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Les objectifs de valeur constitutionnelle

Pierre de MONTALIVET - Maître de conférences à l'Université Panthéon-Assas (Paris II)

Cahiers du Conseil constitutionnel n° 20 - Juin 2006

À la suite de certaines constitutions étrangères qui font une large place aux objectifs imposés aux pouvoirs publics, le Conseil constitutionnel a consacré ce qu'il appelle les « objectifs de valeur constitutionnelle ». Ceux-ci font leur apparition explicite dans la décision n° 82-141 DC du 27 juillet 1982, dans laquelle le Conseil affirme qu'« il appartient au législateur de concilier [···] l'exercice de la liberté de communication telle qu'elle résulte de l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme, avec [···] les objectifs de valeur constitutionnelle que sont la sauvegarde de l'ordre public, le respect de la liberté d'autrui et la préservation du caractère pluraliste des courants d'expression socioculturels »(1).

Ce qui frappe au premier abord l'observateur, c'est l'ambivalence, l'incohérence et l'incertitude qui marquent les objectifs de valeur constitutionnelle. Les aveux de toute une partie de la doctrine soulignant la difficulté de cerner leur identité sont d'ailleurs très significatifs(2). Même la délégation française à la VIIe conférence des Cours constitutionnelles européennes de 1987 avouait ses propres hésitations en indiquant que les objectifs de valeur constitutionnelle « paraissent avoir pour fonction d'éviter de conférer un caractère absolu aux principes de valeur constitutionnelle »(3). D'une manière générale, que ce soit sur la détermination des objectifs de valeur constitutionnelle ou sur leurs fonctions, les avis divergent profondément, illustrant l'inexistence de consensus sur la plupart des aspects du sujet.

Ces appréciations différentes reflètent certaines ambiguïtés jurisprudentielles, elles-mêmes suscitées par certaines incohérences, du moins en apparence. Les exemples sont nombreux, qu'ils concernent la détermination des objectifs ou leur normativité. Il n'est qu'à citer la jurisprudence du Conseil constitutionnel concernant le rattachement textuel des objectifs, qui montre que la Haute instance rattache certains d'entre eux à des dispositions constitutionnelles mais ne le fait point pour d'autres. Encore plus significative est la démarche du Conseil, qui, tout en déduisant certains objectifs de droits et libertés constitutionnels, utilise ces mêmes objectifs afin de limiter l'exercice des droits et libertés. Les objectifs ont ainsi des allures de paradoxe, en ce qu'ils semblent tout à la fois protéger et limiter les droits fondamentaux(4).

La question se pose alors de l'unité des objectifs de valeur constitutionnelle. La tentation est forte de conclure avec certains auteurs au constat de l'éclatement de cette catégorie(5). Est-ce pourtant le cas ? Les objectifs seraient-ils dépourvus de toute unité ? Il semble possible de cerner les traits communs aux objectifs, tant en ce qui concerne leur détermination que leur normativité, de rechercher leur unité à travers leurs caractéristiques communes.

L'analyse révèle que les objectifs se caractérisent par une détermination ambiguë et par une normativité limitée. Ces deux traits communs aux objectifs ne sont cependant pas suffisants pour dégager une unité de la catégorie. Il manque le ou les éléments qui formeraient le trait d'union entre la détermination et la normativité.

La réponse implicitement adoptée par la majorité de la doctrine consiste à dire que les objectifs sont principalement, voire exclusivement, des instruments de limitation des droits fondamentaux(6). Les objectifs seraient dégagés par le Conseil constitutionnel afin de les concilier avec l'exercice de ces droits, au nom de l'intérêt général(7). Ce serait donc dans la limitation des droits qu'ils trouveraient leur unité. Cette réponse a le mérite de mettre en lumière une fonction essentielle des objectifs de valeur constitutionnelle, mais n'explique pas pourquoi ils sont rattachés en grande majorité aux dispositions constitutionnelles garantissant des droits et libertés, ni pourquoi ils bénéficient d'une fonction d'interdiction ou d'obligation à l'égard du législateur. Autrement dit, elle n'apporte qu'une explication partielle de leur détermination et de leur normativité.

