits civiques, civils et de famille et, d'autre part, de publicité de la décision de condamnation peuvent également être prononcées par le juge pénal. Ces sanctions peuvent être appliquées aux contribuables qui, d'une façon frauduleuse, dissimulent volontairement des sommes soumises à l'impôt. Au regard de l'incrimination prévue par les dispositions contestées, les peines instituées par le législateur ne sont pas manifestement disproportionnées.

Toutefois, les dispositions contestées de l'article 1741 du code général des impôts ne sauraient, sans méconnaître le principe de nécessité des délits, permettre qu'un contribuable qui a été déchargé de l'impôt par une décision juridictionnelle devenue définitive pour un motif de fond puisse être condamné pour fraude fiscale.

Sous cette réserve, les dispositions contestées de l'article 1741 du code général des impôts prises isolément ne sont pas contraires aux principes de nécessité des délits et des peines et de proportionnalité des peines.

(2016-545 QPC, 24 juin 2016, cons. 12 à 14, JORF n° 0151 du 30 juin 2016, texte n° 110)

L'article 1729 du code général des impôts institue, en cas de manquement délibéré du contribuable, une majoration de 40 % qui est portée à 80 % dans certains cas d'abus de droit ou si le contribuable s'est rendu coupable de manœuvres frauduleuses. Ces sanctions financières préviennent et répriment les insuffisances volontaires de déclaration de la base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt. La nature de ces sanctions financières est directement liée à celle des infractions réprimées. Les taux de majoration fixés par le législateur ne sont pas manifestement disproportionnés.

Prises isolément, les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts ne sont donc pas contraires aux principes de nécessité des délits et des peines et de proportionnalité des peines.

(2016-546 QPC, 24 juin 2016, cons. 10 et 11, JORF n° 0151 du 30 juin 2016, texte n° 111)

Les dispositions contestées de l'article 1741 du code général des impôts punissent d'une amende de 500 000 euros, qui s'élève à 1 000 000 euros en cas de fraude aggravée, et d'un emprisonnement de cinq ans, qui s'élève à sept ans en cas de fraude aggravée, quiconque a « volontairement dissimulé une part des sommes sujettes à l'impôt ». Des peines complémentaires, d'une part, de privation des droits civiques, civils et de famille et, d'autre part, de publicité de la décision de condamnation peuvent également être prononcées par le juge pénal. Ces sanctions peuvent être appliquées aux contribuables qui, d'une façon frauduleuse, dissimulent volontairement des sommes soumises à l'impôt. Au regard de l'incrimination prévue par les dispositions contestées, les peines instituées par le législateur ne sont pas manifestement disproportionnées.

Toutefois, les dispositions contestées de l'article 1741 du code général des impôts ne sauraient, sans méconnaître le principe de nécessité des délits, permettre qu'un contribuable qui a été déchargé de l'impôt par une décision juridictionnelle devenue définitive pour un motif de fond puisse être condamné pour fraude fiscale.

Sous cette réserve, les dispositions contestées de l'article 1741 du code général des impôts prises isolément ne sont pas contraires aux principes de nécessité des délits et des peines et de proportionnalité des peines.

(2016-546 QPC, 24 juin 2016, cons. 12 à 14, JORF n° 0151 du 30 juin 2016, texte n° 111)

Principe Non bis in idem

Les insuffisances volontaires de déclaration d'éléments servant à la détermination de l'assiette de l'impôt et à sa liquidation sont réprimées par l'article 1729 et par les dispositions contestées de l'article 1741. Ce dernier article précise que les sanctions qu'il prévoit s'appliquent « sans préjudice des dispositions particulières relatées dans la présente codification » et « indépendamment des sanctions fiscales applicables ».

Par conséquent, une personne sanctionnée sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts est susceptible de faire également l'objet de poursuites pénales sur le fondement de l'article 1741 du même code.

Selon l'article 13 de la Déclaration de 1789 : « Pour l'entretien de la force publique et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable, elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés ». Il en découle l'objectif de valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude fiscale.

Les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts permettent à l'administration fiscale d'infliger des sanctions pécuniaires aux contribuables notamment en cas de manquement délibéré, d'abus de droit ou de manœuvres frauduleuses. Ces sanctions, dont le niveau varie selon la nature de l'infraction et en proportion des droits éludés, s'ajoutent à l'impôt dû et sont recouvrées suivant les mêmes règles. Elles visent à garantir la perception de la contribution commune et à préserver les intérêts financiers de l'État. Elles assurent le bon fonctionnement du système fiscal qui repose sur la sincérité et l'exactitude des déclarations souscrites par les contribuables.

Les dispositions contestées de l'article 1741 du code général des impôts répriment la dissimulation frauduleuse d'éléments nécessaires à l'établissement de l'impôt principalement par des amendes et des peines d'emprisonnement. Elles visent ainsi à garantir l'accomplissement volontaire par les contribuables de leurs obligations fiscales. Les poursuites engagées sur le fondement de l'article 1741 ont un caractère public qui leur confère une exemplarité et une portée dissuasive supplémentaire pour l'ensemble des personnes susceptibles de manquer frauduleusement à leurs obligations fiscales. L'article 1741 du code général des impôts permet également de recouvrer la contribution commune dès lors que toute personne ayant fait l'objet d'une condamnation sur son fondement est, par application de l'article 1745 du même code, solidairement tenue avec le redevable légal au paiement de l'impôt fraudé et des majorations afférentes.

Il résulte de ce qui précède que les dispositions de l'article 1729 comme les dispositions contestées de l'article 1741 permettent d'assurer ensemble la protection des intérêts financiers de l'État ainsi que l'égalité devant l'impôt, en poursuivant des finalités communes, à la fois dissuasive et répressive. Le recouvrement de la nécessaire contribution publique et l'objectif de lutte contre la fraude fiscale justifient l'engagement de procédures complémentaires dans les cas de fraudes les plus graves. Aux contrôles à l'issue desquels l'administration fiscale applique des sanctions pécuniaires peuvent ainsi s'ajouter des poursuites pénales dans des conditions et selon des procédures organisées par la loi.

Le principe de nécessité des délits et des peines ne saurait interdire au législateur de fixer des règles distinctes permettant l'engagement de procédures conduisant à l'application de plusieurs sanctions afin d'assurer une répression effective des infractions. Ce principe impose néanmoins que les dispositions de l'article 1741 ne s'appliquent qu'aux cas les plus graves de dissimulation frauduleuse de sommes soumises à l'impôt. Cette gravité peut résulter du montant des droits fraudés, de la nature des agissements de la personne poursuivie ou des circonstances de leur intervention.

La combinaison des exigences constitutionnelles découlant de l'article 8 de la Déclaration de 1789 et de celles découlant de son article 13 permet que, dans les conditions énoncées aux paragraphes 20 à 21, les contribuables auteurs des manquements les plus graves puissent faire l'objet de procédures complémentaires et de sanctions proportionnées en application de l'article 1729 et des dispositions contestées de l'article 1741.

Sous les réserves énoncées aux paragraphes 13 et 21, l'application combinée de l'article 1729 et des dispositions contestées de l'article 1741 du code général des impôts ne peut donc être regardée comme conduisant à l'engagement de poursuites différentes aux fins de sanctions de faits identiques en application de corps de règles distincts et ne méconnaît pas le principe de nécessité des délits et des peines.

(2016-545 QPC, 24 juin 2016, cons. 15 à 24, JORF n° 0151 du 30 juin 2016, texte n° 110)

Les insuffisances volontaires de déclaration d'éléments servant à la détermination de l'assiette de l'impôt et à sa liquidation sont réprimées par l'article 1729 et par les dispositions contestées de l'article 1741. Ce dernier article précise que les sanctions qu'il prévoit s'appliquent « sans préjudice des dispositions particulières relatées dans la présente codification » et « indépendamment des sanctions fiscales applicables ».

Par conséquent, une personne sanctionnée sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts est susceptible de faire également l'objet de poursuites pénales sur le fondement de l'article 1741 du même code.

Selon l'article 13 de la Déclaration de 1789 : « Pour l'entretien de la force publique et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable, elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés ». Il en découle l'objectif de valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude fiscale.

Les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts permettent à l'administration fiscale d'infliger des sanctions pécuniaires aux contribuables notamment en cas de manquement délibéré, d'abus de droit ou de manœuvres frauduleuses. Ces sanctions, dont le niveau varie selon la nature de l'infraction et en proportion des droits éludés, s'ajoutent à l'impôt dû et sont recouvrées suivant les mêmes règles. Elles visent à garantir la perception de la contribution commune et à préserver les intérêts financiers de l'État. Elles assurent le bon fonctionnement du système fiscal qui repose sur la sincérité et l'exactitude des déclarations souscrites par les contribuables.

Les dispositions contestées de l'article 1741 du code général des impôts répriment la dissimulation frauduleuse d'éléments nécessaires à l'établissement de l'impôt principalement par des amendes et des peines d'emprisonnement. Elles visent ainsi à garantir l'accomplissement volontaire par les contribuables de leurs obligations fiscales. Les poursuites engagées sur le fondement de l'article 1741 ont un caractère public qui leur confère une exemplarité et une portée dissuasive supplémentaire pour l'ensemble des personnes susceptibles de manquer frauduleusement à leurs obligations fiscales. L'article 1741 du code général des impôts permet également de recouvrer la contribution commune dès lors que toute personne ayant fait l'objet d'une condamnation sur son fondement est, par application de l'article 1745 du même code, solidairement tenue avec le redevable légal au paiement de l'impôt fraudé et des majorations afférentes.

Il résulte de ce qui précède que les dispositions de l'article 1729 comme les dispositions contestées de l'article 1741 permettent d'assurer ensemble la protection des intérêts financiers de l'État ainsi que l'égalité devant l'impôt, en poursuivant des finalités communes, à la fois dissuasive et répressive. Le recouvrement de la nécessaire contribution publique et l'objectif de lutte contre la fraude fiscale justifient l'engagement de procédures complémentaires dans les cas de fraudes les plus graves. Aux contrôles à l'issue desquels l'administration fiscale applique des sanctions pécuniaires peuvent ainsi s'ajouter des poursuites pénales dans des conditions et selon des procédures organisées par la loi.

Le principe de nécessité des délits et des peines ne saurait interdire au législateur de fixer des règles distinctes permettant l'engagement de procédures conduisant à l'application de plusieurs sanctions afin d'assurer une répression effective des infractions. Ce principe impose néanmoins que les dispositions de l'article 1741 ne s'appliquent qu'aux cas les plus graves de dissimulation frauduleuse de sommes soumises à l'impôt. Cette gravité peut résulter du montant des droits fraudés, de la nature des agissements de la personne poursuivie ou des circonstances de leur intervention.

La combinaison des exigences constitutionnelles découlant de l'article 8 de la Déclaration de 1789 et de celles découlant de son article 13 permet que, dans les conditions énoncées aux paragraphes 20 à 21, les contribuables auteurs des manquements les plus graves puissent faire l'objet de procédures complémentaires et de sanctions proportionnées en application de l'article 1729 et des dispositions contestées de l'article 1741.

Sous les réserves énoncées aux paragraphes 13 et 21, l'application combinée de l'article 1729 et des dispositions contestées de l'article 1741 du code général des impôts ne peut donc être regardée comme conduisant à l'engagement de poursuites différentes aux fins de sanctions de faits identiques en application de corps de règles distincts et ne méconnaît pas le principe de nécessité des délits et des peines.

(2016-546 QPC, 24 juin 2016, cons. 15 à 24, JORF n° 0151 du 30 juin 2016, texte n° 111)

Non-cumul des peines

Si l'éventualité que deux procédures soient engagées peut conduire à un cumul de sanctions, le principe de proportionnalité implique qu'en tout état de cause le montant global des sanctions éventuellement prononcées ne dépasse pas le montant le plus élevé de l'une des sanctions encourues. Sous cette réserve, l'application combinée des dispositions de l'article 1729 et des dispositions contestées de l'article 1741 du code général des impôts ne méconnaît pas le principe de proportionnalité des peines.

(2016-545 QPC, 24 juin 2016, cons. 24, JORF n° 0151 du 30 juin 2016, texte n° 110)

Si l'éventualité que deux procédures soient engagées peut conduire à un cumul de sanctions, le principe de proportionnalité implique qu'en tout état de cause le montant global des sanctions éventuellement prononcées ne dépasse pas le montant le plus élevé de l'une des sanctions encourues. Sous cette réserve, l'application combinée des dispositions de l'article 1729 et des dispositions contestées de l'article 1741 du code général des impôts ne méconnaît pas le principe de proportionnalité des peines.

(2016-546 QPC, 24 juin 2016, cons. 24, JORF n° 0151 du 30 juin 2016, texte n° 111)

Responsabilité pénale

Principe de responsabilité personnelle

Selon l'article 8 de la Déclaration de 1789, « la Loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une Loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée ». Selon son article 9, tout homme est « présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable ». Il résulte de ces articles que nul n'est punissable que de son propre fait. Ce principe s'applique non seulement aux peines prononcées par les juridictions répressives mais aussi à toute sanction ayant le caractère d'une punition.

Appliqué en dehors du droit pénal, le principe selon lequel nul n'est punissable que de son propre fait peut faire l'objet d'adaptations, dès lors que celles-ci sont justifiées par la nature de la sanction et par l'objet qu'elle poursuit et qu'elles sont proportionnées à cet objet.

(2016-542 QPC, 18 mai 2016, cons. 5 et 6, JORF n° 0116 du 20 mai 2016, texte n° 92)

Il résulte de la jurisprudence constante de la Cour de cassation que les dispositions de la troisième phrase du deuxième alinéa du paragraphe III de l'article L. 442-6 du code de commerce permettent de sanctionner par une amende civile les pratiques restrictives de concurrence de toute entreprise, indépendamment du statut juridique de celle-ci, et sans considération de la personne qui l'exploite. L'amende civile peut ainsi être prononcée à l'encontre de la personne morale à laquelle l'entreprise a été juridiquement transmise.

Appliqué en dehors du droit pénal, le principe selon lequel nul n'est punissable que de son propre fait peut faire l'objet d'adaptations, dès lors que celles-ci sont justifiées par la nature de la sanction et par l'objet qu'elle poursuit et qu'elles sont proportionnées à cet objet.

En premier lieu, l'amende civile instituée par les dispositions contestées, qui sanctionne les pratiques restrictives de concurrence, a la nature d'une sanction pécuniaire.

En deuxième lieu, en définissant au paragraphe I de l'article L. 442-6 du code de commerce, « l'auteur » passible de ces sanctions pécuniaires comme étant « tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au registre des métiers », le législateur se réfère à des activités économiques, quelles que soient les formes juridiques sous lesquelles elles s'exercent. Les amendes civiles prévues par les dispositions du paragraphe III de l'article L. 442-6 ont pour objectif, pour préserver l'ordre public économique, de sanctionner les pratiques restrictives de concurrence qui sont commises dans l'exercice des activités économiques mentionnées par le paragraphe I de cet article. L'absorption de la société auteur de ces pratiques par une autre société ne met pas fin à ces activités, qui se poursuivent au sein de la société absorbante.

En troisième lieu, seule une personne bénéficiaire de la transmission du patrimoine d'une société dissoute sans liquidation est susceptible d'encourir l'amende prévue par les dispositions contestées.

Les dispositions contestées permettent qu'une sanction pécuniaire non pénale soit prononcée à l'encontre de la personne morale à laquelle l'exploitation d'une entreprise a été transmise, pour des pratiques restrictives de concurrence commises par la personne qui exploitait l'entreprise au moment des faits. Il résulte des motifs énoncés ci-dessus que les dispositions contestées, telles qu'interprétées par une jurisprudence constante, ne méconnaissent pas, compte tenu de la mutabilité des formes juridiques sous lesquelles s'exercent les activités économiques concernées, le principe selon lequel nul n'est punissable que de son propre fait.

