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Chronique de droit public

GAHDOUN Pierre-Yves

Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel n° 48 - juin 2015 - p. 209 à 220

Conseil constitutionnel, 12 février 2015, n° 2015-710 DC
Ordonnance – Article 38 de la Constitution – Code civil – Réforme du droit des contrats

La réforme tant attendue du droit des contrats est enfin arrivée ! Après des années d’errements législatifs, des rapports successifs, des débats engagés et d’innombrables écrits sur la question, le Parlement vient de voter le dernier acte d’un feuilleton qui dure maintenant depuis dix ans : la loi du 16 février 2015 autorise le Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance pour « moderniser et simplifier le droit dans les domaines de la justice et des affaires intérieurs ». Un titre elliptique qui ne dit rien, ou si peu, sur l’importance de la réforme souhaitée : introduction de l’imprévision, notion de violence économique, bonne foi dans la formation des conventions, fixation unilatérale du prix, consécration de la liberté contractuelle, suppression de la cause, et tant d’autres aspects plus ou moins inspirés de la jurisprudence récente de la Cour de cassation. Beaucoup se félicitent de cette réforme : il fallait un toilettage de notre législation pour s’inscrire dans le sillage d’un droit européen des contrats qui avance à grands pas et pour moderniser un texte de 1804 forcément éloigné des aspirations actuelles des Français.

Beaucoup se félicitent donc, mais d’autres protestent. Non pas vraiment sur la réforme elle-même – il faudra bien entendu examiner et discuter chacun des alinéas du projet –, mais sur la méthode, celle de l’ordonnance en lieu et place de la « vraie » loi, la loi du Parlement, poumon de la démocratie. Au départ de la fronde, les parlementaires eux-mêmes : un vote négatif au Sénat presque à l’unanimité (346 voix contre 1 !) dans un hémicycle aujourd’hui à droite, mais qui compte encore de nombreux représentants de la majorité. La doctrine également a su manier une plume acérée contre l’absence de texte législatif : « le juriste éprouve le sentiment qu’il est absolument anormal et gravement préjudiciable qu’une telle réforme aussi fondamentale et d’une telle envergure puisse être opérée par voie d’ordonnance, autrement dit à la sauvette et sans aucun débat contradictoire »(1). Ce à quoi la Chancellerie répondait que le débat aurait bien lieu pendant toute la durée de confection du texte final et que chacun serait libre d’égrainer ses commentaires sur un projet déjà largement diffusé dans la presse « grand public ». Insuffisant répondent les sénateurs frondeurs qui ont saisi le Conseil constitutionnel de cette épineuse question : peut-on réformer l’un des secteurs les plus fondamentaux de la société française – le droit des contrats – par voie d’ordonnance ?

Oui répond le Conseil dans sa décision n° 2015-710 DC du 12 février 2015 : « Considérant que, d’une part, l’article 34 de la Constitution place les principes fondamentaux des obligations civiles dans le domaine de la loi ; que, d’autre part, l’habilitation conférée par les dispositions précitées à réformer par ordonnance le droit commun des contrats, le régime des obligations et le droit de la preuve est précisément définie dans son domaine et dans ses finalités ; que, par suite, cette habilitation ne méconnaît pas les exigences qui résultent de l’article 38 de la Constitution ». En guise de mise en garde, le Conseil précise également, dans le considérant suivant, que la loi de ratification devra respecter le principe de non-rétroactivité des lois en général, et en particulier en matière de contrats.