Une autre réponse, plus appropriée, semble possible. C'est davantage dans la protection des droits fondamentaux constitutionnels que l'unité des objectifs peut être décelée. La détermination et la normativité des objectifs s'expliquent plus précisément par deux éléments : leur nature d'objectifs d'une part et leur caractère de conditions d'effectivité des droits et libertés constitutionnels d'autre part. Ces éléments permettent de conceptualiser les objectifs afin d'en proposer une nouvelle « grille de lecture ».

Les méthodes employées pour démontrer l'unité de la catégorie consistent notamment à distinguer les aspects génériques et spécifiques des objectifs. Le recours à la distinction entre genre et espèce est particulièrement utile pour appréhender certaines catégories de normes en général et les objectifs de valeur constitutionnelle en particulier. Lorsqu'ils sont envisagés génériquement, les objectifs sont entendus en tant que catégorie, en tant qu'ensemble comprenant tous les objectifs. À l'inverse, lorsqu'ils sont envisagés spécifiquement, chacun d'entre eux est visé, en tant qu'unité au sein de la catégorie ou de l'ensemble. Le recours à cette méthode permet de distinguer des traits communs concernant leur détermination.

Afin de conduire au constat de l'unité des objectifs de valeur constitutionnelle, il convient d'étudier successivement la détermination et la normativité des objectifs, pour voir que l'ambiguïté de leur détermination (I) et la limitation de leur normativité (II) s'expliquent par le fait que les objectifs constituent des conditions objectives et téléologiques d'effectivité des droits et libertés constitutionnels.

I. La détermination ambiguë des objectifs de valeur constitutionnelle

La détermination des objectifs de valeur constitutionnelle peut être envisagée du point de vue de sa nature et de son contenu. Ces deux aspects se caractérisent par l'ambiguïté. La nature de la détermination est ambivalente, car elle fait coexister création et interprétation, et son contenu est incertain, que l'on considère la catégorie ou les différents objectifs qui la composent. Cette ambiguïté trouve son origine dans la nature d'objectifs des objectifs de valeur constitutionnelle et surtout dans leur caractère de conditions d'effectivité des droits et libertés constitutionnels. En particulier, la part d'interprétation qui existe dans la détermination des objectifs provient du fait que ceux-ci découlent des droits et libertés. Cette caractéristique explique la démarche créatrice et interprétative du Conseil constitutionnel dans leur détermination (A) ainsi que l'incertitude de leur contenu (B).

A. Une démarche créatrice et interprétative

Pour une partie de la doctrine, les objectifs constitueraient des normes non écrites(8). Le Conseil constitutionnel serait donc leur créateur. Cette vision doit être contestée ou du moins fortement nuancée. La détermination des objectifs de valeur constitutionnelle est en réalité ambivalente, en ce qu'elle fait intervenir une double opération de création et d'interprétation.

1) Certaines catégories de normes constitutionnelles sont expressément consacrées par la Constitution. Par exemple, le Préambule de la Constitution de 1946 proclame en toutes lettres les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République et les principes politiques, économiques et sociaux particulièrement nécessaires à notre temps. Rien de tel n'existe concernant les objectifs de valeur constitutionnelle. Nulle part il n'est fait mention dans le texte constitutionnel d'une catégorie d'« objectifs » constitutionnels. Les objectifs, en tant que catégorie de normes, ne se rattachent explicitement ou implicitement à aucune disposition constitutionnelle. Par conséquent, c'est le Conseil constitutionnel qui a créé cette catégorie(9), en transposant en droit constitutionnel français une notion d'objectifs consacrée dans de nombreuses sources du droit - notamment en droit communautaire(10) - et dans des droits constitutionnels étrangers(11).

Cependant, la création opérée par le Conseil ne porte pas sur les objectifs eux-mêmes mais sur leur dénomination, sur la qualification d'« objectifs de valeur constitutionnelle ». Le Conseil est l'auteur de l'énoncé « objectifs de valeur constitutionnelle » et de l'inclusion des différents objectifs dans cette catégorie nominative. Il ne crée pas une ou des normes mais simplement une qualification qui sert à regrouper sous le même ensemble des normes diverses pour leur appliquer un régime juridique commun.