(2016-542 QPC, 18 mai 2016, cons. 4 à 10, JORF n° 0116 du 20 mai 2016, texte n° 92)

ÉGALITÉ

ÉGALITÉ DEVANT LA LOI

Respect du principe d'égalité : différence de traitement justifiée par une différence de situation

Droit fiscal

En vertu du 2 de l'article 200 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2013 et résultant de la loi du 29 décembre 2012, les plus-values sont prises en compte pour la détermination du revenu net global soumis au barème progressif de l'impôt sur le revenu. Le deuxième alinéa du 1 de l'article 150-0 D prévoit cependant que ces plus-values sont réduites d'un abattement pour durée de détention déterminé dans les conditions prévues, selon le cas, au 1 ter ou au 1 quater du même article.

Il résulte de la jurisprudence constante du Conseil d'État que, lorsqu'une plus-value mobilière fait l'objet d'un report d'imposition, notamment pour tenir compte du fait que le contribuable n'a pas disposé des liquidités provenant de l'opération effectuée, l'assiette de l'imposition est déterminée selon les règles applicables à la date de cette opération. En revanche, le montant de l'imposition est arrêté selon les règles applicables à la date de l'événement mettant fin au report d'imposition.

D'une part, en adoptant les dispositions contestées, le législateur a entendu assurer l'application de nouvelles règles d'assiette favorisant la détention des valeurs mobilières sur une longue durée : l'importance de l'abattement applicable pour la détermination de l'imposition due est proportionnelle à la durée de détention de ces valeurs mobilières. Ainsi, le législateur a retenu un critère objectif et rationnel en rapport avec l'objet de la loi.

D'autre part, ces nouvelles règles de détermination de l'assiette des plus-values mobilières sont applicables aux plus-values réalisées à compter de l'entrée en vigueur de ces règles, soit le 1er janvier 2013. Il en résulte que les plus-values mobilières placées en report d'imposition avant cette date sont exclues du bénéfice des abattements pour durée de détention prévus aux 1 ter et 1 quater de l'article 150-0 D. Cette différence de traitement, qui repose sur une différence de situation, est en rapport avec l'objet de loi. Le grief tiré de la méconnaissance du principe d'égalité devant la loi doit être écarté.

(2016-538 QPC, 22 avril 2016, cons. 2, 6 et 8 à 10, JORF n° 0097 du 24 avril 2016, texte n° 30)

En vertu des mots « de la taxe prévue à l'article 266 sexies et » figurant au premier alinéa de l'article 268 ter du code des douanes, la taxe générale sur les activités polluantes assise sur les lubrifiants, les lessives, les préparations assimilées et les matériaux d'extraction ne s'applique pas lorsque la première livraison, après fabrication nationale ou importation, consiste en un échange entre la France métropolitaine et un département d'outre-mer ou entre deux départements d'outre-mer, sauf s'il s'agit d'un échange entre la Guadeloupe et la Martinique. Dans ces hypothèses, conformément au a) du 4 et aux 5 et 6 du paragraphe I de l'article 266 sexies de ce code, est redevable de la taxe celui qui, ayant reçu ces produits, les livre ensuite en métropole ou dans un département d'outre-mer ou qui les y utilise. Dans les autres cas, est redevable de la taxe celui qui réalise la première livraison. Il en résulte une différence de traitement entre les personnes qui procèdent à une première livraison de ces produits selon l'origine et la destination de la livraison. Compte tenu, d'une part, de la distance entre le territoire d'importation ou de fabrication des produits et le territoire d'utilisation et, d'autre part, de la spécificité géographique des départements d'outre-mer, la différence de traitement repose sur une différence de situation.

En adoptant la disposition contestée, le législateur a entendu rendre équivalent le traitement fiscal des produits visés, en assurant l'assujettissement à la taxe des produits utilisés sur le territoire national, qu'ils aient été importés dans un département d'outre-mer depuis la métropole, un autre département d'outre-mer ou l'étranger ou qu'ils aient été importés en métropole depuis un département d'outre-mer ou l'étranger. La différence de traitement est en rapport avec l'objet de la loi. Il n'en résulte aucune forme de double imposition ou d'absence d'imposition des produits utilisés sur le territoire français. Le grief tiré de la méconnaissance du principe d'égalité devant la loi est écarté.

(2016-537 QPC, 22 avril 2016, cons. 8 et 9, JORF n° 0097 du 24 avril 2016, texte n° 29)

Police administrative

Les occupants des locaux d'un navire affectés à un usage privé ou d'habitation, sont, au regard des opérations de visite menées par les agents des douanes, dans une situation différente de celle des autres personnes qui n'occupent pas ces locaux, y compris lorsqu'il s'agit du propriétaire du navire. En réservant à ces occupants la possibilité de contester par voie d'action la régularité des opérations de visite, la différence de traitement qui résulte des dispositions contestées des articles 62 et 63 du code des douanes repose sur cette différence de situation et est en rapport avec l'objectif poursuivi par la création de cette voie de droit.

(2016-541 QPC, 18 mai 2016, cons. 13 et 14, JORF n° 0116 du 20 mai 2016, texte n° 91)

Droit de la santé

Il ressort des paragraphes I et II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique que le législateur a entendu fixer un régime de réparation des préjudices résultant des infections nosocomiales contractées tant chez les professionnels de santé exerçant en ville que dans les établissements, services ou organismes de santé à l'occasion d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins.

Les dispositions contestées prévoient l'engagement de la responsabilité des établissements, services et organismes dans lesquels sont réalisés de tels actes pour la réparation des dommages qui résultent d'infections nosocomiales, lorsque les patients ne remplissent pas les conditions définies à l'article L. 1142-1-1 du code de la santé publique pour en obtenir réparation, au titre de la solidarité nationale, par l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales. Seule la preuve d'une cause étrangère permet à ces établissements, services et organismes de ne pas voir leur responsabilité engagée. À l'inverse, pour la réparation de tels dommages, la responsabilité des professionnels de santé qui n'exercent pas dans un établissement ayant le caractère d'un établissement de santé n'est engagée qu'en cas de faute. Il en résulte une différence de traitement dans l'engagement de la responsabilité pour obtenir la réparation des dommages liés à une infection nosocomiale n'ouvrant pas droit à réparation au titre de la solidarité nationale, selon que cette infection a été contractée dans un établissement, service ou organisme de santé ou auprès d'un professionnel de santé exerçant en ville.

Les actes de prévention, de diagnostic ou de soins pratiqués dans un établissement, service ou organisme de santé se caractérisent par une prévalence des infections nosocomiales supérieure à celle constatée chez les professionnels de santé exerçant en ville, tant en raison des caractéristiques des patients accueillis et de la durée de leur séjour qu'en raison de la nature des actes pratiqués et de la spécificité des agents pathogènes de ces infections. Au surplus, les établissements, services et organismes de santé sont tenus, en vertu des articles L. 6111-2 et suivants du code de la santé publique, de mettre en œuvre une politique d'amélioration de la qualité et de la sécurité des soins et d'organiser la lutte contre les événements indésirables, les infections associées aux soins et l'iatrogénie. Ainsi, le législateur a entendu prendre en compte les conditions dans lesquelles les actes de prévention, de diagnostic ou de soins sont pratiqués dans les établissements, services et organismes de santé et la spécificité des risques en milieu hospitalier. La différence de traitement qui découle des conditions d'engagement de la responsabilité pour les dommages résultant d'infections nosocomiales repose sur une différence de situation. Elle est en rapport avec l'objet de la loi. Rejet du grief tiré de la méconnaissance de l'article 6 de la Déclaration de 1789.

(2016-531 QPC, 1er avril 2016, cons. 5 à 7, JORF n° 0081 du 6 avril 2016, texte n° 54)

Violation du principe d'égalité

Collectivités territoriales

Selon les trois premiers alinéas de l'article L. 3132-26 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi du 6 août 2015, le maire peut, après avis du conseil municipal et, dans certains cas, après avis conforme de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la commune est membre, autoriser les établissements de commerce de détail à supprimer, dans la limite de douze fois par an, le repos hebdomadaire dominical de leurs salariés. Le quatrième alinéa de l'article L. 3132-26 dans cette même rédaction prévoit qu'à Paris, la décision mentionnée est prise par le préfet de Paris.

En premier lieu, le fait que la ville de Paris soit soumise à un régime particulier en raison de sa qualité de siège des pouvoirs publics ne la place pas dans une situation différente des autres communes au regard de l'objet des dispositions contestées, qui désignent l'autorité compétente pour déterminer les règles de repos hebdomadaire dominical des salariés des établissements de commerce de détail. En second lieu, aucun motif d'intérêt général ne justifie que, s'agissant du pouvoir de déterminer les dimanches durant desquels les établissements de commerce de détail sont autorisés à supprimer le repos hebdomadaire dominical, la ville de Paris soit traitée différemment de toutes les autres communes.

Les dispositions contestées méconnaissent par conséquent le principe d'égalité devant la loi.

(2016-547 QPC, 24 juin 2016, cons. 1 à 3 et 6 à 8, JORF n° 0151 du 30 juin 2016, texte n° 112)

Droit pénal et procédure pénale

Le second alinéa de l'article 877 du code de procédure pénale exclut l'application à Mayotte de l'article 288 du même code, dont les troisième à cinquième alinéas répriment d'une amende de 3 750 euros le fait pour un juré de ne pas déférer à la convocation qu'il a reçue ou de se retirer avant l'expiration de ses fonctions.

L'exercice des fonctions d'assesseur-juré à la cour d'assises de Mayotte est identique à l'exercice des fonctions de juré d'une cour d'assises située dans une autre partie du territoire de la République. L'exclusion de l'incrimination prévue par l'article 288 du code de procédure pénale pour les assesseurs-jurés de la cour d'assises de Mayotte instaure une différence de traitement. Cette dernière n'est pas en rapport direct avec l'objet de la législation dérogatoire applicable à la cour d'assises de Mayotte. Par conséquent, et sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres griefs, la référence à l'article 288 du code de procédure pénale, au second alinéa de l'article 877 du même code, pour exclure son application à Mayotte, est contraire au principe d'égalité. Censure.

(2016-544 QPC, 3 juin 2016, cons. 15 à 17, JORF n° 0129 du 4 juin 2016, texte n° 65)

Droit social

En vertu de l'article L. 341-10 du code de la sécurité sociale, les arrérages d'une pension d'invalidité servie par le régime général de sécurité sociale sont entièrement supprimés lorsque la personne reprend une activité professionnelle non-salariée qui lui procure un revenu excédant un plafond fixé par décret. En revanche, l'article L. 341-12 du code de la sécurité sociale prévoit une suspension en tout ou partie de la pension d'invalidité en cas de reprise d'une activité salariée, en raison du salaire de l'intéressé, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'État. Il en résulte une différence de traitement entre les personnes titulaires d'une pension d'invalidité servie par le régime général de sécurité sociale selon la nature de l'activité professionnelle reprise. Ces personnes, qui sont dans les deux cas affiliées au régime général de sécurité sociale et titulaires d'une pension d'invalidité servie par ce régime, sont dans la même situation. En adoptant la disposition contestée, le législateur, poursuivant un objectif d'équilibre des comptes de la sécurité sociale, a entendu limiter le cumul d'une pension d'invalidité et de revenus du travail. Un tel objectif ne constitue pas une raison d'intérêt général de nature à justifier la différence de traitement entre les personnes titulaires d'une pension d'invalidité qui reprennent une activité professionnelle. Par suite, la disposition contestée, qui méconnaît le principe d'égalité devant la loi, doit être déclarée contraire à la Constitution.

(2016-534 QPC, 14 avril 2016, cons. 3 à 5, JORF n° 0090 du 16 avril 2016, texte n° 82)

Droit fiscal

Les mots « ayant chacun leur domicile fiscal en Nouvelle-Calédonie » figurant dans la première phrase du deuxième alinéa du paragraphe I de l'article Lp. 52 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie ont pour objet de déroger au principe de l'imposition commune des couples mariés lorsque l'un des époux est fiscalement domicilié hors de Nouvelle-Calédonie. Elles ont pour effet de priver chacun des conjoints de l'application du quotient conjugal pour ceux de leurs revenus taxables en Nouvelle-Calédonie.

Ces dispositions instituent de ce fait une différence de traitement entre les couples mariés selon que chacun des deux époux est ou non fiscalement domicilié en Nouvelle-Calédonie.

Le législateur de la Nouvelle-Calédonie a institué le principe de l'imposition commune afin de prendre en compte la mise en commun des ressources par les époux, qui traduit des obligations pesant sur eux en application du code civil de la Nouvelle-Calédonie. À lui seul, le fait que les époux ne résident pas dans le même lieu est sans incidence sur cette mise en commun, comme le confirme l'article 108 du code civil de la Nouvelle-Calédonie, qui dispose que « Le mari et la femme peuvent avoir un domicile distinct sans qu'il soit pour autant porté atteinte aux règles relatives à la communauté de la vie ». En dehors des cas de dissolution de la communauté de vie visés au paragraphe III de l'article Lp. 52, les couples mariés sont donc, au regard de l'application du principe de l'imposition commune, dans la même situation qu'ils aient ou non des domiciles distincts.

En excluant l'application du quotient conjugal aux revenus taxables en Nouvelle-Calédonie des couples mariés dont l'un des époux n'a pas son domicile fiscal en Nouvelle-Calédonie, le législateur de la Nouvelle-Calédonie a voulu neutraliser les effets favorables susceptibles de résulter de l'application du quotient conjugal aux seuls revenus imposables en Nouvelle-Calédonie. Toutefois, la différence de traitement instituée n'est pas justifiée par une différence de situation en rapport avec l'objectif poursuivi de neutralisation de l'effet du quotient conjugal qui est le corollaire, en l'état du droit, de l'imposition commune des époux. Ainsi, elle méconnaît le principe d'égalité devant la loi.

(2016-539 QPC, 10 mai 2016, cons. 6 à 9, JORF n° 0110 du 12 mai 2016, texte n° 38)

ÉGALITÉ DEVANT LA JUSTICE

Juridictions

Composition et compétence des juridictions

Règles particulières applicables à Mayotte

Par dérogation aux articles 259 à 267 du code de procédure pénale qui fixent les règles relatives à la formation du jury des cours d'assises, le second alinéa de l'article 885 du même code prévoit que, pour le jury de la cour d'assises de Mayotte, les assesseurs-jurés sont tirés au sort, pour chaque session, à partir d'une liste de personnes, proposées par le procureur de la République ou les maires, qui est arrêtée par le préfet et le président du tribunal de grande instance. Les personnes ainsi choisies doivent être de nationalité française, âgées de plus de vingt-trois ans, savoir lire et écrire en français, présenter des garanties de compétence et d'impartialité et jouir des droits politiques, civils et de famille.

Selon l'article 6 de la Déclaration de 1789, la loi est « la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse ». Son article 16 dispose : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution ». Si le législateur peut prévoir des règles de procédure différentes selon les faits, les situations et les personnes auxquelles elles s'appliquent, c'est à la condition que ces différences ne procèdent pas de distinctions injustifiées et que soient assurées aux justiciables des garanties égales, notamment quant au respect du principe des droits de la défense. Selon l'article 73 de la Constitution : « Dans les départements et les régions d'outre-mer, les lois et règlements sont applicables de plein droit. Ils peuvent faire l'objet d'adaptations tenant aux caractéristiques et contraintes particulières de ces collectivités ».