D’un point de vue strictement juridique, la solution retenue par le Conseil n’est guère discutable. D’abord parce que l’article 38 de la Constitution n’impose aucune sorte de condition au législateur lorsqu’il souhaite « déléguer » ses compétences au Gouvernement par le biais des ordonnances. À vrai dire, c’est le Conseil lui-même qui a encadré cette liberté en créant, au gré de ses considérants, des garde-fous et des limites à la mise en œuvre de l’article 38. Pour l’essentiel : l’habilitation doit être suffisamment précise afin de borner la direction à suivre par le pouvoir exécutif. Ensuite parce que c’est le Parlement lui-même qui consent et accepte la délégation au profit du Gouvernement ; il serait curieux de plaider en faveur d’une démocratie trop affaiblie par les ordonnances et dénoncer dans le même temps le vote d’une loi d’habilitation qui est l’expression même de cette démocratie. Enfin parce que, très concrètement, la loi ne s’écarte guère de ce qui est généralement fait en matière d’habilitation : certes, elle ne précise pas dans le détail ce que sera la future législation – ce serait au demeurant une « injonction » inconstitutionnelle –, mais elle fixe tout de même un ensemble de treize points, justement soulignés par le Conseil, et sur lesquelles l’ordonnance devra intervenir. Tout cela milite donc, juridiquement, en faveur de la solution finalement retenue.

Cela posé, au-delà du droit, il y a aussi l’esprit. Si l’esprit de 1958 correspondait bien à la lettre de l’article 38 de la Constitution, celui de 2015 s’en écarte sensiblement. Aujourd’hui, juristes et politiques plaident en faveur d’un retour du Parlement après des années d’effacement. La réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008 est allée dans ce sens en favorisant les droits de l’opposition, en supprimant l’ordre du jour prioritaire, en limitant le « 49.3 », en réactivant les résolutions et les lois de programmation, en renforçant le rôle et le nombre de commissions parlementaires, en supprimant aussi la ratification implicite des ordonnances qui délestait le législateur de son pouvoir de contrôle du Gouvernement. Le Conseil lui-même a également œuvré à ce retour avec notamment la jurisprudence sur les incompétences négatives. Aujourd’hui, une évolution juridique fondamentale pour le quotidien des Français est programmée et le Parlement fait le choix de ne pas légiférer au nom de l’efficacité et de la rapidité. On comprend bien la déception et la colère des sénateurs. La grande réforme du droit des contrats est enfin arrivée mais par la petite porte !

Conseil constitutionnel, 6 mars 2015, n° 2014-455 QPC
Astreinte – Pouvoirs du juge administratif – Droit au juge – Responsabilité de l’État

Dans sa décision n° 2014-455 QPC du 6 mars 2015, le Conseil s’intéresse pour la première fois à la question de « l’astreinte administrative ». Ce mécanisme permet au juge de prononcer une condamnation pécuniaire à l’encontre d’une personne publique lorsque cette dernière n’applique pas, ou mal, une décision juridictionnelle. Fort heureusement, dans la majorité des cas, l’Administration met en œuvre sans protestations les décisions de justice, mais il arrive ponctuellement qu’elle traîne les pieds pour toutes sortes de raisons et que le juge soit dans l’obligation de « l’astreindre » au paiement d’une somme d’argent.

Avec une particularité : l’article L. 911-8 du Code de la justice administrative (CJA) permet à la juridiction de ne pas donner tout ou partie de l’astreinte à l’adversaire de l’Administration dans le procès. Autrement dit, le juge administratif peut décider que la victime du retard n’aura droit à aucune compensation. La raison de cette sévérité apparente est que l’astreinte n’est pas – en réalité – une « compensation » : elle ne répare pas un défaut d’exécution, elle est simplement un instrument pour forcer l’autorité publique à respecter le jugement prononcé. Et n’étant pas une compensation, elle ne doit jamais enrichir de façon disproportionnée la partie opposée.

Ce qui soulève une difficulté importante lorsqu’il s’agit de l’État : d’un côté, le juge ne doit pas fixer une astreinte qui enrichisse excessivement les justiciables ; de l’autre, il doit envisager un montant qui soit à la hauteur des capacités financières d’une autorité étatique. Cruel dilemme Pour répondre à ce problème, le législateur a donc voté une disposition qui permet au juge d’affecter l’astreinte non pas à la partie adverse, mais « au budget de l’État » nous dit l’article L. 911-8 du CJA. Là se situe le paradoxe dénoncé par la QPC : ce que l’État donne d’une main avec l’astreinte, peut-il le reprendre d’une autre main en affectant la somme allouée à son « budget » ?