2) Si la catégorie des objectifs de valeur constitutionnelle est créée, l'analyse révèle que chaque objectif trouve son fondement dans un texte constitutionnel, car il constitue une condition d'effectivité de droits et libertés constitutionnels. L'objectif de pluralisme, par exemple, conditionne l'effectivité de la liberté d'expression, comme l'objectif de protection de la santé publique garantit celle du droit à la protection de la santé ou encore l'objectif de sauvegarde de l'ordre public conditionne celle de la liberté d'aller et venir et d'autres droits et libertés(12). Chaque objectif se rattache à un texte constitutionnel, car son énoncé est - parfois explicitement mais le plus souvent implicitement - consacré par celui-ci. Chaque objectif est donc une norme écrite, fruit d'une démarche interprétative. La consécration des objectifs s'explique par le souci d'assurer l'effectivité des droits et libertés constitutionnels. C'est parce que les objectifs sont de telles conditions qu'ils sont déduits des textes constitutionnels. En ce qui concerne plus particulièrement les objectifs dont l'énoncé est explicitement inscrit dans le texte constitutionnel, comme l'équilibre financier de la sécurité sociale, leur inscription dans la Constitution s'explique par le fait que le pouvoir constituant voit en ces normes de telles conditions d'effectivité.

L'ambivalence de la détermination des objectifs de valeur constitutionnelle entraîne logiquement l'incertitude de leur contenu.

B. L'incertitude du contenu des objectifs de valeur constitutionnelle

Cette incertitude affecte à la fois le contenu générique des objectifs, c'est-à-dire le contenu des objectifs en tant que catégorie, et leur contenu spécifique, c'est-à-dire le contenu des objectifs considérés individuellement.

1) On chercherait en vain un contenu précis commun aux objectifs, ceux-ci étant très différents sur le fond. Derrière cette diversité, une certaine unité peut être décelée à travers un rattachement direct ou indirect à l'intérêt général. Cette unité est néanmoins relative, puisque la notion d'intérêt général est marquée par l'imprécision.

À la diversité du contenu générique des objectifs de valeur constitutionnelle s'ajoute l'absence de définition jurisprudentielle de leurs conditions d'existence. Le Conseil constitutionnel, dans une décision de 1988, a défini les conditions d'existence des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, c'est-à-dire leurs critères d'identification(13). Le Conseil n'a pas fait de même concernant les objectifs et cette lacune contribue à l'incertitude de leur contenu générique. Cette incertitude est liée au lien réel mais ténu entre les objectifs et les textes constitutionnels et, partant, à la liberté du juge dans leur détermination.

Face au constat de l'absence de définition des conditions d'existence des objectifs, il est possible de proposer quelques critères d'identification, dont la formulation par le juge contribuerait à clarifier l'état du droit. Ces critères seraient les suivants : l'indication par la norme considérée d'une direction à suivre, d'un but à atteindre, se traduisant par une action à accomplir ; le caractère limité des destinataires de la norme, qui ne s'adresse qu'au législateur et plus généralement aux pouvoirs publics ; l'existence d'un fondement textuel ; le fait que la norme constitue une condition d'effectivité de droits ou libertés constitutionnels et enfin le caractère essentiel ou fondamental de l'objectif considéré.

2) L'incertitude touche non seulement le contenu générique des objectifs, mais également leur contenu spécifique. Le Conseil constitutionnel comme le juge ordinaire n'affirment pas toujours précisément l'existence et la dénomination de chaque objectif, à tel point que l'on observe des divergences doctrinales importantes sur ce sujet. Les incertitudes affectent tout d'abord la liste des objectifs consacrés. On peut dénombrer à l'heure actuelle douze objectifs : la sauvegarde de l'ordre public, le respect de la liberté d'autrui, le pluralisme(14), la transparence financière des entreprises de presse, la protection de la santé publique, la recherche des auteurs d'infractions, la lutte contre la fraude fiscale, la possibilité pour toute personne de disposer d'un logement décent, l'accessibilité et l'intelligibilité de la loi, l'équilibre financier de la sécurité sociale, l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives ainsi que l'égalité entre les collectivités territoriales(15).

Les incertitudes affectent également la liste des objectifs qui ne sont pas consacrés, ou du moins pas encore. Un certain nombre d'énoncés et de normes sont susceptibles d'être consacrés en tant qu'objectifs de valeur constitutionnelle. La question se pose ainsi de savoir si les droits-créances sont de tels objectifs, ce qu'affirme une partie de la doctrine(16). En réalité, l'application des conditions d'existence déterminées plus haut conduit à voir en eux non pas des objectifs de valeur constitutionnelle en eux-mêmes mais la source d'objectifs potentiels. Ainsi, par exemple, le « droit à l'emploi » ne constitue pas en lui-même un objectif constitutionnel mais sur le fondement de l'alinéa 5 du Préambule de la Constitution de 1946 qui le garantit, le Conseil pourrait dégager un objectif de « sauvegarde » ou de « maintien » de l'emploi.