La population de Mayotte présente des caractéristiques et contraintes particulières, au sens de l'article 73 de la Constitution, de nature à permettre au législateur d'adapter les conditions dans lesquelles est formé le jury de la cour d'assises de Mayotte. En effet, une proportion importante de la population de Mayotte ne remplit pas les conditions d'âge, de nationalité et de connaissance de la langue et de l'écriture françaises exigées pour exercer les fonctions d'assesseur-juré. Pour leur part, les règles de droit commun prévoient que les jurés de cours d'assises sont tirés au sort à partir d'une liste établie, après tirage au sort, parmi l'ensemble des citoyens inscrits sur les listes électorales. Dès lors, en prévoyant un tirage au sort des assesseurs-jurés de la cour d'assises de Mayotte sur une liste restreinte de citoyens établie par certaines autorités, le législateur a instauré une différence de traitement qui tient compte de la situation particulière de Mayotte et qui ne méconnaît pas le principe d'égalité devant la justice.

(2016-544 QPC, 3 juin 2016, cons. 5 à 8, JORF n° 0129 du 4 juin 2016, texte n° 65)

Le second alinéa de l'article 877 du code de procédure pénale exclut l'application des articles 254 à 258-2, 289 à 303 et 305 du code de procédure pénale pour la composition de la cour d'assises de Mayotte. Ces articles sont relatifs aux incapacités et incompatibilités liées aux fonctions de juré, aux conditions de révision des listes de jurés et au droit de récuser des jurés. En particulier, l'article 256 prévoit que sont incapables d'être jurés les personnes dont le bulletin n° 1 du casier judiciaire mentionne une condamnation pour crime ou pour délit, celles en état d'accusation ou de contumace et celles placées sous mandat de dépôt ou d'arrêt, les fonctionnaires révoqués et les officiers ministériels destitués, les membres d'ordres professionnels frappés d'une interdiction définitive d'exercer et les majeurs protégés. L'article 257 prévoit que sont, en particulier, incompatibles avec les fonctions de juré l'exercice de fonctions juridictionnelles ou l'exercice de fonctions dans la police, l'administration pénitentiaire ou la gendarmerie. Le dernier alinéa de l'article 289 prévoit que sont rayés de la liste de session les noms des jurés qui se révéleraient être conjoints, parents ou alliés d'un membre de la cour ou de l'un des autres jurés. L'article 291 prévoit des règles similaires lorsque la parenté du juré est établie à l'égard de l'accusé ou de son avocat ou que la personne est témoin, interprète, dénonciateur, expert, plaignant ou partie civile ou a accompli un acte de police judiciaire ou d'instruction. Enfin, les articles 297 à 301 fixent les conditions dans lesquelles l'accusé ou son avocat et le ministère public peuvent exercer un droit de récusation des jurés lors de leur tirage au sort.

Par dérogation à ces règles de droit commun, les dispositions du second alinéa de l'article 885 du code de procédure pénale prévoient uniquement que les assesseurs-jurés de la cour d'assises de Mayotte doivent être tirés au sort sur une liste composée de personnes « présentant des garanties de compétence et d'impartialité et jouissant des droits politiques, civils et de famille ». Ni ces dispositions ni aucune autre disposition législative n'imposent d'autres conditions pour exercer les fonctions d'assesseur-juré. Elles ne prévoient ni dispositif de révision de la liste ni faculté pour l'accusé, son avocat et le ministère public de récuser un assesseur-juré tiré au sort.

L'exclusion de règles de droit commun crée une différence de traitement sans rapport direct avec l'objet de la législation dérogatoire applicable à la cour d'assises de Mayotte, qui vise à tenir compte du nombre restreint de personnes inscrites sur les listes électorales et disposant d'une maîtrise suffisante de la langue et de l'écriture françaises pour exercer les fonctions d'assesseur-juré. Par conséquent, et sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres griefs, la référence aux articles 254 à 258-2, 289 à 303 et 305 du code de procédure pénale, au second alinéa de l'article 877 du même code, pour exclure leur application à Mayotte, est contraire au principe d'égalité devant la justice. Censure.

(2016-544 QPC, 3 juin 2016, cons. 12 à 14, JORF n° 0129 du 4 juin 2016, texte n° 65)

Les articles 240, 243, 244, 248, 296 et 359 du code de procédure pénale sont relatifs à la composition de la cour d'assises de droit commun et fixent les règles de majorité en ce qui concerne les délibérations de la cour d'assises sur la culpabilité de l'accusé et sa peine. La cour d'assises est composée, en première instance, de trois magistrats professionnels et de six jurés et, en appel, de trois magistrats professionnels et de neuf jurés. Toute décision défavorable à l'accusé se forme à la majorité de six voix au moins lorsque la cour d'assises statue en premier ressort et à la majorité de huit voix au moins lorsqu'elle statue en appel. Par dérogation à ces règles, le premier alinéa de l'article 885 du code de procédure pénale fixe, en premier ressort, le nombre d'assesseurs-jurés composant la cour d'assises de Mayotte à quatre et, en appel, à six. L'article 888 du même code prévoit qu'une condamnation exige une majorité de cinq voix sur sept en premier ressort et de six voix sur neuf en appel.

Alors que pour conclure à la culpabilité de l'accusé, en première instance comme en appel, une majorité des deux tiers des membres de la cour d'assises est requise dans le droit commun, il résulte des dispositions contestées que, devant la cour d'assises de Mayotte siégeant en premier ressort, une majorité des cinq septièmes est exigée. La modification de ces conditions de majorité crée une différence de traitement sans rapport avec l'objet de la loi et privant les justiciables de garanties égales. Par conséquent, la condition de majorité applicable à la cour d'assises de Mayotte siégeant en premier ressort est contraire au principe d'égalité devant la justice. Censure.

(2016-544 QPC, 3 juin 2016, cons. 18, 19, 21 et 22, JORF n° 0129 du 4 juin 2016, texte n° 65)

Les articles 240, 243, 244, 248, 296 et 359 du code de procédure pénale sont relatifs à la composition de la cour d'assises de droit commun et fixent les règles de majorité en ce qui concerne les délibérations de la cour d'assises sur la culpabilité de l'accusé et sa peine. Par dérogation à ces règles, le premier alinéa de l'article 885 du code de procédure pénale fixe, en premier ressort, le nombre d'assesseurs-jurés composant la cour d'assises de Mayotte à quatre et, en appel, à six.

En abaissant le nombre de jurés composant la cour d'assises de Mayotte tant en premier ressort qu'en appel, le législateur a institué une différence de traitement qui tient compte des caractéristiques et contraintes particulières propres au département de Mayotte et qui est en rapport avec l'objet de la loi.

(2016-544 QPC, 3 juin 2016, cons. 18 à 20, JORF n° 0129 du 4 juin 2016, texte n° 65)

ÉGALITÉ DEVANT LES CHARGES PUBLIQUES

Champ d'application du principe

Objet de la législation

Soumission à des sujétions

En permettant d'instituer la servitude prévue par le second alinéa du paragraphe I de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme, le législateur a voulu éviter que l'autorisation de réaliser des travaux sur des chalets d'alpage ou des bâtiments d'estive ait pour conséquence de faire peser de nouvelles obligations de desserte de ces bâtiments par les voies et réseaux. Le champ d'application des dispositions contestées est circonscrit aux seuls chalets d'alpage et bâtiments d'estive conçus à usage saisonnier et qui, soit ne sont pas desservis par des voies et réseaux, soit sont desservis par des voies et réseaux non utilisables en période hivernale. La servitude qu'elles prévoient ne peut être instituée qu'à l'occasion de la réalisation de travaux exigeant un permis de construire ou une déclaration de travaux. Elle s'applique uniquement pendant la période hivernale et ne peut excéder ce qui est nécessaire compte tenu de l'absence de voie ou de réseau. Le seul fait de permettre dans ces conditions l'institution d'une servitude ne crée aucune rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques.

(2016-540 QPC, 10 mai 2016, cons. 7 à 9 et 11, JORF n° 0110 du 12 mai 2016, texte n° 39)

Égalité en matière d'impositions de toutes natures

Imposition des plus-values mobilières

En vertu du 2 de l'article 200 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2013 et résultant de la loi du 29 décembre 2012, les plus-values sont prises en compte pour la détermination du revenu net global soumis au barème progressif de l'impôt sur le revenu. Le deuxième alinéa du 1 de l'article 150-0 D prévoit cependant que ces plus-values sont réduites d'un abattement pour durée de détention déterminé dans les conditions prévues, selon le cas, au 1 ter ou au 1 quater du même article.

Il résulte de la jurisprudence constante du Conseil d'État que, lorsqu'une plus-value mobilière fait l'objet d'un report d'imposition, notamment pour tenir compte du fait que le contribuable n'a pas disposé des liquidités provenant de l'opération effectuée, l'assiette de l'imposition est déterminée selon les règles applicables à la date de cette opération. En revanche, le montant de l'imposition est arrêté selon les règles applicables à la date de l'événement mettant fin au report d'imposition.

Il résulte de l'assujettissement des plus-values mobilières à l'impôt sur le revenu prévu par l'article 200 A du code général des impôts, à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus prévue par l'article 223 sexies du même code ainsi qu'aux prélèvements sociaux prévus par l'article 16 de l'ordonnance du 24 janvier 1996, par l'article L. 14-10-4 du code de l'action sociale et des familles, par l'article 1600-0 F bis du code général des impôts et par les articles L. 136-7 et L. 245-15 du code de la sécurité sociale qu'un taux marginal maximal d'imposition de 62,001 % s'applique à la plus-value réalisée avant le 1er janvier 2013 qui a été placée en report d'imposition et dont le report expire postérieurement à cette date. Les valeurs mobilières qui ont donné lieu à la réalisation de cette plus-value, fait générateur de l'imposition, ont pu être détenues sur une longue durée avant cette réalisation. Faute de tout mécanisme prenant en compte cette durée pour atténuer le montant assujetti à l'impôt sur le revenu, l'application du taux marginal maximal à cette plus-value méconnaîtrait les capacités contributives des contribuables.

Par suite, les dispositions contestées ne sauraient, sans méconnaître l'égalité devant les charges publiques, priver les plus-values placées en report d'imposition avant le 1er janvier 2013 qui ne font l'objet d'aucun abattement sur leur montant brut et dont le montant de l'imposition est arrêté selon des règles de taux telles que celles en vigueur à compter du 1er janvier 2013, de l'application à l'assiette ainsi déterminée d'un coefficient d'érosion monétaire pour la période comprise entre l'acquisition des titres et le fait générateur de l'imposition. Sous cette réserve, le grief tiré de la méconnaissance du principe d'égalité devant les charges publiques doit être écarté.

(2016-538 QPC, 22 avril 2016, cons. 2, 6 et 11, JORF n° 0097 du 24 avril 2016, texte n° 30)

Taxe générale sur les activités polluantes

En vertu des mots « de la taxe prévue à l'article 266 sexies et » figurant au premier alinéa de l'article 268 ter du code des douanes, la taxe générale sur les activités polluantes assise sur les lubrifiants, les lessives, les préparations assimilées et les matériaux d'extraction ne s'applique pas lorsque la première livraison, après fabrication nationale ou importation, consiste en un échange entre la France métropolitaine et un département d'outre-mer ou entre deux départements d'outre-mer, sauf s'il s'agit d'un échange entre la Guadeloupe et la Martinique. Dans ces hypothèses, conformément au a) du 4 et aux 5 et 6 du paragraphe I de l'article 266 sexies, est redevable de la taxe celui qui, ayant reçu ces produits, les livre ensuite en métropole ou dans un département d'outre-mer ou qui les y utilise. Dans les autres cas, est redevable de la taxe celui qui réalise la première livraison. Il en résulte une différence de traitement entre les personnes qui procèdent à une première livraison de ces produits selon l'origine et la destination de la livraison. Compte tenu, d'une part, de la distance entre le territoire d'importation ou de fabrication des produits et le territoire d'utilisation et, d'autre part, de la spécificité géographique des départements d'outre-mer, la différence de traitement repose sur une différence de situation.

En adoptant la disposition contestée, le législateur a entendu rendre équivalent le traitement fiscal des produits visés, en assurant l'assujettissement à la taxe des produits utilisés sur le territoire national, qu'ils aient été importés dans un département d'outre-mer depuis la métropole, un autre département d'outre-mer ou l'étranger ou qu'ils aient été importés en métropole depuis un département d'outre-mer ou l'étranger. La différence de traitement est en rapport avec l'objet de la loi. Il n'en résulte aucune forme de double imposition ou d'absence d'imposition des produits utilisés sur le territoire français. Par suite, le grief tiré de la méconnaissance du principe d'égalité devant les charges publiques est écarté.

(2016-537 QPC, 22 avril 2016, cons. 8 et 9, JORF n° 0097 du 24 avril 2016, texte n° 29)

Contrôle du principe -- Exercice du contrôle

Proportionnalité des dispositions législatives

Proportionnalité par rapport aux facultés contributives (impôt confiscatoire)

En vertu du 2 de l'article 200 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2013 et résultant de la loi du 29 décembre 2012, les plus-values sont prises en compte pour la détermination du revenu net global soumis au barème progressif de l'impôt sur le revenu. Le deuxième alinéa du 1 de l'article 150-0 D prévoit cependant que ces plus-values sont réduites d'un abattement pour durée de détention déterminé dans les conditions prévues, selon le cas, au 1 ter ou au 1 quater du même article.

Il résulte de la jurisprudence constante du Conseil d'État que, lorsqu'une plus-value mobilière fait l'objet d'un report d'imposition, notamment pour tenir compte du fait que le contribuable n'a pas disposé des liquidités provenant de l'opération effectuée, l'assiette de l'imposition est déterminée selon les règles applicables à la date de cette opération. En revanche, le montant de l'imposition est arrêté selon les règles applicables à la date de l'événement mettant fin au report d'imposition.

Il résulte de l'assujettissement des plus-values mobilières à l'impôt sur le revenu prévu par l'article 200 A du code général des impôts, à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus prévue par l'article 223 sexies du même code ainsi qu'aux prélèvements sociaux prévus par l'article 16 de l'ordonnance du 24 janvier 1996, par l'article L. 14-10-4 du code de l'action sociale et des familles, par l'article 1600-0 F bis du code général des impôts et par les articles L. 136-7 et L. 245-15 du code de la sécurité sociale qu'un taux marginal maximal d'imposition de 62,001 % s'applique à la plus-value réalisée avant le 1er janvier 2013 qui a été placée en report d'imposition et dont le report expire postérieurement à cette date. Les valeurs mobilières qui ont donné lieu à la réalisation de cette plus-value, fait générateur de l'imposition, ont pu être détenues sur une longue durée avant cette réalisation. Faute de tout mécanisme prenant en compte cette durée pour atténuer le montant assujetti à l'impôt sur le revenu, l'application du taux marginal maximal à cette plus-value méconnaîtrait les capacités contributives des contribuables.

Par suite, les dispositions contestées ne sauraient, sans méconnaître l'égalité devant les charges publiques, priver les plus-values placées en report d'imposition avant le 1er janvier 2013 qui ne font l'objet d'aucun abattement sur leur montant brut et dont le montant de l'imposition est arrêté selon des règles de taux telles que celles en vigueur à compter du 1er janvier 2013, de l'application à l'assiette ainsi déterminée d'un coefficient d'érosion monétaire pour la période comprise entre l'acquisition des titres et le fait générateur de l'imposition. Sous cette réserve, le grief tiré de la méconnaissance du principe d'égalité devant les charges publiques doit être écarté.

(2016-538 QPC, 22 avril 2016, cons. 2, 6 et 11, JORF n° 0097 du 24 avril 2016, texte n° 30)

ÉLECTIONS

PRINCIPES DU DROIT ÉLECTORAL

Droits et libertés du candidat

Égalité

Égalité des moyens de propagande (voir également ci-dessous : Droits et libertés des partis et organisations politiques)

L'article 4 de la loi organique de modernisation des règles applicables à l'élection présidentielle insère, dans l'article 3 de la loi du 6 novembre 1962, un nouveau paragraphe I bis fixant les règles applicables au traitement audiovisuel de la campagne pour l'élection du Président de la République, lequel comprend, d'une part, la reproduction et les commentaires des déclarations et écrits des candidats et, d'autre part, la présentation de leur personne.