À cette question, le Conseil répond par l’affirmative et rejette la QPC en soulignant d’abord que, « selon la jurisprudence constante du Conseil d’État, ( ) l’article L. 911-8 ne s’applique pas lorsque l’État est débiteur de l’astreinte ». Mais surtout : en poursuivant son argumentation, le Conseil estime que « le respect des exigences découlant de l’article 16 de la Déclaration de 1789 (le droit au juge) est garanti par le pouvoir d’appréciation ainsi reconnu au juge depuis le prononcé de l’astreinte jusqu’à son versement postérieur à la liquidation ; qu’au surplus, la responsabilité de l’État peut, le cas échéant, être mise en cause en réparation du préjudice qui résulterait de l’exécution tardive d’une décision de justice ». Autrement dit, pour le juge constitutionnel, il existe deux raisons qui justifient et expliquent le « paradoxe » de l’article L. 911-8 du CJA : le « pouvoir d’appréciation ainsi reconnu au juge » et la possibilité d’engager « la responsabilité de l’État » ultérieurement.

La première raison paraît tout à fait légitime : dans le quotidien de la justice et des procès, le juge tient une place fondamentale et son évaluation des éléments d’espèces peuvent le conduire, très naturellement, à réduire la part de l’astreinte accordée à la partie adverse ou au contraire à l’augmenter. Seule une appréciation particulière, une appréciation d’espèce, in concreto, permet de garantir les droits constitutionnels du justiciable. En définitive, selon le Conseil, c’est justement parce que le juge peut moduler, adapter, aménager l’astreinte que les droits et libertés sont respectés.

La seconde raison semble un peu moins justifiée et son introduction dans un « surplus » montre qu’elle n’était peut-être pas indispensable. Le Conseil estime en effet que le paradoxe de l’article L. 911-8 du CJA se compense par la possibilité dont dispose la partie adverse d’engager une action en responsabilité contre « une exécution tardive d’une décision de justice » par l’État. À notre sens, ce mécanisme de responsabilité ne permet pas de « sauver » l’article L. 911-8 du CJA : ce n’est pas parce que le justiciable peut se retourner contre l’État retardataire que la disposition critiquée est moins attentatoire aux libertés. L’un et l’autre ne sont en rien liés. Ou alors il faut supposer que toute inconstitutionnalité est a priori justifiée par la possibilité offerte aux administrés d’engager la responsabilité de l’État du fait des lois, ce qui serait un peu étonnant ! Certes, le mécanisme qui permet de condamner l’État retardataire offre à la partie adverse un moyen de compensation du préjudice subi, mais il ne justifie pas, il ne rend pas moins « inconstitutionnelle », la disposition incriminée.

Il reste que, ce faisant, le Conseil a consacré dans cette décision une nouvelle composante du « droit au juge » : la possibilité d’ordonner des astreintes en cas de non-exécution des décisions de justice. Sur le plan des principes – et du droit processuel en général –, l’avancée est notable et elle mérite d’être saluée. Dans le quotidien de la justice, en revanche, il est peu probable que ce nouveau droit soit beaucoup mobilisé puisque, précisément, le Code de procédure civile offre déjà à « tout juge, même d’office », la possibilité d’ordonner des astreintes (art. L. 131-1). Au demeurant, pour ce qui est du cas d’espèce, peut-être le justiciable aurait-il eu davantage de succès en mobilisant non pas le droit au juge, mais le principe d’égalité en raison de la différence de traitement entre les justiciables victimes d’un retard de l’État et les justiciables victimes d’un retard des collectivités territoriales. Mais c’est déjà un autre débat !