La question se pose également en ce qui concerne la Charte de l'environnement, par laquelle le constituant a entendu, du moins selon certains travaux préparatoires, consacrer, à côté du principe de précaution, des objectifs constitutionnels(17). Cette Charte consacre à la fois des droits, des devoirs, des principes et des objectifs. Parmi les droits reconnus à chacun figurent le « droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé » et le « droit à l'information et à la participation », garantis aux articles 1er et 7. Les articles 2 à 4 fixent les devoirs qui pèsent sur « toute personne ». L'article 5 pose pour sa part le « principe de précaution ». Enfin, les objectifs qui pourraient être déterminés sur le fondement de la Charte en tant que buts assignés au législateur garantissant des droits constitutionnellement protégés sont finalement moins nombreux que ce que les travaux préparatoires pouvaient laisser accroire. Il s'agit de la protection de l'environnement et de la promotion du développement durable ainsi qu'éventuellement du développement économique et du progrès social, auxquels l'article 6 fait référence. Il peut également s'agir des obligations positives énoncées aux articles 8 et 9, c'est-à-dire de l'éducation et de la formation à l'environnement ainsi que du développement de la recherche et de l'innovation en matière environnementale. On peut néanmoins s'interroger sur le caractère fondamental de ces obligations et ainsi y voir de simples composantes de l'objectif plus général de protection de l'environnement(18). Quoi qu'il en soit, ces éléments montrent que la liste des objectifs de valeur constitutionnelle est variable et en continuelle expansion. En raison du caractère non écrit de la catégorie, du caractère implicite des objectifs et de la création possible par le pouvoir constituant de nouveaux objectifs, on est tenté de parler de « liste ouverte »(19).

Les incertitudes ne portent pas seulement sur la liste des objectifs mais également sur la signification de chacun d'eux. Les objectifs évoquent en effet des notions vagues, des « notions à contenu variable ». Ils participent d'une certaine manière au flou du droit, mettent en relief ses lacunes et ne sont pas sans lien avec les standards, qui se caractérisent par une certaine indétermination. Si tous les objectifs de valeur constitutionnelle sont marqués par une certaine ambiguïté, celle-ci varie néanmoins selon les objectifs : la signification des objectifs implicites est plus vaste et imprécise que celle des objectifs explicites consacrés à la suite de révisions constitutionnelles, dont le contenu est limité. Les objectifs dont le lien avec le texte est plus ténu ont logiquement un contenu plus souple que ceux qui sont prévus par le pouvoir constituant dans un domaine déterminé, le contenu de ces derniers étant limité par le texte constitutionnel. L'incertitude de la signification des objectifs est donc liée au caractère implicite de la grande majorité d'entre eux. Et à travers ce caractère implicite, c'est, ici encore, leur caractère de conditions d'effectivité des droits et libertés constitutionnels qui explique les incertitudes de leur détermination.

En définitive, les objectifs de valeur constitutionnelle trouvent une certaine unité dans l'ambiguïté de leur détermination, mais surtout dans les facteurs explicatifs de celle-ci, à savoir leur nature téléologique, finalisée, et leur caractère de conditions d'effectivité des droits et libertés constitutionnels. C'est moins la limitation de l'exercice des droits et libertés constitutionnels que leur protection qui est à l'origine des objectifs. Le souci d'assurer l'effectivité des droits et libertés, qui explique la détermination des objectifs, explique également leur normativité.