Les premier à quatrième alinéas de ce paragraphe I bis déterminent les règles applicables pendant la période allant de la publication de la liste des candidats jusqu'à la veille du début de la campagne « officielle », comme l'avait recommandé le Conseil constitutionnel dans ses observations. Le premier alinéa prévoit que les éditeurs de services de communication audiovisuelle respectent, sous le contrôle du conseil supérieur de l'audiovisuel, le principe d'équité en ce qui concerne la reproduction et les commentaires des déclarations et écrits des candidats et la présentation de leur personne. Les deuxième à quatrième alinéas confient au conseil supérieur de l'audiovisuel le soin de veiller au respect de ce principe par les éditeurs de services de communication audiovisuelle en fonction, d'une part, du critère de « la représentativité des candidats » et, d'autre part, du critère de « la contribution de chaque candidat à l'animation du débat électoral ». Le troisième alinéa précise que le critère de la représentativité des candidats s'apprécie « en particulier, en fonction des résultats obtenus aux plus récentes élections par les candidats ou par les partis et groupements politiques qui les soutiennent et en fonction des indications de sondages d'opinion ». Le cinquième alinéa de ce paragraphe I bis détermine les règles applicables pendant la période allant du début de la campagne « officielle » jusqu'au tour de scrutin où l'élection est acquise. Il prévoit que les éditeurs de services de communication audiovisuelle respectent, sous le contrôle du conseil supérieur de l'audiovisuel, le principe d'égalité. Le sixième alinéa de ce paragraphe I bis prévoit que le respect des principes d'équité et d'égalité est assuré « dans des conditions de programmation comparables ». Le conseil supérieur de l'audiovisuel est chargé, en précisant ces conditions, de veiller au respect de ces principes. Le dernier alinéa de ce paragraphe I bis prévoit que, pendant la période allant de la publication de la liste des candidats jusqu'au tour de scrutin où l'élection est acquise, le conseil supérieur de l'audiovisuel publie, au moins une fois par semaine, le relevé des temps consacrés, d'une part, à la reproduction et au commentaire des déclarations et écrits des candidats et, d'autre part, à la présentation de leur personne.

D'une part, les dispositions de l'article 4 de la loi organique prévoient une égalité de traitement audiovisuel des candidats à l'élection du Président de la République à compter du début de la campagne « officielle ». D'autre part, en prévoyant l'application d'un principe d'équité pendant la période allant de la publication de la liste des candidats jusqu'à la veille du début de la campagne « officielle », ces dispositions permettent que soient traités différemment des candidats qui sont à ce titre dans la même situation. Cette différence de traitement, justifiée par le motif d'intérêt général de clarté du débat électoral, est en rapport direct avec l'objet de la loi, qui est de prendre en compte l'importance relative des candidats dans le débat public. Il résulte de ce qui précède que l'article 4 ne méconnaît pas le principe d'égalité devant le suffrage qui découle de l'article 3 de la Constitution et de l'article 6 de la Déclaration de 1789.

(2016-729 DC, 21 avril 2016, cons. 8, 9 et 14, JORF n° 0098 du 26 avril 2016, texte n° 4)

ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE

Candidatures

Présentation des candidats

Catégories de citoyens habilités à présenter un candidat

L'article 1er de la loi organique de modernisation des règles applicables à l'élection présidentielle modifie le paragraphe I de l'article 3 de la loi du 6 novembre 1962 pour ajouter aux catégories de citoyens habilités à présenter des candidats à l'élection du Président de la République les membres du conseil de la métropole de Lyon, les maires délégués des communes déléguées, les maires des arrondissements de Paris ainsi que les présidents des organes délibérants des métropoles. Il procède également à des modifications pour prendre en compte l'évolution des dispositions législatives relatives à certains des mandats visés. Il précise enfin que, pour l'appréciation de la répartition entre départements et collectivités d'outre-mer des citoyens ayant présenté un candidat, les conseillers métropolitains de Lyon sont réputés être les élus du département du Rhône. Le législateur organique a étendu le droit de présentation des candidats à l'élection du Président de la République dans des conditions qui ne méconnaissent pas le principe d'égalité.

(2016-729 DC, 21 avril 2016, cons. 3, JORF n° 0098 du 26 avril 2016, texte n° 4)

Conditions de présentation des candidatures

Le paragraphe I de l'article 2 de la loi organique de modernisation des règles applicables à l'élection présidentielle, qui insère cinq nouveaux alinéas dans le paragraphe I de l'article 3 de la loi du 6 novembre 1962, fixe des règles nouvelles relatives aux conditions de présentation des candidats par les catégories de citoyens habilités. La présentation d'un candidat, rédigée sur un formulaire et revêtue de la signature de son auteur, doit être adressée au Conseil constitutionnel par voie postale, dans une enveloppe prévue à cet effet, ou par voie électronique. Les formulaires et enveloppes sont imprimés par les soins de l'administration conformément aux modèles arrêtés par le Conseil constitutionnel. Les modalités de transmission par voie électronique sont renvoyées à un décret en Conseil d'État. Des modalités dérogatoires de dépôt des présentations par leurs auteurs sont prévues, d'une part, dans les départements et collectivités d'outre-mer ainsi qu'en Nouvelle-Calédonie et, d'autre part, pour les conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger. Le paragraphe III de l'article 2 prévoit une entrée en vigueur des dispositions relatives à la transmission par voie électronique à une date fixée par décret et au plus tard le 1er janvier 2020.

Les dispositions de l'article 2 imposent, pour les citoyens habilités à présenter des candidats à l'élection du Président de la République qui ne sont pas des élus d'un département d'outre-mer, d'une collectivité d'outre-mer, de la Nouvelle-Calédonie ou des conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger, une présentation uniquement par voie postale, tant que les dispositions relatives à l'envoi par voie électronique ne sont pas entrées en vigueur. Les personnes habilitées à présenter un candidat peuvent recourir à tout opérateur postal agréé en vertu de la réglementation en vigueur afin de faire parvenir leur présentation au Conseil constitutionnel. Il incombera à ces personnes de tenir compte du délai d'acheminement normal du courrier et de remettre en temps utile leur présentation à un opérateur postal afin que celle-ci parvienne au Conseil constitutionnel avant l'expiration du délai fixé par le deuxième alinéa du paragraphe I de l'article 3 de la loi du 6 novembre 1962 et qu'elle puisse être valablement prise en compte.

Toutefois, les dispositions de l'article 2 ne sauraient avoir pour objet ou pour effet, sans méconnaître le principe d'égalité entre candidats, de faire obstacle à ce que, saisi par des personnes habilitées à présenter des candidats à l'élection du Président de la République, le Conseil constitutionnel puisse prendre en considération des circonstances de force majeure ayant gravement affecté l'expédition et l'acheminement des présentations dans les jours précédant l'expiration du délai de présentation des candidats à l'élection du Président de la République. Sous cette réserve, les dispositions de l'article 2 de la loi organique ne sont pas contraires à la Constitution.

(2016-729 DC, 21 avril 2016, cons. 4 à 6, JORF n° 0098 du 26 avril 2016, texte n° 4)

Financement

Dispositions applicables au financement de l'élection présidentielle

L'article 7 de la loi organique de modernisation des règles applicables à l'élection présidentielle impose la présentation d'une annexe au compte de campagne de tout candidat à l'élection du Président de la République détaillant les dépenses exposées par chacun des partis et groupements politiques qui lui apportent leur soutien ainsi que les avantages directs ou indirects, prestations de services et dons en nature qu'ils lui fournissent. Il prévoit également la publication de cette annexe avec le compte de campagne. Il confère enfin à la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques le pouvoir de demander communication des pièces comptables et des justificatifs nécessaires pour apprécier l'exactitude de cette nouvelle annexe. Ces dispositions ne méconnaissent pas le principe de la liberté d'activité des partis politiques, garanti par l'article 4 de la Constitution.

(2016-729 DC, 21 avril 2016, cons. 18, JORF n° 0098 du 26 avril 2016, texte n° 4)

ÉLECTIONS LÉGISLATIVES

Campagne électorale -- Moyens de propagande

Affiches

Emplacement des affiches

M. ROUSSEAUX, candidat au premier tour de scrutin qui s'est déroulé dans la dixième circonscription du Nord, dénonce le fait que le candidat élu aurait bénéficié d'un affichage illégal, en dehors des emplacements réservés, sur la façade d'une salle dans laquelle se tenait une réunion publique de ce candidat le soir du 9 mars 2016. Il dénonce également le retrait d'une affiche en faveur de sa propre candidature sur un panneau électoral qui lui était dédié. Les irrégularités dénoncées, à les supposer établies, n'ont pu altérer la sincérité du scrutin, dès lors qu'elles n'ont pas revêtu un caractère massif, prolongé ou répété.

(2016-4953 AN, 14 avril 2016, cons. 2 et 3, JORF n° 0090 du 16 avril 2016, texte n° 80)

M. ROUSSEAUX, candidat au premier tour de scrutin qui s'est déroulé dans la cinquième circonscription des Alpes-Maritimes, soutient que la candidate élue a bénéficié d'un affichage illégal, en dehors des emplacements réservés, sur des véhicules automobiles, sur les vitrines d'un commerce et de la permanence électorale du député sortant. Il ajoute que deux affiches en faveur de la candidate ont été irrégulièrement apposées sur les emplacements réservés à la propagande électorale en faveur de sa candidature dans la commune de Levens. Les irrégularités relatives à l'affichage électoral dénoncées par le requérant, à les supposer établies, n'ont pas revêtu un caractère massif, prolongé ou répété et n'ont pu dès lors altérer la sincérité du scrutin.

(2016-4956 AN, 23 juin 2016, cons. 2 et 3, JORF n° 0148 du 26 juin 2016, texte n° 56)

Irrégularités diverses de propagande

Mme Karine DANIEL, candidate élue, a fait figurer de manière abusive la mention « députée » sur sa propagande électorale. Toutefois, cette propagande mentionnait sans ambiguïté qu'elle briguait le siège de député devenu vacant à la suite de la nomination de M. Jean-Marc AYRAULT, comme membre du Gouvernement. Dès lors, cette utilisation de la mention « députée », pour regrettable qu'elle soit, ne pouvait, en l'espèce, être source de confusion pour les électeurs de la circonscription quant à la qualité de Mme DANIEL. En outre, compte tenu de l'écart de voix, cette irrégularité ne peut être regardée comme ayant pu altérer la sincérité du scrutin.

(2016-4954 AN, 24 mai 2016, cons. 2 et 3, JORF n° 0124 du 29 mai 2016, texte n° 41)

Contentieux -- Recevabilité

Dépôt de la requête

Délais

Requête prématurée

La requête de M. KORNMANN, candidat au premier tour de scrutin qui s'est déroulé dans la première circonscription du Bas-Rhin, a été enregistrée le 27 mai 2016, après le premier tour de scrutin qui s'est déroulé le 22 mai 2016. Aucun candidat n'ayant été proclamé élu à la suite de ce premier tour, cette requête est prématurée et, par suite, irrecevable.

(2016-4955 AN, 23 juin 2016, cons. 2, JORF n° 0148 du 26 juin 2016, texte n° 55)

Contentieux -- Griefs

Griefs insuffisamment précisés

M. ROUSSEAUX, candidat au premier tour de scrutin qui s'est déroulé dans la cinquième circonscription des Alpes-Maritimes, soutient qu'une personne morale a participé au financement de la campagne de la candidate élue. Les allégations relatives au financement de la campagne électorale de la candidate élue ne sont pas assorties des précisions et justifications permettant au juge de l'élection d'en apprécier la portée.

(2016-4956 AN, 23 juin 2016, cons. 2 et 4, JORF n° 0148 du 26 juin 2016, texte n° 56)

PARLEMENT

(Voir aussi : DROIT INTERNATIONAL ET DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE)

FONCTION LÉGISLATIVE

Initiative

Propositions de loi

Conditions de dépôt

La loi organique déférée a pour objet de modifier la loi organique du 19 mars 1999 prise en application de l'article 77 de la Constitution à la suite de l'approbation par les populations consultées de l'accord signé à Nouméa le 5 mai 1998. Le Conseil constitutionnel s'assure que la proposition de loi organique à l'origine de la loi déférée a, dans les conditions prévues à l'article 90 de la loi organique du 19 mars 1999, fait l'objet d'une consultation du congrès de la Nouvelle-Calédonie avant que le Sénat, première assemblée saisie, délibère en première lecture sur cette proposition.

(2016-731 DC, 21 avril 2016, cons. 2, JORF n° 0098 du 26 avril 2016, texte n° 5)

Droit d'amendement

Recevabilité

Recevabilité en première lecture

Existence d'un lien indirect avec le texte en discussion

La loi déférée a pour objet de modifier des règles applicables aux élections. L'article 2 de la loi déférée, introduit par voie d'amendement en première lecture à l'Assemblée nationale, avait initialement pour objet de réduire de un an à six mois la période durant laquelle sont comptabilisées les recettes et les dépenses électorales ayant vocation à figurer dans les comptes de campagne. Il a ensuite été amendé afin de restreindre la portée de cette modification aux élections autres que l'élection présidentielle. Eu égard à leur objet, les dispositions de l'article 2 présentaient un lien avec les dispositions de la proposition de loi initiale. L'article 6 de la loi déférée, introduit par voie d'amendement en première lecture à l'Assemblée nationale, avait initialement pour objet de prévoir une obligation de diffusion sans délai par les médias audiovisuels publics des mises au point de la commission des sondages dans la semaine précédant le vote. Il a ensuite été amendé en première lecture au Sénat afin de modifier les règles relatives à la diffusion et à la publication des sondages électoraux, celles relatives au pouvoir de contrôle de la commission des sondages et celles relatives aux sanctions pénales applicables. Ces modifications, introduites par voie d'amendement en première lecture, présentaient un lien avec les dispositions de la proposition de loi initiale. Les articles 2 et 6 de la loi déférée ont été adoptés selon une procédure conforme à la Constitution.

(2016-730 DC, 21 avril 2016, cons. 1 à 3, JORF n° 0098 du 26 avril 2016, texte n° 6)

CONSEIL CONSTITUTIONNEL ET CONTENTIEUX DES NORMES

RECEVABILITÉ DES SAISINES (ARTICLE 61 DE LA CONSTITUTION)

Effets de la saisine

Examen de dispositions non contestées de la loi déférée

Le Premier ministre n'invoque aucun grief particulier à l'encontre de la loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel. Le Conseil constitutionnel s'assure que la loi déférée a été adoptée selon une procédure conforme à la Constitution. Il contrôle en particulier la régularité de la procédure ayant conduit à l'introduction de dispositions par voie d'amendement, qui avait été contestée lors des travaux parlementaires. Il relève qu'aucun autre motif particulier d'inconstitutionnalité ne ressort des travaux parlementaires. Il considère qu'il n'y a pas lieu d'examiner spécialement des dispositions de la loi déférée d'office.

(2016-730 DC, 21 avril 2016, cons. 1 à 4, JORF n° 0098 du 26 avril 2016, texte n° 6)

QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITÉ

Critères de transmission ou de renvoi de la question au Conseil constitutionnel

Notion de disposition législative et interprétation

Caractère législatif des dispositions

Saisi de l'article 34 du décret n° 57-245 du 24 février 1957 sur la réparation et la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles dans les territoires d'outre-mer, le Conseil constitutionnel prend en considération le fait que ce décret a été approuvé par l'Assemblée nationale le 12 avril 1957 et par le Conseil de la République le 25 juin 1957 pour admettre le caractère législatif des dispositions qui lui sont renvoyées.