Conseil constitutionnel, 26 mars 2015, n° 2015-459 QPC
Services publics nationaux – 9e alinéa du Préambule de 1946 – Catégorie des « droits et libertés que la Constitution garantit »

Dans sa décision n° 2015-459 QPC du 26 mars 2015, le Conseil refuse d’intégrer le 9e alinéa du Préambule de 1946 dans la catégorie des « droits et libertés que la Constitution garantit ». Il n’est donc pas possible, pour les justiciables, d’invoquer cette disposition constitutionnelle au titre d’une QPC.

Évidemment, la formulation du 9e alinéa donne raison au Conseil : « Tout bien, toute entreprise, dont l’exploitation a ou acquiert les caractères d’un service public national ou d’un monopole de fait, doit devenir la propriété de la collectivité ». Nul droit, nulle liberté dans cette disposition, simplement l’obligation (« doit ») pour un service public national ou un monopole de fait de « devenir la propriété de la collectivité ». En dépit de cela, il nous semble pourtant que le Conseil pouvait aller dans un sens différent en retenant plusieurs éléments.

D’abord, ce n’est pas parce que le texte ne contient pas les mots « droit » ou « liberté » qu’il est automatiquement exclu de la catégorie des « droits et libertés que la Constitution garantit ». Par exemple, juste au dessus, le 8e alinéa est tout à fait applicable dans le contentieux QPC, y compris dans son volet « gestion des entreprises »(2), et il ne fait nullement mention des termes « droit » et « liberté ».

Ensuite, il ne faut pas réduire le contentieux de la QPC aux seuls droits de première génération, les « droits de », qui offrent une prérogative personnelle et immédiate aux individus. Ceux-là, à vrai dire, ne posent guère de difficultés. Mais, à juste titre, le Conseil n’a jamais limité la catégorie des « droits et libertés que la constitution garantit » à cette génération de droit. Il a notamment accepté que de nombreuses dispositions de la Charte de l’environnement soient applicables en la matière(3), par exemple l’article 3 dont on admettra sans peine qu’il est loin de consacrer de façon évidente un « droit » ou une « liberté »(4) !

Enfin, et peut-être surtout, en écartant le 9e alinéa du champ d’application de la QPC, le Conseil prive les requérants d’un argument de constitutionnalité non négligeable. Certes, les décisions rendues dans ce domaine sont relativement rares, mais elles ont donné lieu à de nombreux commentaires et des débats engagés dans les revues juridiques(5). Il s’agit, pour résumer, de la question essentielle de savoir si un service public national peut, ou ne peut pas, être privatisé par exemple en matière d’énergie, en matière de transport ou en matière de télécommunication. Or, en écartant le 9e alinéa du champ d’application de la QPC, le Conseil empêche les justiciables de participer directement à ce débat.

Par le passé, on a parfois reproché au juge constitutionnel une lecture un peu timide du Préambule de 1946 ; certains auteurs n’hésitant pas à parler d’une « réécriture » du texte constitutionnel(6). Sans aller jusque-là, il est bien certain que la décision du 26 mars 2015 limite sensiblement la force et la portée du 9e alinéa.

Conseil d’État, 21 janvier 2015, 1re et 6e sous-sections, n° 382902
Prescription – Urbanisme – Rétroactivité – Sécurité juridique

La question de l’application de la loi dans le temps est devenue, en quelques années, une question primordiale dans le contentieux constitutionnel des droits et libertés. Elle a nourri une quantité importante de QPC dans toutes sortes de domaines, dernièrement encore en matière de baux d’habitation dans les logements à loyers modérés(7). Évidemment, le droit administratif n’échappe pas à cette tendance et la décision du Conseil d’État du 21 janvier 2015 « Société 2B » en est une illustration.