(2016-533 QPC, 14 avril 2016, cons. 1, visas, JORF n° 0090 du 16 avril 2016, texte n° 81)

Le Conseil constitutionnel contrôle les dispositions de l'article L. 341-10 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction résultant du décret n° 85-1353 du 17 décembre 1985, jugeant ainsi implicitement que l'article 1er de la loi n° 87-598 du 30 juillet 1987 portant diverses mesures d'ordre social a conféré valeur législative aux dispositions de ce décret.

(2016-534 QPC, 14 avril 2016, cons. 1, visas, JORF n° 0090 du 16 avril 2016, texte n° 82)

Procédure applicable devant le Conseil constitutionnel

Grief manquant en fait

Les dispositions du second alinéa du paragraphe I de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme permettent à l'autorité administrative de subordonner la délivrance d'un permis de construire ou l'absence d'opposition à une déclaration de travaux à l'institution d'une servitude interdisant ou limitant l'usage, en période hivernale, des chalets d'alpage ou des bâtiments d'estive non desservis par des voies et réseaux. Les dispositions contestées, qui se bornent à apporter des restrictions à l'usage d'un chalet d'alpage ou d'un bâtiment d'estive, ne portent aucune atteinte à la liberté d'aller et de venir.

(2016-540 QPC, 10 mai 2016, cons. 5 et 11, JORF n° 0110 du 12 mai 2016, texte n° 39)

Les articles 62 et 63 du code des douanes ne confèrent pas aux agents des douanes un droit de saisie du navire ou des biens se trouvant dans les locaux visités, qui relève d'autres dispositions du code des douanes. En réservant à l'occupant des locaux visités le droit au recours qu'elles instituent, les dispositions des articles 62 et 63 du code des douanes contestées ne portent aucune atteinte au droit de propriété. Dès lors, le grief concernant l'atteinte à ce droit doit être rejeté.

(2016-541 QPC, 18 mai 2016, cons. 11 et 12, JORF n° 0116 du 20 mai 2016, texte n° 91)

Détermination de la disposition soumise au Conseil constitutionnel

Délimitation plus étroite de la disposition législative soumise au Conseil constitutionnel

Saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l'application combinées des dispositions des articles 836 du code de procédure pénale et L. 532-8 du code de l'organisation judiciaire, le Conseil constitutionnel a jugé que la question portait uniquement sur le second alinéa de l'article 836 du code de procédure pénale.

(2016-532 QPC, 1er avril 2016, cons. 4, JORF n° 0081 du 6 avril 2016, texte n° 55)

Saisi des deux premiers alinéas de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, le Conseil constitutionnel considère que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur le deuxième alinéa de cet article.

(2016-531 QPC, 1er avril 2016, cons. 1 à 3, JORF n° 0081 du 6 avril 2016, texte n° 54)

Saisi de l'article 34 du décret n° 57-245 du 24 février 1957, le Conseil constitutionnel considère que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur le premier alinéa de cet article.

(2016-533 QPC, 14 avril 2016, cons. 1 et 3, JORF n° 0090 du 16 avril 2016, texte n° 81)

Saisi des 1 ter et 1 quater de l'article 150-0 D du code général des impôts, le Conseil constitutionnel considère que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur les trois premiers alinéas du 1 ter et sur le A du 1 quater de l'article 150-0 D du code général des impôts.

(2016-538 QPC, 22 avril 2016, cons. 3 à 5 et 7, JORF n° 0097 du 24 avril 2016, texte n° 30)

Saisi des dispositions du 4 du paragraphe II de l'article 266 sexies et de l'article 268 ter du code des douanes, le Conseil constitutionnel considère que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur les mots « de la taxe prévue à l'article 266 sexies et » figurant au premier alinéa de l'article 268 ter du code des douanes.

(2016-537 QPC, 22 avril 2016, cons. 5, JORF n° 0097 du 24 avril 2016, texte n° 29)

Le Conseil constitutionnel a restreint le champ de la question prioritaire de constitutionnalité aux mots « ayant chacun leur domicile fiscal en Nouvelle-Calédonie » figurant dans la première phrase du deuxième alinéa du paragraphe I de l'article Lp. 52 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie.

(2016-539 QPC, 10 mai 2016, cons. 4, JORF n° 0110 du 12 mai 2016, texte n° 38)

Saisi du paragraphe III de l'article L. 442-6 du code de commerce, le Conseil constitutionnel considère que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur la troisième phrase du deuxième alinéa de ce paragraphe.

(2016-542 QPC, 18 mai 2016, cons. 1 à 3, JORF n° 0116 du 20 mai 2016, texte n° 92)

Saisi des articles 62 et 63 du code des douanes, le Conseil constitutionnel considère que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur le premier alinéa du paragraphe V de l'article 62 et sur le premier alinéa du paragraphe V de l'article 63 du code des douanes.

(2016-541 QPC, 18 mai 2016, cons. 1 à 4, JORF n° 0116 du 20 mai 2016 texte n° 91)

Saisi des articles 35 et 39 de la loi du 24 novembre 2009 ainsi que des articles 145-4 et 715 du code de procédure pénale, le Conseil constitutionnel relève qu'au sein des dispositions contestées, seuls les troisième et quatrième alinéas de l'article 145-4 du code de procédure pénale fixent des règles de procédure applicables à la délivrance des permis de visite au profit des personnes placées en détention provisoire. De même, seuls les mots : « et, en ce qui concerne les prévenus, aux nécessités de l'information » figurant au deuxième alinéa de l'article 39 de la loi du 24 novembre 2009 sont relatifs aux règles de procédure applicables à la délivrance des autorisations de téléphoner au profit des personnes placées en détention provisoire. Enfin, aucune des dispositions contestées ne vise les translations judiciaires. La question prioritaire de constitutionnalité porte donc sur les troisième et quatrième alinéas de l'article 145-4 du code de procédure pénale et sur les mots « et, en ce qui concerne les prévenus, aux nécessités de l'information » figurant au deuxième alinéa de l'article 39 de la loi du 24 novembre 2009.

(2016-543 QPC, 24 mai 2016, cons. 1 à 6, JORF n° 0124 du 29 mai 2016, texte n° 42)

Est contestée la constitutionnalité des articles 1729 et 1741 du code général des impôts en cas d'insuffisance volontaire de déclaration. Compte tenu du champ d'application respectif de ces deux articles, la question prioritaire de constitutionnalité porte, d'une part, sur l'article 1729 du code général des impôts et, d'autre part, sur les mots « soit qu'il ait volontairement dissimulé une part des sommes sujettes à l'impôt » figurant dans la première phrase du premier alinéa de l'article 1741 du même code.

(2016-545 QPC, 24 juin 2016, cons. 5, JORF n° 0151 du 30 juin 2016, texte n° 110)

Est contestée la constitutionnalité des articles 1729 et 1741 du code général des impôts en cas d'insuffisance volontaire de déclaration. Compte tenu du champ d'application respectif de ces deux articles, la question prioritaire de constitutionnalité porte, d'une part, sur l'article 1729 du code général des impôts et, d'autre part, sur les mots « soit qu'il ait volontairement dissimulé une part des sommes sujettes à l'impôt » figurant dans la première phrase du premier alinéa de l'article 1741 du même code.

(2016-546 QPC, 24 juin 2016, cons. 5, JORF n° 0151 du 30 juin 2016, texte n° 111)

Détermination de la version de la disposition législative soumise au Conseil constitutionnel

La question prioritaire de constitutionnalité doit être regardée comme portant sur les dispositions applicables au litige à l'occasion duquel elle a été posée. Les requérants ont formé un recours pour excès de pouvoir à l'encontre du paragraphe n° 370 de l'instruction BOI-RPPM-PVBMI-30-10-30-10 publiée au bulletin officiel des finances publiques du 2 juillet 2015 relatif à l'application de l'article 150-0 D du code général des impôts. Ainsi, le Conseil constitutionnel est saisi des dispositions des 1 ter et 1 quater de l'article 150-0 D du code général des impôts dans leur rédaction résultant de la loi du 29 décembre 2014.

(2016-538 QPC, 22 avril 2016, cons. 1, JORF n° 0097 du 24 avril 2016, texte n° 30)

La question prioritaire de constitutionnalité doit être regardée comme portant sur les dispositions applicables au litige à l'occasion duquel elle a été posée. En l'espèce, la question a été soulevée à l'occasion de la contestation de cotisations supplémentaires de taxe générale sur les activités polluantes mises en recouvrement au titre des années 2008 à 2011. Ainsi, le Conseil constitutionnel est saisi des dispositions du 4 du paragraphe II de l'article 266 sexies du code des douanes dans sa rédaction résultant de la loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 et des dispositions de l'article 268 ter de ce code dans sa rédaction résultant de la loi n° 2000-1353 du 30 décembre 2000.

(2016-537 QPC, 22 avril 2016, cons. 1, JORF n° 0097 du 24 avril 2016, texte n° 29)

Pour déterminer quelle version des dispositions contestées lui est renvoyée, le Conseil constitutionnel examine le litige à l'occasion duquel la question prioritaire de constitutionnalité a été posée. La société requérante a saisi le tribunal administratif d'un recours. Ce recours tend, d'une part, à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 6 mars 2015 par laquelle le maire de la commune des Fourgs a rejeté sa demande tendant à l'abrogation de l'arrêté du 5 mars 2004 instituant, sur la parcelle cadastrée ZE 27 dont elle est propriétaire dans cette commune, la servitude prévue au paragraphe I de l'article L. 145--3 du code de l'urbanisme. Ce recours tend, d'autre part, à l'abrogation de cet arrêté du 5 mars 2004. Le Conseil constitutionnel est donc saisi du second alinéa du paragraphe I de l'article L. 145--3 du code de l'urbanisme dans sa rédaction résultant de la loi du 2 juillet 2003, qui était applicable lors de l'institution de la servitude.

(2016-540 QPC, 10 mai 2016, cons. 1, JORF n° 0110 du 12 mai 2016, texte n° 39)

Saisie d'une question prioritaire de constitutionnalité portant sur « les articles 1729 et 1741 du code général des impôts dans leur version applicable à la date de prévention », la Cour de cassation a jugé que cette question portait sur l'article 1729 du code général des impôts « dans sa rédaction actuellement en vigueur, issue de la loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008 » et sur l'article 1741 du même code « dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2005-1512 du 7 décembre 2005 ». Toutefois, l'ordonnance du 7 décembre 2005 mentionnée ci-dessus n'a pas modifié la rédaction de l'article 1741 du code général des impôts. Par conséquent, la question prioritaire de constitutionnalité dont le Conseil constitutionnel est saisi porte sur l'article 1729 du code général des impôts dans sa rédaction résultant de la loi du 30 décembre 2008 mentionnée ci-dessus et sur l'article 1741 du même code dans sa rédaction résultant de l'ordonnance du 19 septembre 2000 mentionnée ci-dessus.

(2016-545 QPC, 24 juin 2016, cons. 1, JORF n° 0151 du 30 juin 2016, texte n° 110)

EXAMEN DE LA CONSTITUTIONNALITÉ

Conditions de prise en compte d'éléments extrinsèques au texte de la loi

Référence à une loi non encore promulguée

Afin de permettre au législateur de remédier à l'inconstitutionnalité constatée, il y a lieu de reporter la déclaration d'inconstitutionnalité ainsi que d'éviter que cette déclaration affecte les modifications législatives en cours d'adoption par le Parlement, aux articles 27 ter et 27 quater du projet de loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement. Par conséquent, la déclaration d'inconstitutionnalité des mots « et, en ce qui concerne les prévenus, aux nécessités de l'information » figurant au deuxième alinéa de l'article 39 de la loi du 24 novembre 2009 et des troisième et quatrième alinéas de l'article 145-4 du code de procédure pénale est reportée jusqu'à l'entrée en vigueur de nouvelles dispositions législatives ou, au plus tard, jusqu'au 31 décembre 2016.

(2016-543 QPC, 24 mai 2016, cons. 21, JORF n° 0124 du 29 mai 2016, texte n° 42)

SENS ET PORTÉE DE LA DÉCISION

Caractère séparable ou non des dispositions déclarées inconstitutionnelles

Censure par voie de conséquence

Alors que pour conclure à la culpabilité de l'accusé, en première instance comme en appel, une majorité des deux tiers des membres de la cour d'assises est requise dans le droit commun, il résulte des dispositions de l'article 888 du code de procédure pénale que, devant la cour d'assises de Mayotte siégeant en premier ressort, une majorité des cinq septièmes est exigée. La modification de ces conditions de majorité crée une différence de traitement sans rapport avec l'objet de la loi et privant les justiciables de garanties égales. Par conséquent, la condition de majorité applicable à la cour d'assises de Mayotte siégeant en premier ressort est contraire au principe d'égalité devant la justice.

Sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres griefs, il résulte des motifs énoncés au paragraphe précédent que les mots « de cinq ou » figurant à l'article 888 du code de procédure pénale doivent être déclarés contraires à la Constitution. Afin d'assurer le respect du principe d'égalité devant la justice et du ratio prévu par les règles de droit commun pour la délibération de la cour d'assises de Mayotte siégeant en premier ressort, il en est de même, par voie de conséquence, des mots « de quatre assesseurs-jurés lorsque la cour d'assises statue en premier ressort et » et des mots « lorsqu'elle statue en appel » figurant au premier alinéa de l'article 885 du même code.

(2016-544 QPC, 3 juin 2016, cons. 21 et 22, JORF n° 0129 du 4 juin 2016, texte n° 65)

Portée des décisions dans le temps

Dans le cadre d'un contrôle a posteriori (article 61-1)

Abrogation

Abrogation à la date de la publication de la décision

La déclaration d'inconstitutionnalité du second alinéa de l'article 836 du code de procédure pénale prend effet à compter de la date de la publication de la présente décision. Elle est applicable à toutes les infractions non jugées définitivement au jour de la publication de la présente décision. Par suite, à compter de cette date, pour exercer la compétence que lui reconnaît le code de procédure pénale, le tribunal correctionnel dans le territoire des îles Wallis-et-Futuna statuant en formation collégiale siégera selon la règle prévue par l'article 398 du code de procédure pénale, laquelle garantit que la formation de jugement sera composée d'une majorité de magistrats professionnels.

(2016-532 QPC, 1er avril 2016, cons. 10, JORF n° 0081 du 6 avril 2016, texte n° 55)

La déclaration d'inconstitutionnalité de l'article L. 341-10 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction résultant du décret du 17 décembre 1985 (disposition abrogée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011) prend effet à compter de la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel. Elle peut être invoquée dans toutes les instances introduites à cette date et non jugées définitivement.

(2016-534 QPC, 14 avril 2016, cons. 7, JORF n° 0090 du 16 avril 2016, texte n° 82)

En l'espèce, aucun motif ne justifie de reporter la date de l'abrogation des mots « ayant chacun leur domicile fiscal en Nouvelle-Calédonie » figurant dans la première phrase du deuxième alinéa du paragraphe I de l'article Lp. 52 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie. Par conséquent, la déclaration d'inconstitutionnalité prend effet à compter de la date de la publication de la décision n° 2016-539 QPC.

(2016-539 QPC, 10 mai 2016, cons. 11, JORF n° 0110 du 12 mai 2016, texte n° 38)

En l'espèce, aucun motif ne justifie de reporter la date de l'abrogation des dispositions contestées. En premier lieu, la déclaration d'inconstitutionnalité de l'exclusion des références aux articles 254 à 258-2, 289 à 303 et 305 du code de procédure pénale, au sein du second alinéa de l'article 877 du même code, ainsi que des mots « de quatre assesseurs-jurés lorsque la cour d'assises statue en premier ressort et », des mots « lorsqu'elle statue en appel » figurant au premier alinéa de l'article 885 du même code et des mots « de cinq ou » figurant à l'article 888 du même code prend effet à compter de la date de la publication de la décision. Les arrêts rendus par la cour d'assises de Mayotte avant cette date ne peuvent être contestés sur le fondement de cette déclaration d'inconstitutionnalité. Pour le reste, la déclaration d'inconstitutionnalité est applicable à toutes les infractions non jugées définitivement au jour de la publication de la décision.

En second lieu, la déclaration d'inconstitutionnalité de la référence à l'article 288 du code de procédure pénale, au sein du second alinéa de l'article 877 du même code, prend effet à compter de la date de la publication de la décision. Elle est applicable aux infractions commises à compter de cette date.

(2016-544 QPC, 3 juin 2016, cons. 25 et 26, JORF n° 0129 du 4 juin 2016, texte n° 65)

En l'espèce, aucun motif ne justifie de reporter la date de l'abrogation des dispositions contestées. Par conséquent, la déclaration d'inconstitutionnalité du quatrième alinéa de l'article L. 3132-26 du code du travail et des mots « ou, à Paris, le préfet » figurant au second alinéa du paragraphe III de l'article 257 de la loi du 6 août 2015 prend effet à compter de la date de la publication de la présente décision.

(2016-547 QPC, 24 juin 2016, cons. 10, JORF n° 0151 du 30 juin 2016, texte n° 112)

Abrogation reportée dans le temps

D'une part, les dispositions du 9 ° du paragraphe I de l'article 27 quater du projet de loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l'efficacité et les garanties de la procédure pénale, prévoient de modifier l'article 145-4 du code de procédure pénale et notamment ses troisième et quatrième alinéas. Il est en particulier prévu d'ajouter des conditions de délivrance de l'autorisation de téléphoner à une personne placée en détention provisoire ainsi que des motifs pouvant être pris en compte pour refuser de délivrer un permis de visite ou une autorisation de téléphoner à une telle personne. Il est également prévu d'imposer aux magistrats compétents pour répondre à ces demandes un délai pour prendre ces décisions et d'aménager une voie de recours à leur encontre. Le 4 ° du paragraphe I de l'article 27 ter du même projet de loi prévoit enfin qu'en l'absence d'un recours spécifique prévu par les textes, l'absence de réponse du ministère public ou de la juridiction dans un délai de deux mois à compter d'une demande permet d'exercer un recours contre la décision implicite de rejet de la demande. Toutefois, ces dispositions ne sont pas encore définitivement adoptées par le Parlement au jour de la décision du Conseil constitutionnel.

D'autre part, l'abrogation immédiate des dispositions contestées aurait pour effet de faire disparaître des dispositions permettant à certaines des personnes placées en détention provisoire d'exercer un recours contre certaines décisions leur refusant un permis de visite.

Afin de permettre au législateur de remédier à l'inconstitutionnalité constatée, il y a donc lieu de reporter la déclaration d'inconstitutionnalité ainsi que d'éviter que cette déclaration affecte les modifications législatives en cours d'adoption par le Parlement. Par conséquent, la déclaration d'inconstitutionnalité des mots « et, en ce qui concerne les prévenus, aux nécessités de l'information » figurant au deuxième alinéa de l'article 39 de la loi du 24 novembre 2009 et des troisième et quatrième alinéas de l'article 145-4 du code de procédure pénale est reportée jusqu'à l'entrée en vigueur de nouvelles dispositions législatives ou, au plus tard, jusqu'au 31 décembre 2016.

(2016-543 QPC, 24 mai 2016, cons. 18 à 21, JORF n° 0124 du 29 mai 2016, texte n° 42)

Effets produits par la disposition abrogée

Maintien des effets

D'une part, les dispositions du 9 ° du paragraphe I de l'article 27 quater du projet de loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l'efficacité et les garanties de la procédure pénale, prévoient de modifier l'article 145-4 du code de procédure pénale et notamment ses troisième et quatrième alinéas. Il est en particulier prévu d'ajouter des conditions de délivrance de l'autorisation de téléphoner à une personne placée en détention provisoire ainsi que des motifs pouvant être pris en compte pour refuser de délivrer un permis de visite ou une autorisation de téléphoner à une telle personne. Il est également prévu d'imposer aux magistrats compétents pour répondre à ces demandes un délai pour prendre ces décisions et d'aménager une voie de recours à leur encontre. Le 4 ° du paragraphe I de l'article 27 ter du même projet de loi prévoit enfin qu'en l'absence d'un recours spécifique prévu par les textes, l'absence de réponse du ministère public ou de la juridiction dans un délai de deux mois à compter d'une demande permet d'exercer un recours contre la décision implicite de rejet de la demande. Toutefois, ces dispositions ne sont pas encore définitivement adoptées par le Parlement au jour de la décision du Conseil constitutionnel.

D'autre part, l'abrogation immédiate des dispositions contestées aurait pour effet de faire disparaître des dispositions permettant à certaines des personnes placées en détention provisoire d'exercer un recours contre certaines décisions leur refusant un permis de visite.

Afin de permettre au législateur de remédier à l'inconstitutionnalité constatée, il y a donc lieu de reporter la déclaration d'inconstitutionnalité ainsi que d'éviter que cette déclaration affecte les modifications législatives en cours d'adoption par le Parlement. Par conséquent, la déclaration d'inconstitutionnalité des mots « et, en ce qui concerne les prévenus, aux nécessités de l'information » figurant au deuxième alinéa de l'article 39 de la loi du 24 novembre 2009 et des troisième et quatrième alinéas de l'article 145-4 du code de procédure pénale est reportée jusqu'à l'entrée en vigueur de nouvelles dispositions législatives ou, au plus tard, jusqu'au 31 décembre 2016. Les décisions prises en vertu de ces dispositions avant cette date ne peuvent être contestées sur le fondement de cette inconstitutionnalité.

(2016-543 QPC, 24 mai 2016, cons. 19 à 21, JORF n° 0124 du 29 mai 2016, texte n° 42)

La déclaration d'inconstitutionnalité de la référence à l'article 288 du code de procédure pénale, au sein du second alinéa de l'article 877 du même code, prend effet à compter de la date de la publication de la décision. Cette abrogation, qui a pour effet d'étendre le champ d'une incrimination, est applicable aux infractions commises à compter de cette date.

(2016-544 QPC, 3 juin 2016, cons. 26, JORF n° 0129 du 4 juin 2016, texte n° 65)

Remise en cause des effets

Pour les instances en cours

La déclaration d'inconstitutionnalité du second alinéa de l'article 836 du code de procédure pénale prend effet à compter de la date de la publication de la présente décision. Elle est applicable à toutes les infractions non jugées définitivement au jour de la publication de la présente décision. Par suite, à compter de cette date, pour exercer la compétence que lui reconnaît le code de procédure pénale, le tribunal correctionnel dans le territoire des îles Wallis-et-Futuna statuant en formation collégiale siégera selon la règle prévue par l'article 398 du code de procédure pénale, laquelle garantit que la formation de jugement sera composée d'une majorité de magistrats professionnels.

(2016-532 QPC, 1er avril 2016, cons. 10, JORF n° 0081 du 6 avril 2016, texte n° 55)

La déclaration d'inconstitutionnalité de l'article L. 341-10 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction résultant du décret du 17 décembre 1985 (disposition abrogée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011) prend effet à compter de la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel. Elle peut être invoquée dans toutes les instances introduites à cette date et non jugées définitivement.

(2016-534 QPC, 14 avril 2016, cons. 7, JORF n° 0090 du 16 avril 2016, texte n° 82)

La déclaration d'inconstitutionnalité des mots « ayant chacun leur domicile fiscal en Nouvelle-Calédonie » figurant dans la première phrase du deuxième alinéa du paragraphe I de l'article Lp. 52 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie peut être invoquée dans toutes les instances introduites à la date de publication de la décision n° 2016-539 QPC et non jugées définitivement à cette date.

(2016-539 QPC, 10 mai 2016, cons. 11, JORF n° 0110 du 12 mai 2016, texte n° 38)

La déclaration d'inconstitutionnalité de l'exclusion des références aux articles 254 à 258-2, 289 à 303 et 305 du code de procédure pénale, au sein du second alinéa de l'article 877 du même code, ainsi que des mots « de quatre assesseurs-jurés lorsque la cour d'assises statue en premier ressort et », des mots « lorsqu'elle statue en appel » figurant au premier alinéa de l'article 885 du même code et des mots « de cinq ou » figurant à l'article 888 du même code prend effet à compter de la date de la publication de la décision. Les arrêts rendus par la cour d'assises de Mayotte avant cette date ne peuvent être contestés sur le fondement de cette déclaration d'inconstitutionnalité. Pour le reste, la déclaration d'inconstitutionnalité est applicable à toutes les infractions non jugées définitivement au jour de la publication de la décision.

(2016-544 QPC, 3 juin 2016, cons. 25, JORF n° 0129 du 4 juin 2016, texte n° 65)

La déclaration d'inconstitutionnalité du quatrième alinéa de l'article L. 3132-26 du code du travail et des mots « ou, à Paris, le préfet » figurant au second alinéa du paragraphe III de l'article 257 de la loi du 6 août 2015 prend effet à compter de la date de la publication de la présente décision. Elle peut être invoquée dans toutes les instances introduites à sa date de publication et non jugées définitivement à cette date.

(2016-547 QPC, 24 juin 2016, cons. 10, JORF n° 0151 du 30 juin 2016, texte n° 112)

Autorité des décisions du Conseil constitutionnel

Hypothèses où la chose jugée n'est pas opposée

Changement des circonstances

Dans les considérants 5 à 8 de sa décision du 17 mars 2011 mentionnée ci-dessus, le Conseil constitutionnel a spécialement examiné les mots « de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie » figurant au 1 de l'article 1729 du code général des impôts dans sa rédaction antérieure au 1er janvier 2006. Il les a déclarés conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif de cette décision.

Toutefois, d'une part, l'ordonnance du 7 décembre 2005, entrée en vigueur le 1er janvier 2006, a modifié l'article 1729 en remplaçant les mots « de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie » par les mots « 40 % en cas de manquement délibéré ». D'autre part, depuis cette déclaration de conformité à la Constitution, le Conseil constitutionnel a jugé, dans sa décision du 18 mars 2015 mentionnée ci-dessus, que le cumul de l'application de dispositions instituant des sanctions, lorsque celles-ci sont infligées à l'issue de poursuites différentes en application de corps de règles distincts, peut méconnaître le principe de nécessité des délits et des peines si différentes conditions sont réunies. Les sanctions doivent réprimer les mêmes faits, ne pas être d'une nature différente et relever du même ordre de juridiction et les intérêts sociaux protégés doivent être les mêmes. La modification des dispositions de l'article 1729 et la décision du 18 mars 2015 constituent un changement des circonstances de droit. Ce changement justifie, en l'espèce, le réexamen des dispositions de l'article 1729 du code général des impôts.

(2016-545 QPC, 24 juin 2016, cons. 6 et 7, JORF n° 0151 du 30 juin 2016, texte n° 110)

Dans les considérants 5 à 8 de sa décision du 17 mars 2011 mentionnée ci-dessus, le Conseil constitutionnel a spécialement examiné les mots « de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie » figurant au 1 de l'article 1729 du code général des impôts dans sa rédaction antérieure au 1er janvier 2006. Il les a déclarés conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif de cette décision.

Toutefois, d'une part, l'ordonnance du 7 décembre 2005, entrée en vigueur le 1er janvier 2006, a modifié l'article 1729 en remplaçant les mots « de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie » par les mots « 40 % en cas de manquement délibéré ». D'autre part, depuis cette déclaration de conformité à la Constitution, le Conseil constitutionnel a jugé, dans sa décision du 18 mars 2015 mentionnée ci-dessus, que le cumul de l'application de dispositions instituant des sanctions, lorsque celles-ci sont infligées à l'issue de poursuites différentes en application de corps de règles distincts, peut méconnaître le principe de nécessité des délits et des peines si différentes conditions sont réunies. Les sanctions doivent réprimer les mêmes faits, ne pas être d'une nature différente et relever du même ordre de juridiction et les intérêts sociaux protégés doivent être les mêmes. La modification des dispositions de l'article 1729 et la décision du 18 mars 2015 constituent un changement des circonstances de droit. Ce changement justifie, en l'espèce, le réexamen des dispositions de l'article 1729 du code général des impôts.

(2016-546 QPC, 24 juin 2016, cons. 6 et 7, JORF n° 0151 du 30 juin 2016, texte n° 111)

JURIDICTIONS ET AUTORITÉ JUDICIAIRE

ORGANISATION DES JURIDICTIONS

Composition

Juridictions de droit commun

Présence minoritaire de juges non professionnels

Si les dispositions de l'article 66 de la Constitution s'opposent à ce que le pouvoir de prononcer des mesures privatives de liberté soit confié à une juridiction qui ne serait composée que de juges non professionnels, elles n'interdisent pas, par elles-mêmes, que ce pouvoir soit exercé par une juridiction pénale de droit commun au sein de laquelle siègent de tels juges. Toutefois, s'agissant des formations correctionnelles de droit commun, la proportion des juges non professionnels doit rester minoritaire.

En vertu des articles 836 du code de procédure pénale et L. 532-8 du code de l'organisation judiciaire, le tribunal correctionnel dans le territoire des îles Wallis-et-Futuna statuant en formation collégiale est composé d'un magistrat du siège et de deux assesseurs choisis, pour une durée de deux ans, parmi les personnes de nationalité française, âgées de plus de vingt-trois ans, jouissant des droits civiques, civils et de famille et présentant des garanties de compétence et d'impartialité. Il résulte en outre des articles 381 et 382 du code de procédure pénale que ce même tribunal correctionnel statuant en formation collégiale constitue une formation correctionnelle de droit commun compétente pour prononcer une peine privative de liberté. Enfin, aucune disposition législative ne garantit que cette formation de jugement comprend une majorité de juges professionnels. Ainsi, les dispositions du second alinéa de l'article 836 du code de procédure pénale, qui permettent la présence d'une majorité de juges non professionnels au sein d'une formation correctionnelle de droit commun compétente pour prononcer des peines privatives de liberté, méconnaissent les exigences découlant de l'article 66 de la Constitution. Censure.

(2016-532 QPC, 1er avril 2016, cons. 1, 2, 5 à 8 et 10, JORF n° 0081 du 6 avril 2016, texte n° 55)

Juridictions spécialisées

Cour d'assises à composition spéciale

Par dérogation aux articles 259 à 267 du code de procédure pénale qui fixent les règles relatives à la formation du jury des cours d'assises, le second alinéa de l'article 885 du même code prévoit que, pour le jury de la cour d'assises de Mayotte, les assesseurs-jurés sont tirés au sort, pour chaque session, à partir d'une liste de personnes, proposées par le procureur de la République ou les maires, qui est arrêtée par le préfet et le président du tribunal de grande instance. Les personnes ainsi choisies doivent être de nationalité française, âgées de plus de vingt-trois ans, savoir lire et écrire en français, présenter des garanties de compétence et d'impartialité et jouir des droits politiques, civils et de famille.

L'article 16 de la Déclaration de 1789 prévoit : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution ». Les principes d'indépendance et d'impartialité sont indissociables de l'exercice de fonctions juridictionnelles.

En confiant conjointement au préfet et au président du tribunal de grande instance le soin d'arrêter la liste à partir de laquelle les assesseurs-jurés de la cour d'assises de Mayotte sont tirés au sort, et en prévoyant que les citoyens inscrits sur cette liste doivent avoir été proposés soit par le procureur de la République soit par les maires, le législateur a entendu assurer que cette liste soit composée de citoyens présentant des garanties de compétence et d'impartialité. Le fait que le tirage au sort soit effectué à partir d'une liste ainsi établie n'est pas contraire aux exigences d'indépendance et d'impartialité découlant de l'article 16 de la Déclaration de 1789.