En l’espèce, il était question d’une prescription en matière d’urbanisme instaurée par la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009. L’article L. 111-3 du Code de l’urbanisme prévoit en effet que les propriétaires d’un immeuble détruit peuvent le reconstruire à l’identique si le bâtiment a été « détruit ou démoli depuis moins de dix ans ». La société « 2B » s’est prévalue de cette disposition devant le maire de la commune d’Aigremont afin de reconstruire un complexe sportif qui avait été détruit en 1998 suite à des intempéries. Mais le maire refuse en pointant l’écoulement d’un délai de dix ans depuis la date du sinistre. La société « 2B » conteste la décision du maire et saisit le Tribunal administratif, puis la Cour administrative d’appel de Versailles, sans obtenir un jugement favorable. Le Conseil d’État intervient alors en cassation. À cette occasion, le requérant introduit une QPC portant sur la constitutionnalité de l’article L. 111-3 du Code de l’urbanisme. Selon le requérant, l’interprétation faite de cette disposition par le maire, ainsi que par le Tribunal administratif et la Cour administrative d’appel, porte atteinte à la « sécurité juridique » puisque le délai de dix ans est décompté à partir du sinistre, donc rétroactivement, et non à compter de la promulgation de la loi, c’est-à-dire 2009.

Dans sa décision, le Conseil d’État ne renvoie pas la QPC, mais il donne raison au justiciable et annule l’arrêt de la Cour administrative d’appel. Pour le Conseil d’État, en effet, le délai de prescription ne doit pas partir de la destruction du bien, mais « à compter de la date d’entrée en vigueur de la loi du 12 mai 2009 ». Autrement dit, la société « 2B » est tout à fait en droit de demander un nouveau permis de construire au maire de sa commune et il ne peut lui être opposé la prescription décennale. Ce faisant, puisque l’article L. 111-3 du Code de l’urbanisme est interprété par le Conseil d’État dans un sens favorable au requérant – ce qui n’était pas le cas devant les autres juges –, les griefs soulevés dans la QPC « manquent en fait » selon les mots du rapporteur public Madame Maud Vialettes. La situation est donc assez originale puisque, d’un côté, la QPC est rejetée mais, de l’autre, le justiciable obtient gain de cause quant à la protection de ses droits et libertés !

Quels enseignements en tirer ?

Sur le fond, la solution retenue par le Conseil d’État semble parfaitement légitime. Dès lors que le législateur n’a pas lui-même fixé une date d’application de la loi, le juge se trouve dans une situation où il doit trouver un mécanisme permettant de préserver au mieux les droits des justiciables sans dénaturer le dispositif législatif. Ce qui est assez délicat : l’article L. 111-3 du Code de l’urbanisme instaure une prescription décennale et limite donc, nécessairement, un « droit » qui n’était pas conditionné sous l’ancienne législation. Ici, la seule solution juridiquement acceptable est celle retenue par le Conseil d’État : si le juge fait courir le délai de prescription depuis la date de la destruction du bien, et non depuis la date de promulgation de la loi, il instaure inévitablement une rétroactivité puisqu’une disposition votée en 2009 régit une situation qui s’est déroulée en 1998. Il fallait donc retenir le principe de l’application immédiate. Comme le dit le doyen Roubier lui-même « si la loi déclare un bien ou un droit prescriptible, alors qu’il ne l’était pas jusque-là, la prescription doit commencer aussitôt, sans naturellement qu’il puisse être tenu compte du temps écoulé sous la loi antérieure »(8).