(2016-544 QPC, 3 juin 2016, cons. 5, 9 et 10, JORF n° 0129 du 4 juin 2016, texte n° 65)

ORGANISATION DÉCENTRALISÉE DE LA RÉPUBLIQUE

ORGANISATION DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Départements et régions d'outre-mer (article 73)

Règles communes

Principe d'adaptation législative (article 73, alinéas 1 et 2)

Par dérogation aux articles 259 à 267 du code de procédure pénale qui fixent les règles relatives à la formation du jury des cours d'assises, le second alinéa de l'article 885 du même code prévoit que, pour le jury de la cour d'assises de Mayotte, les assesseurs-jurés sont tirés au sort, pour chaque session, à partir d'une liste de personnes, proposées par le procureur de la République ou les maires, qui est arrêtée par le préfet et le président du tribunal de grande instance. Les personnes ainsi choisies doivent être de nationalité française, âgées de plus de vingt-trois ans, savoir lire et écrire en français, présenter des garanties de compétence et d'impartialité et jouir des droits politiques, civils et de famille.

La population de Mayotte présente des caractéristiques et contraintes particulières, au sens de l'article 73 de la Constitution, de nature à permettre au législateur d'adapter les conditions dans lesquelles est formé le jury de la cour d'assises de Mayotte. En effet, une proportion importante de la population de Mayotte ne remplit pas les conditions d'âge, de nationalité et de connaissance de la langue et de l'écriture françaises exigées pour exercer les fonctions d'assesseur-juré. Pour leur part, les règles de droit commun prévoient que les jurés de cours d'assises sont tirés au sort à partir d'une liste établie, après tirage au sort, parmi l'ensemble des citoyens inscrits sur les listes électorales. Dès lors, en prévoyant un tirage au sort des assesseurs-jurés de la cour d'assises de Mayotte sur une liste restreinte de citoyens établie par certaines autorités, le législateur a instauré une différence de traitement qui tient compte de la situation particulière de Mayotte et qui ne méconnaît pas le principe d'égalité devant la justice.

Le second alinéa de l'article 877 du code de procédure pénale exclut l'application des articles 254 à 258-2, 289 à 303 et 305 du code de procédure pénale pour la composition de la cour d'assises de Mayotte. Ces articles sont relatifs aux incapacités et incompatibilités liées aux fonctions de juré, aux conditions de révision des listes de jurés et au droit de récuser des jurés. En particulier, l'article 256 prévoit que sont incapables d'être jurés les personnes dont le bulletin n° 1 du casier judiciaire mentionne une condamnation pour crime ou pour délit, celles en état d'accusation ou de contumace et celles placées sous mandat de dépôt ou d'arrêt, les fonctionnaires révoqués et les officiers ministériels destitués, les membres d'ordres professionnels frappés d'une interdiction définitive d'exercer et les majeurs protégés. L'article 257 prévoit que sont, en particulier, incompatibles avec les fonctions de juré l'exercice de fonctions juridictionnelles ou l'exercice de fonctions dans la police, l'administration pénitentiaire ou la gendarmerie. Le dernier alinéa de l'article 289 prévoit que sont rayés de la liste de session les noms des jurés qui se révéleraient être conjoints, parents ou alliés d'un membre de la cour ou de l'un des autres jurés. L'article 291 prévoit des règles similaires lorsque la parenté du juré est établie à l'égard de l'accusé ou de son avocat ou que la personne est témoin, interprète, dénonciateur, expert, plaignant ou partie civile ou a accompli un acte de police judiciaire ou d'instruction. Enfin, les articles 297 à 301 fixent les conditions dans lesquelles l'accusé ou son avocat et le ministère public peuvent exercer un droit de récusation des jurés lors de leur tirage au sort. Par dérogation à ces règles de droit commun, les dispositions du second alinéa de l'article 885 du code de procédure pénale prévoient uniquement que les assesseurs-jurés de la cour d'assises de Mayotte doivent être tirés au sort sur une liste composée de personnes « présentant des garanties de compétence et d'impartialité et jouissant des droits politiques, civils et de famille ». Ni ces dispositions ni aucune autre disposition législative n'imposent d'autres conditions pour exercer les fonctions d'assesseur-juré. Elles ne prévoient ni dispositif de révision de la liste ni faculté pour l'accusé, son avocat et le ministère public de récuser un assesseur-juré tiré au sort.

L'exclusion de règles de droit commun crée une différence de traitement sans rapport direct avec l'objet de la législation dérogatoire applicable à la cour d'assises de Mayotte, qui vise à tenir compte du nombre restreint de personnes inscrites sur les listes électorales et disposant d'une maîtrise suffisante de la langue et de l'écriture françaises pour exercer les fonctions d'assesseur-juré. Par conséquent, la référence aux articles 254 à 258-2, 289 à 303 et 305 du code de procédure pénale, au second alinéa de l'article 877 du même code, pour exclure leur application à Mayotte, est contraire au principe d'égalité devant la justice.

Le second alinéa de l'article 877 du code de procédure pénale exclut l'application à Mayotte de l'article 288 du même code, dont les troisième à cinquième alinéas répriment d'une amende de 3 750 euros le fait pour un juré de ne pas déférer à la convocation qu'il a reçue ou de se retirer avant l'expiration de ses fonctions. Le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit.

L'exercice des fonctions d'assesseur-juré à la cour d'assises de Mayotte est identique à l'exercice des fonctions de juré d'une cour d'assises située dans une autre partie du territoire de la République. L'exclusion de l'incrimination prévue par l'article 288 du code de procédure pénale pour les assesseurs-jurés de la cour d'assises de Mayotte instaure une différence de traitement. Cette dernière n'est pas en rapport direct avec l'objet de la législation dérogatoire applicable à la cour d'assises de Mayotte. Par conséquent, la référence à l'article 288 du code de procédure pénale, au second alinéa de l'article 877 du même code, pour exclure son application à Mayotte, est contraire au principe d'égalité.

Les articles 240, 243, 244, 248, 296 et 359 du code de procédure pénale sont relatifs à la composition de la cour d'assises de droit commun et fixent les règles de majorité en ce qui concerne les délibérations de la cour d'assises sur la culpabilité de l'accusé et sa peine. La cour d'assises est composée, en première instance, de trois magistrats professionnels et de six jurés et, en appel, de trois magistrats professionnels et de neuf jurés. Toute décision défavorable à l'accusé se forme à la majorité de six voix au moins lorsque la cour d'assises statue en premier ressort et à la majorité de huit voix au moins lorsqu'elle statue en appel. Par dérogation à ces règles, le premier alinéa de l'article 885 du code de procédure pénale fixe, en premier ressort, le nombre d'assesseurs-jurés composant la cour d'assises de Mayotte à quatre et, en appel, à six. L'article 888 du même code prévoit qu'une condamnation exige une majorité de cinq voix sur sept en premier ressort et de six voix sur neuf en appel.

En abaissant le nombre de jurés composant la cour d'assises de Mayotte tant en premier ressort qu'en appel, le législateur a institué une différence de traitement qui tient compte des caractéristiques et contraintes particulières propres au département de Mayotte et qui est en rapport avec l'objet de la loi.

Toutefois, alors que pour conclure à la culpabilité de l'accusé, en première instance comme en appel, une majorité des deux tiers des membres de la cour d'assises est requise dans le droit commun, il résulte des dispositions contestées que, devant la cour d'assises de Mayotte siégeant en premier ressort, une majorité des cinq septièmes est exigée. La modification de ces conditions de majorité crée une différence de traitement sans rapport avec l'objet de la loi et privant les justiciables de garanties égales. Par conséquent, la condition de majorité applicable à la cour d'assises de Mayotte siégeant en premier ressort est contraire au principe d'égalité devant la justice.

(2016-544 QPC, 3 juin 2016, cons. 5 à 8 et 12 à 21, JORF n° 0129 du 4 juin 2016, texte n° 65)

Collectivités d'outre-mer régies par l'article 74

Règles particulières aux collectivités dotées de l'autonomie

Procédure de déclassement par le Conseil constitutionnel (article 74, alinéa 9)

Disposition législative dont le déclassement est demandé

Saisi d'une demande du président de la Polynésie française tendant à constater que les dispositions des articles 3, 7, 8, 14, 15, 16, 19, 20, 25 et 57 de la loi du 21 juin 2004 sont intervenues dans une matière relevant de la compétence de la Polynésie française, le Conseil constitutionnel considère que la demande du président de la Polynésie française doit être regardée comme portant sur les mots « en Polynésie française » figurant au premier alinéa du paragraphe I de l'article 57 de la loi du 21 juin 2004, en tant qu'ils rendent applicables dans cette collectivité d'outre-mer les dispositions des articles 3, 7, 8, 14, 15, 16, 19, 20 et 25 de cette loi.

(2016-10 LOM, 3 juin 2016, cons. 1 à 3, JORF n° 0129 du 4 juin 2016, texte n° 66)

Recevabilité de la demande

Il n'y a pas lieu pour le Conseil constitutionnel de répondre à une demande du président de la Polynésie française tendant à faire constater que des dispositions législatives sont intervenues dans une matière ressortissant à la compétence de la Polynésie dès lors que ces dispositions ne sont plus applicables en Polynésie.

(2016-10 LOM, 3 juin 2016, cons. 4, JORF n° 0129 du 4 juin 2016, texte n° 66)

Matière ressortissant à la compétence de la collectivité d'outre-mer

L'article 3 de la loi du 21 juin 2004 est applicable aux agents de l'État, des collectivités territoriales, des établissements publics et des personnes privées chargées d'une mission de service public. En rendant applicables en Polynésie française l'article 3 aux agents de la Polynésie française, de ses établissements publics et des personnes privées chargées par l'État, la Polynésie française ou une commune d'une mission de service public, les mots « en Polynésie française » figurant au paragraphe I de l'article 57 de cette loi relèvent d'une matière qui est de la compétence de la Polynésie française.

(2016-10 LOM, 3 juin 2016, cons. 6 et 8, JORF n° 0129 du 4 juin 2016, texte n° 66)

Les dispositions de l'article 7 et du paragraphe I de l'article 8 de la loi du 21 juin 2004 fixent des règles relatives au droit de la propriété intellectuelle. Ces règles ne se rattachent pas à l'une des matières pour lesquelles les dispositions législatives s'appliquent de plein droit à la Polynésie française en application de l'article 7 de la loi organique du 27 février 2004. Elles ne se rattachent pas non plus à l'une des matières réservées à la compétence de l'État en application de l'article 14 de cette même loi organique. Par conséquent, les mots « en Polynésie française » figurant au paragraphe I de l'article 57 de la loi du 21 juin 2004, en tant qu'ils rendent applicables en Polynésie française l'article 7 et le paragraphe I de l'article 8 de cette loi, relèvent d'une matière qui est de la compétence de la Polynésie française.

(2016-10 LOM, 3 juin 2016, cons. 9, JORF n° 0129 du 4 juin 2016, texte n° 66)

En rendant applicables en Polynésie française les dispositions des articles 14 et 15, de l'article 16 à l'exception du 2 ° de son paragraphe I, de l'article 19 à l'exception de son dernier alinéa et de l'article 20 de la loi du 21 juin 2004, en tant qu'elles s'appliquent à des activités de fourniture à distance et par voie électronique de biens ou de services autres qu'en matière de monnaie, de crédit, de change et de marchés financiers, les mots « en Polynésie française » figurant au paragraphe I de l'article 57 de cette loi relèvent d'une matière qui est de la compétence de la Polynésie française.

(2016-10 LOM, 3 juin 2016, cons. 12, JORF n° 0129 du 4 juin 2016, texte n° 66)

En rendant applicables en Polynésie française les dispositions de l'article 25 de la loi du 21 juin 2004 autres que le 1 ° de l'article 1108-2 du code civil (relatif aux actes sous seing privé en matière de droit de la famille), qui introduisent dans le code civil des articles relatifs aux obligations souscrites sous forme électronique, les mots « en Polynésie française » figurant au paragraphe I de l'article 57 de cette loi relèvent d'une matière qui est de la compétence de la Polynésie française.

(2016-10 LOM, 3 juin 2016, cons. 14, JORF n° 0129 du 4 juin 2016, texte n° 66)

Matière ne ressortissant pas à la compétence de la collectivité d'outre-mer

En vertu du 5 ° de l'article 7 de la loi organique du 27 février 2004, les dispositions législatives relatives « aux statuts des agents publics de l'État » sont applicables de plein droit en Polynésie française. L'article 3 de la loi du 21 juin 2004 est applicable aux agents de l'État, des collectivités territoriales, des établissements publics et des personnes privées chargées d'une mission de service public. En tant qu'elles visent les agents publics de l'État, ces dispositions de l'article 3 s'appliquent de plein droit en Polynésie française.

Le 10 ° de l'article 14 de la loi organique du 27 février 2004 réserve à l'État la compétence en matière de « fonction publique communale ». Ainsi, en tant qu'elles s'appliquent aux agents des communes de la Polynésie française et de leurs établissements publics, ces dispositions de l'article 3 relèvent d'une matière qui est de la compétence de l'État.

(2016-10 LOM, 3 juin 2016, cons. 6 à 8, JORF n° 0129 du 4 juin 2016, texte n° 66)

Le 2 ° de l'article 14 de la loi organique du 27 février 2004 prévoit que les autorités de l'État sont compétentes en matière de droit pénal ainsi qu'en matière de réglementation de l'aide juridictionnelle et d'organisation de la profession d'avocat. Le dernier alinéa de l'article 19 de la loi du 21 juin 2004 définit des infractions pénales. Le 2 ° du paragraphe I de l'article 16 interdit l'activité de commerce électronique pour les activités de représentation et d'assistance en justice. En rendant ces dispositions applicables en Polynésie française, les mots « en Polynésie française » figurant au paragraphe I de l'article 57 de cette loi relèvent d'une matière qui est de la compétence de l'État.

Le 7 ° de l'article 14 de la loi organique du 27 février 2004 prévoit que les autorités de l'État sont compétentes en matière de monnaie, de crédit, de change et de marchés financiers. Les dispositions des articles 14, 15, 16, 19 et 20 de la loi du 21 juin 2004, en tant qu'elles s'appliquent à des activités de fourniture de biens ou de services à distance et par voie électronique en matière de monnaie, de crédit, de change et de marchés financiers telles qu'elles sont, notamment, décrites et régies par les livres I à VI de la partie législative du code monétaire et financier, relèvent d'une matière qui est de la compétence de l'État.

(2016-10 LOM, 3 juin 2016, cons. 10 et 11, JORF n° 0129 du 4 juin 2016, texte n° 66)

Le 1 ° de l'article 14 de la loi organique du 27 février 2004 prévoit que les autorités de l'État sont compétentes en matière d'état et de capacité des personnes, de régimes matrimoniaux, de successions et de libéralités. Le 1 ° de l'article 1108-2 du code civil, introduit par l'article 25 de la loi du 21 juin 2004, fixe des règles relatives aux actes sous seing privé en matière de droit de la famille et des successions. Par conséquent, ces dispositions relèvent d'une matière qui est de la compétence de l'État.

(2016-10 LOM, 3 juin 2016, cons. 13, JORF n° 0129 du 4 juin 2016, texte n° 66)

DISPOSITIONS TRANSITOIRES RELATIVES À LA NOUVELLE-CALÉDONIE (ARTICLE 77)

Respect de la procédure d'adoption des lois du pays

La loi organique déférée a pour objet de modifier la loi organique du 19 mars 1999 prise en application de l'article 77 de la Constitution à la suite de l'approbation par les populations consultées de l'accord signé à Nouméa le 5 mai 1998. Le Conseil constitutionnel s'assure que la proposition de loi organique à l'origine de la loi déférée a, dans les conditions prévues à l'article 90 de la loi organique du 19 mars 1999, fait l'objet d'une consultation du congrès de la Nouvelle-Calédonie avant que le Sénat, première assemblée saisie, délibère en première lecture sur cette proposition.