Mais au-delà du problème de fond, se pose également la question du non-renvoi de la QPC. En l’espèce, l’origine des difficultés posées par l’article L. 111-3 du Code de l’urbanisme se trouve dans le silence du législateur quant au droit transitoire applicable. Ce silence oblige le juge à interpréter, à traduire, à lire la loi dans une direction ou dans une autre. Si cette lecture se fait dans le sens de l’application de la prescription au jour de la destruction du bien : la loi est certes rétroactive, mais elle est également plus respectueuse des intérêts « publics » qui peuvent se dévoiler face à des propriétaires parfois trop lents(9). Si la lecture se fait dans le sens de l’application de la disposition à partir de 2009 : la sécurité juridique est parfaitement respectée et la société 2B peut légitimement obtenir un permis de construire pour bâtir un nouveau complexe sportif. Mais fallait-il vraiment choisir ? En favorisant une interprétation plutôt qu’une autre et en ne renvoyant pas la QPC au Conseil constitutionnel, le Conseil d’État fait une lecture neutralisante qui « déresponsabilise » le législateur et qui, paradoxalement, l’encourage à voter des lois peu respectueuses du droit transitoire et des situations en cours. Parfois, les censures ont des vertus pédagogiques !

Revue doctrinale

Articles relatifs aux décisions du Conseil constitutionnel

25 avril 2014 2014-392 QPC

Province Sud de Nouvelle-Calédonie [Loi adoptée par référendum – Droit du travail en Nouvelle-Calédonie]

– Verpeaux, Michel. « Les contributions de la Nouvelle-Calédonie au droit public », La Semaine juridique. Administrations et collectivités territoriales, 16 février 2015, n° 7, p. 18-20.

20 juin 2014 2014-405 QPC

Commune de Salbris [Répartition des sièges de conseillers communautaires entre les communes membres d’une communauté de communes ou d’une communauté d’agglomération]

– Briant, Vincent de. « Conseil constitutionnel et intercommunalité : la décision du 20 juin 2014 et ses effets », Pouvoirs locaux : les cahiers de la décentralisation, décembre 2014 - janvier 2015, n° 103, p. 98-103.

– Levavasseur, Philippe. « La gestion politique “consensuelle” de l’intercommunalité ne saurait s’abstraire du principe constitutionnel d’égalité devant le suffrage », Revue administrative, novembre-décembre 2014, n° 402, p. 591-597.

9 septembre 2014 2014-411 QPC

Commune de Tarascon [Application immédiate de certaines dispositions du projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles]

– Defix, Sébastien. « La procédure d’application anticipée d’un projet de plan de prévention des risques naturels est conforme à la Constitution », Énergie – environnement – infrastructures : actualité, pratiques et enjeux, janvier 2015, n° 1, p. 54-58.

– Delaunay, Bénédicte. « Une nouvelle limitation du champ de l’article 7 de la Charte de l’environnement », Actualité juridique. Droit administratif, 9 mars 2015, n° 8, p. 468-471.

11 septembre 2014 2014-3 LOM

Prescription des créances sur les personnes publiques en Polynésie française

– Debène, Marc ; Moyrand, Alain. « “Déclassement outre-mer” : l’extension à la collectivité d’outre-mer de Polynésie française de la législation relative à la prescription des créances sur les personnes publiques méconnaît les compétences de cette collectivité », La Semaine juridique. Administrations et collectivités territoriales, 2 mars 2015, n° 9, p. 29-31.

26 septembre 2014 2014-416 QPC

Association France Nature Environnement [Transaction pénale sur l’action publique en matière environnementale]

– Guerin, Martin. « La transaction pénale environnementale constitutionnelle », Énergie – environnement – infrastructures : actualité, pratiques et enjeux, janvier 2015, n° 1, p. 43-46.

– Robert, Jacques-Henri. « Transaction en matière d’environnement », Revue de science criminelle et de droit pénal comparé, octobre-décembre 2014, n° 4, p. 785-788.

14 novembre 2014 2014-427 QPC

M. Mario S. [Extradition des personnes ayant acquis la nationalité française]

– Chassang, Céline. « Français d’origine et français d’acquisition face à l’extradition : la distinction validée par le Conseil constitutionnel », Actualité juridique. Pénal, février 2015, n° 2, p. 86-89.

21 novembre 2014 2014-4 LP

Loi du pays relative à l’accès à l’emploi titulaire des fonctions publiques de Nouvelle-Calédonie

– Pastorel, Jean-Paul. « L’objectif constitutionnel de préférence locale en matière d’emploi en Nouvelle-Calédonie », Actualité juridique. Droit administratif, 9 février 2015, n° 4, p. 224-226.

2014-429 QPC

M. Pierre T. [Droit de présentation des notaires]

– Du Marais, Bertrand. « Le Conseil constitutionnel français écarte la qualification “d’emploi public” pour l’activité des notaires mais affirme qu’ils “participent à l’exercice de l’autorité publique” », Concurrences : revue des droits de la concurrence, janvier-mars 2015, n° 2015-1, p. 215-218.

– Gauthier, Catherine. « “Beaucoup de bruit pour rien” : le droit de présentation des notaires devant le Conseil constitutionnel », Actualité juridique. Droit administratif, 23 février 2015, n° 6, p. 363-367.

– Laurent-Bonne, Nicolas. « Le droit de présentation des notaires : un privilège d’un autre temps », Recueil Dalloz, 29 janvier 2015, n° 4, p. 251-255.

– Verpeaux, Michel. « Notaires : les officiers ministériels ne sont pas des agents publics », La Semaine juridique. Édition générale, 12 janvier 2015, n° 1-2, p. 40-43.

28 novembre 20142014-432 QPC

M. Dominique de L. [Incompatibilité des fonctions de militaire en activité avec un mandat électif local]

– Verpeaux, Michel. « Les militaires et les élections », La Semaine juridique. Administrations et collectivités territoriales, 2 mars 2015, n° 9, p. 36-41.

– Videlin, Jean-Christophe. « L’incompatibilité des fonctions de militaire avec le mandat de conseiller municipal jugée inconstitutionnelle », Droit administratif, février 2015, n° 2, p. 30-32.

11 décembre 2014 2014-705 DC

Résolution tendant à modifier le règlement de l’Assemblée nationale

– Derosier, Jean-Philippe. « Le Conseil constitutionnel, toujours gardien de l’exécutif... et garant de la démocratie : À propos de la décision du 11 décembre 2014, Résolution tendant à modifier le règlement de l’Assemblée nationale », La Semaine juridique. Administrations et collectivités territoriales, 16 février 2015, n° 7, p. 21-23.

– Gicquel, Jean-Éric. « La modification du règlement de l’Assemblée nationale du 28 novembre 2014 ». Une réforme soumise à l’appréciation du Conseil constitutionnel. La Semaine juridique. Édition générale, 2 février 2015, n° 5, p. 206-212.

15 janvier 2015 2014-709 DC

Loi relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral

– Verpeaux, Michel. « Les nouvelles régions sont constitutionnelles », La Semaine juridique. Administrations et collectivités territoriales, 23 mars 2015, n° 12, p. 26-30.

16 janvier 2015 2014-438 QPC

SELARL GPF Claeys [Conversion d’office de la procédure de sauvegarde en une procédure de redressement judiciaire]

– Roussel-Galle, Philippe. « La saisine d’office, revenue devant le Conseil constitutionnel, crée la surprise », Bulletin d’actualité des greffiers, février 2015, n° 83, p. 1-3.

Articles thématiques

Droit administratif– Bon, Pierre. « Vingt-cinq ans de contentieux constitutionnel de l’expropriation », Revue française de droit constitutionnel, décembre 2014, n° 100, p. 803-829.

– Cattan, Jean. « La nouvelle procédure de sanction de l’ARCEP, une procédure en ordre de marche » in : Chronique de l’Atelier Jurisdata des Agences. Droit administratif, janvier 2015, n° 1, p. 15-17.

Droit de l’environnement– Fonbaustier, Laurent. « La participation du public. [Dossier : Charte de l’environnement : l’âge de raison] », Actualité juridique. Droit administratif, 16 mars 2015, n° 9, p. 517-522.