(2016-731 DC, 21 avril 2016, cons. 2, JORF n° 0098 du 26 avril 2016, texte n° 5)

Normes de contrôle

Le contrôle du Conseil constitutionnel sur les lois du pays doit s'exercer non seulement au regard de la Constitution, mais également au regard des orientations définies par l'accord de Nouméa et des dispositions organiques prises pour leur application.

(2016-6 LP, 16 juin 2016, cons. 5, JORF n° 0141 du 18 juin 2016, texte n° 70)

Principe de la poursuite de la réforme foncière

La poursuite de la réforme foncière destinée à favoriser la constitution de terres coutumières et leur mise en valeur trouve son fondement constitutionnel dans les orientations de l'accord de Nouméa. Le quatrième alinéa du point 1.4 de cet accord dispose en effet : « La réforme foncière sera poursuivie. Les terres coutumières seront constituées des réserves, des terres attribuées aux »groupements de droit particulier local« et des terres qui seront attribuées par l'ADRAF pour répondre aux demandes exprimées au titre du lien à la terre. Il n'y aura plus ainsi que les terres coutumières et les terres de droit commun. Des baux seront définis par le congrès, en accord avec le Sénat coutumier, pour préciser les relations entre le propriétaire coutumier et l'exploitant sur les terres coutumières. Les juridictions statuant sur les litiges seront les juridictions de droit commun avec des assesseurs coutumiers ». Il ressort de ces dispositions qu'il appartient au législateur de mettre en œuvre le principe de la poursuite de la réforme foncière en organisant notamment les conditions dans lesquelles l'agence de développement rural et d'aménagement foncier (ADRAF) attribue des terres coutumières. En revanche, il n'en résulte aucune exigence constitutionnelle imposant au législateur de prévoir des modalités particulières d'acquisition de terres agricoles par cette agence.

(2016-6 LP, 16 juin 2016, cons. 6 et 7, JORF n° 0141 du 18 juin 2016, texte n° 70)

S'il ressort du quatrième alinéa du point 1.4 de l'accord de Nouméa qu'il appartient au législateur de mettre en œuvre le principe de la poursuite de la réforme foncière en organisant notamment les conditions dans lesquelles l'agence de développement rural et d'aménagement foncier attribue des terres coutumières, en revanche, il n'en résulte aucune exigence constitutionnelle imposant au législateur de prévoir des modalités particulières d'acquisition de terres agricoles par cette agence. Par ailleurs, aucune exigence constitutionnelle n'interdit au législateur du pays de prévoir des règles de priorité entre les différents droits de préemption institués par une loi du pays ou par une loi.

Dès lors, en instituant une primauté du droit de préemption du preneur à bail rural sur les autres droits de préemption, y compris sur le droit de préemption en faveur de l'agence de développement rural et d'aménagement foncier prévu par l'article 40 de la loi du 29 décembre 1990, les dispositions de l'article Lp. 450 du code agricole et pastoral de Nouvelle-Calédonie ne méconnaissent aucun principe résultant des orientations de l'accord de Nouméa.

(2016-6 LP, 16 juin 2016, cons. 6 à 8, JORF n° 0141 du 18 juin 2016, texte n° 70)

AUTORITÉS INDÉPENDANTES

GARANTIES D'INDÉPENDANCE

Membres

Incompatibilités

Autorités administratives indépendantes de la Nouvelle-Calédonie

L'article unique de la loi organique déférée modifie les dispositions de l'article 27-1 de la loi organique du 19 mars 1999, qui sont relatives aux incompatibilités applicables aux membres des autorités administratives indépendantes créées par la Nouvelle-Calédonie aux fins d'exercer des missions de régulation dans un domaine relevant de ses compétences et aux conditions dans lesquelles ces autorités peuvent mettre fin au mandat d'un de leurs membres. Cet article unique prévoit une incompatibilité entre la fonction de président d'une telle autorité administrative indépendante et tout emploi public exercé en Nouvelle-Calédonie. Pour les autres membres d'une telle autorité, l'incompatibilité s'applique aux emplois publics placés sous l'autorité ou la tutelle des institutions, des provinces et des communes de la Nouvelle-Calédonie. L'article unique interdit également qu'une personne qui, au cours des trois années précédant sa désignation, a exercé un mandat électif ou un emploi public ou détenu des intérêts considérés comme incompatibles avec les fonctions de président ou de membre de l'autorité administrative indépendante puisse être désignée à ces fonctions. Ces dispositions, qui ont pour objet de contribuer à assurer le respect des principes d'indépendance et d'impartialité par des autorités de nature non juridictionnelle auxquelles la loi du pays peut attribuer le pouvoir de prononcer des sanctions ayant le caractère d'une punition, ne méconnaissent aucune exigence constitutionnelle.

(2016-731 DC, 21 avril 2016, cons. 3 et 4, JORF n° 0098 du 26 avril 2016, texte n° 5)

RÉSERVES D'INTERPRÉTATION

DROIT ÉLECTORAL

Loi organique de modernisation des règles applicables à l'élection présidentielle

Les dispositions de l'article 2 de la loi organique de modernisation des règles applicables à l'élection présidentielle imposent, pour les citoyens habilités à présenter des candidats à l'élection du Président de la République qui ne sont pas des élus d'un département d'outre-mer, d'une collectivité d'outre-mer, de la Nouvelle-Calédonie ou des conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger, une présentation uniquement par voie postale, tant que les dispositions relatives à l'envoi par voie électronique ne sont pas entrées en vigueur. Les personnes habilitées à présenter un candidat peuvent recourir à tout opérateur postal agréé en vertu de la réglementation en vigueur afin de faire parvenir leur présentation au Conseil constitutionnel. Il incombera à ces personnes de tenir compte du délai d'acheminement normal du courrier et de remettre en temps utile leur présentation à un opérateur postal afin que celle-ci parvienne au Conseil constitutionnel avant l'expiration du délai fixé par le deuxième alinéa du paragraphe I de l'article 3 de la loi du 6 novembre 1962 et qu'elle puisse être valablement prise en compte. Toutefois, les dispositions de l'article 2 ne sauraient avoir pour objet ou pour effet, sans méconnaître le principe d'égalité entre candidats, de faire obstacle à ce que, saisi par des personnes habilitées à présenter des candidats à l'élection du Président de la République, le Conseil constitutionnel puisse prendre en considération des circonstances de force majeure ayant gravement affecté l'expédition et l'acheminement des présentations dans les jours précédant l'expiration du délai de présentation des candidats à l'élection du Président de la République. Sous cette réserve, les dispositions de l'article 2 de la loi organique ne sont pas contraires à la Constitution.

(2016-729 DC, 21 avril 2016, cons. 5 et 6, JORF n° 0098 du 26 avril 2016, texte n° 4)

DROIT SOCIAL

Indemnisation des accidents du travail (art. L. 412-8, L. 413-12 et L. 452-3 du CSS, art. 34 du décret n° 57-245)

Les dispositions de l'article 34 du décret n° 57-245 du 24 février 1957, relatif à la réparation des accidents du travail dans certaines collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie, en garantissant l'automaticité, la rapidité et la sécurité de la réparation des accidents du travail dus à une faute inexcusable de l'employeur, poursuivent un objectif d'intérêt général. Compte tenu de la situation particulière d'un salarié dans le cadre de son activité professionnelle, la dérogation au droit commun de la responsabilité pour faute, résultant de la réparation forfaitaire de la perte de salaire, n'institue pas des restrictions disproportionnées par rapport à l'objectif d'intérêt général poursuivi. Toutefois, les dispositions de l'article 34 ne sauraient, sans porter une atteinte disproportionnée au droit des victimes d'actes fautifs, faire obstacle à ce que ces mêmes personnes puissent demander à l'employeur réparation de l'ensemble des dommages non couverts par les indemnités majorées accordées en vertu des dispositions du décret du 24 février 1957, conformément aux règles de droit commun de l'indemnisation des dommages. Sous cette réserve, les dispositions de l'article 34 du décret du 24 février 1957 ne méconnaissent pas le principe de responsabilité.

(2016-533 QPC, 14 avril 2016, cons. 9, JORF n° 0090 du 16 avril 2016, texte n° 81)

DROIT DES FINANCES PUBLIQUES ET SOCIALES

Code général des impôts

Imposition des revenus de capitaux mobiliers

Il résulte de l'assujettissement des plus-values mobilières à l'impôt sur le revenu prévu par l'article 200 A du code général des impôts, à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus prévue par l'article 223 sexies du même code ainsi qu'aux prélèvements sociaux prévus par l'article 16 de l'ordonnance du 24 janvier 1996, par l'article L. 14-10-4 du code de l'action sociale et des familles, par l'article 1600-0 F bis du code général des impôts et par les articles L. 136-7 et L. 245-15 du code de la sécurité sociale qu'un taux marginal maximal d'imposition de 62,001 % s'applique à la plus-value réalisée avant le 1er janvier 2013 qui a été placée en report d'imposition et dont le report expire postérieurement à cette date. Les valeurs mobilières qui ont donné lieu à la réalisation de cette plus-value, fait générateur de l'imposition, ont pu être détenues sur une longue durée avant cette réalisation. Faute de tout mécanisme prenant en compte cette durée pour atténuer le montant assujetti à l'impôt sur le revenu, l'application du taux marginal maximal à cette plus-value méconnaîtrait les capacités contributives des contribuables.

Par suite, les dispositions des 1 ter et 1 quater de l'article 150-0 D du code général des impôts ne sauraient, sans méconnaître l'égalité devant les charges publiques, priver les plus-values placées en report d'imposition avant le 1er janvier 2013 qui ne font l'objet d'aucun abattement sur leur montant brut et dont le montant de l'imposition est arrêté selon des règles de taux telles que celles en vigueur à compter du 1er janvier 2013, de l'application à l'assiette ainsi déterminée d'un coefficient d'érosion monétaire pour la période comprise entre l'acquisition des titres et le fait générateur de l'imposition. Sous cette réserve, le grief tiré de la méconnaissance du principe d'égalité devant les charges publiques doit être écarté.

(2016-538 QPC, 22 avril 2016, cons. 11, JORF n° 0097 du 24 avril 2016, texte n° 30)

Si le report d'imposition d'une plus-value s'applique de plein droit, dès lors que sont satisfaites les conditions fixées par le législateur, le montant de l'imposition est arrêté, sans option du contribuable, selon des règles, en particulier de taux, qui peuvent ne pas être celles applicables l'année de la réalisation de la plus-value. Dans cette hypothèse, seul un motif d'intérêt général suffisant peut justifier que la plus-value soit ainsi rétroactivement soumise à des règles de liquidation qui n'étaient pas déterminées à la date de sa réalisation. En l'espèce aucun motif d'intérêt général ne justifie l'application rétroactive de telles règles de liquidation à une plus value placée, antérieurement à leur entrée en vigueur, en report d'imposition obligatoire.

Par suite, les dispositions des 1 ter et 1 quater de l'article 150-0 D du code général des impôts ne sauraient, sans porter atteinte aux situations légalement acquises, avoir pour objet ou pour effet de conduire à appliquer des règles d'assiette et de taux autres que celles applicables au fait générateur de l'imposition de plus-values mobilières obligatoirement placées en report d'imposition. Sous cette réserve, le grief tiré de la méconnaissance de l'article 16 de la Déclaration de 1789 doit être écarté.

(2016-538 QPC, 22 avril 2016, cons. 15, JORF n° 0097 du 24 avril 2016, texte n° 30)

ORDRE PUBLIC ET DROIT PÉNAL

Article 1741 du code général des impôts

Les mots « soit qu'il ait volontairement dissimulé une partie des sommes sujettes à l'impôt » figurant dans la première phrase du premier alinéa de l'article 1741 du code général des impôts ne sauraient, sans méconnaître le principe de nécessité des délits, permettre qu'un contribuable qui a été déchargé de l'impôt par une décision juridictionnelle devenue définitive pour un motif de fond puisse être condamné pour fraude fiscale. Sous cette réserve, les dispositions contestées de l'article 1741 du code général des impôts prises isolément ne sont pas contraires aux principes de nécessité des délits et des peines et de proportionnalité des peines.

(2016-545 QPC, 24 juin 2016, cons. 13 et 14, JORF n° 0151 du 30 juin 2016, texte n° 110)

Si l'éventualité que deux procédures soient engagées peut conduire à un cumul de sanctions, le principe de proportionnalité implique qu'en tout état de cause le montant global des sanctions éventuellement prononcées ne dépasse pas le montant le plus élevé de l'une des sanctions encourues. Sous cette réserve, l'application combinée des dispositions de l'article 1729 et des dispositions contestées de l'article 1741 du code général des impôts ne méconnaît pas le principe de proportionnalité des peines.

(2016-545 QPC, 24 juin 2016, cons. 24, JORF n° 0151 du 30 juin 2016, texte n° 110)

Le principe de nécessité des délits et des peines ne saurait interdire au législateur de fixer des règles distinctes permettant l'engagement de procédures conduisant à l'application de plusieurs sanctions afin d'assurer une répression effective des infractions. Ce principe impose néanmoins que les dispositions de l'article 1741 ne s'appliquent qu'aux cas les plus graves de dissimulation frauduleuse de sommes soumises à l'impôt. Cette gravité peut résulter du montant des droits fraudés, de la nature des agissements de la personne poursuivie ou des circonstances de leur intervention.

(2016-545 QPC, 24 juin 2016, cons. 21, JORF n° 0151 du 30 juin 2016, texte n° 110)

Les mots « soit qu'il ait volontairement dissimulé une part des sommes sujettes à l'impôt » figurant dans la première phrase du premier alinéa de l'article 1741 du code général des impôts ne sauraient, sans méconnaître le principe de nécessité des délits, permettre qu'un contribuable qui a été déchargé de l'impôt par une décision juridictionnelle devenue définitive pour un motif de fond puisse être condamné pour fraude fiscale. Sous cette réserve, les dispositions contestées de l'article 1741 du code général des impôts prises isolément ne sont pas contraires aux principes de nécessité des délits et des peines et de proportionnalité des peines.

(2016-546 QPC, 24 juin 2016, cons. 13 et 14, JORF n° 0151 du 30 juin 2016, texte n° 111)

Le principe de nécessité des délits et des peines ne saurait interdire au législateur de fixer des règles distinctes permettant l'engagement de procédures conduisant à l'application de plusieurs sanctions afin d'assurer une répression effective des infractions. Ce principe impose néanmoins que les dispositions de l'article 1741 ne s'appliquent qu'aux cas les plus graves de dissimulation frauduleuse de sommes soumises à l'impôt. Cette gravité peut résulter du montant des droits fraudés, de la nature des agissements de la personne poursuivie ou des circonstances de leur intervention.

(2016-546 QPC, 24 juin 2016, cons. 21, JORF n° 0151 du 30 juin 2016, texte n° 111)

Si l'éventualité que deux procédures soient engagées peut conduire à un cumul de sanctions, le principe de proportionnalité implique qu'en tout état de cause le montant global des sanctions éventuellement prononcées ne dépasse pas le montant le plus élevé de l'une des sanctions encourues. Sous cette réserve, l'application combinée des dispositions de l'article 1729 et des dispositions contestées de l'article 1741 du code général des impôts ne méconnaît pas le principe de proportionnalité des peines.

(2016-546 QPC, 24 juin 2016, cons. 24, JORF n° 0151 du 30 juin 2016, texte n° 111)