– Jégouzo, Yves. « La Charte de l’environnement, dix ans après. [Dossier : Charte de l’environnement : l’âge de raison] », Actualité juridique. Droit administratif, 16 mars 2015, n° 9, p. 487-492.

– Huglo, Christian. « La Charte de l’environnement a dix ans : trop tôt pour faire un bilan mais pas trop tard pour continuer à ouvrir des perspectives ? », Énergie – environnement – infrastructures : actualité, pratiques et enjeux, mars 2015, n° 3, p. 1-2.

– Roblot-Troizier, Agnès. « Les clairs-obscurs de l’invocabilité de la Charte de l’environnement. [Dossier : Charte de l’environnement : l’âge de raison] », Actualité juridique. Droit administratif, 16 mars 2015, n° 9, p. 493-502.

– Trébulle, François-Guy. « La responsabilité environnementale, dix ans après l’entrée en vigueur de la Charte. [Dossier : Charte de l’environnement : l’âge de raison] », Actualité juridique. Droit administratif, 16 mars 2015, n° 9, p. 503-509.

Droit parlementaire / Légistique– Bachert, Audrey. « L’utilisation politique de la référence au Conseil constitutionnel dans le cadre de la procédure législative », Politeia, automne 2014, n° 26, p. 287-334.

– Geynet, Chloë. « L’obstruction parlementaire à travers la jurisprudence du Conseil constitutionnel », Politeia, automne 2014, n° 26, p. 399-415.

– Savonitto, Florian. « La violation de l’article 48 de la Constitution, la machine et la norme », Politeia, automne 2014, n° 26, p. 93-106.

Justice– Gaudemet, Yves. « Les réformes des professions juridiques réglementées et la Constitution », Les Annonces de la Seine, 12 mars 2015, n° 9, p. 22-25.

(1) Jean-Louis Harouel, Gérard Teboul, Olivier Tournafond, « Le droit des contrats réformé par ordonnance ? », D. 2014. 1099.
(2) CC, 7 octobre 2010, n° 2010-42 QPC, Rec. p. 278.
(3) CC, 23 novembre 2012, n° 2012-282 QPC, Rec. p. 596.
(4) « Toute personne doit ( ) prévenir les atteintes qu'elle est susceptible de porter à l'environnement ou, à défaut, en limiter les conséquences ».
(5) Not. CC, 16 janvier 1982, n° 81-132 DC, Loi de nationalisation, cons. 17.
(6) Gérard Quiot, « La révision de l'alinéa 9 du Préambule de la Constitution de 1946 par le Conseil constitutionnel », Les Petites Affiches, 7 mars 2007, n° 48, p. 4. V. également Norbert Foulquier et Frédéric Rolin, « Constitution et service public », Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, 1er octobre 2012, n° 37, p. 21.
(7) CC, 23 janvier 2015, n° 2014-441/442/443 QPC, JO 25 janvier 2015, p. 1151.
(8) Paul Roubier, Le droit transitoire, Conflits de lois dans le temps, 1960, Dalloz, 2008, p. 298 et p. 299.
(9) Initialement, la nouvelle rédaction de l’article L. 111-3 du Code de l’urbanisme avait une portée environnementale. En effet, l’ancien texte n’autorisait une reconstruction que dans le cas d’un « sinistre ». La nouvelle rédaction supprime cette condition et fixe, en même temps, un délai de dix ans pour reconstruire. De la sorte, il s’agit de « permettre au propriétaire d’un immeuble qui ne peut pas faire l’objet d’une réhabilitation, notamment pas selon des normes de développement durable bien précises en termes d’économie d’énergie, de pouvoir le démolir et le reconstruire même lorsqu’il dépasse le plafond de densité fixé par le plan local d’urbanisme » (L. Béteille, Sénat, séance du 24 mars 2009).