II. La normativité limitée des objectifs de valeur constitutionnelle

Certains auteurs estiment que les objectifs de valeur constitutionnelle ne constituent pas vraiment des normes mais seraient plutôt des « orientations », des « finalités assez générales » ou encore une simple « technique d'interprétation »(20). En réalité, chaque objectif constitue une norme, c'est-à-dire la signification d'un énoncé qui détermine ou vise à déterminer une conduite. Par leurs fonctions normatives d'interdiction, d'obligation et de permission, les objectifs déterminent en effet la « conduite » du législateur. Cette normativité - au sens d'aptitude à déterminer les conduites humaines - est liée au fait que les objectifs constituent des conditions d'effectivité des droits et libertés constitutionnels, puisque c'est pour assurer l'effectivité de ces droits et libertés que le Conseil constitutionnel reconnaît aux objectifs une telle normativité. Il convient néanmoins de distinguer l'existence de la normativité de sa consistance. Une norme peut ne déterminer la conduite que d'un nombre limité de personnes ou au contraire s'appliquer à une classe générale de personnes. Elle peut également déterminer une conduite d'une manière plus ou moins forte. Sous cet aspect, la normativité des objectifs de valeur constitutionnelle, si elle est réelle, n'en est pas moins limitée. N'étant que des objectifs et des conditions d'effectivité des droits et libertés, les objectifs ne pourraient prétendre bénéficier de la même portée normative que ces derniers. Ainsi, il convient d'étudier les fonctions normatives des objectifs de valeur constitutionnelle (A) puis la limitation de leur portée normative (B).

A. Les fonctions normatives des objectifs de valeur constitutionnelle

Les objectifs de valeur constitutionnelle déterminent la conduite du législateur de manière impérative, car ils commandent plus qu'ils ne recommandent. Ce caractère prescriptif se manifeste par leurs fonctions normatives d'interdiction, d'obligation et de permission.

1) Le Conseil constitutionnel considère que le législateur est soumis à l'interdiction de méconnaître les objectifs, ce qui signifie qu'il ne doit pas adopter de dispositions allant à leur encontre. Ainsi, chaque objectif implique certaines interdictions pesant sur le législateur. Contrairement à certaines affirmations doctrinales(21), le Conseil sanctionne la violation des objectifs, confirmant leur juridicité(22). L'interdiction de méconnaître les objectifs trouve sa justification dans le souci d'assurer l'effectivité des droits et libertés constitutionnels. C'est en effet parce que les objectifs sont des conditions d'effectivité des droits et libertés qu'ils ne peuvent être méconnus.

2) La normativité des objectifs de valeur constitutionnelle ne se réduit pas à leur fonction d'interdiction mais se déploie aussi dans leur fonction d'obligation. Alors que, pour une partie de la doctrine, il n'existe pas d'obligation de réaliser les objectifs de valeur constitutionnelle(23), le Conseil constitutionnel reconnaît que le législateur est soumis à l'obligation de mettre en œuvre les objectifs - du moins la quasi-totalité d'entre eux - et que ces derniers impliquent certaines obligations positives(24). Ainsi, les objectifs ne se contentent pas d'ordonner l'abstention du législateur mais lui commandent d'agir dans un sens déterminé. Ils déterminent non seulement négativement mais encore positivement sa « conduite ». N'étant pas de simples orientations mais des obligations, ils sont davantage que du « droit mou ».

Le Conseil constitutionnel sanctionne le non respect de l'obligation de réalisation des objectifs. Cette absence de réalisation peut fonder une déclaration de non conformité à la Constitution, comme en témoignent clairement les décisions n° 86-210 DC du 29 juillet 1986 et n° 86-217 DC du 18 septembre 1986(25). Le contrôle de la réalisation des objectifs de valeur constitutionnelle se rattache aux deux types de raisonnement permettant au Conseil de censurer les omissions du législateur. Le premier est fondé sur les règles de partage des compétences entre la loi et le règlement. Il s'agit de la sanction des incompétences négatives du législateur. Le second est fondé sur un contrôle de l'abrogation des lois antérieurement promulguées. Le contrôle par le Conseil des omissions du législateur confirme le fait que chaque objectif est une norme, dans la mesure où son énoncé est prescriptif.

Cette force obligatoire des objectifs trouve sa justification, comme en ce qui concerne l'interdiction, dans leur caractère de conditions d'effectivité des droits et libertés constitutionnels. Par les obligations qu'ils font peser à la charge des pouvoirs publics, les objectifs permettent aux droits fondamentaux constitutionnels de bénéficier d'effets positifs. Ainsi, ils constituent un moyen privilégié d'importer dans l'ordre juridique français la notion de garanties objectives des droits fondamentaux, que l'on trouve en Allemagne ou dans le droit issu de la Convention européenne des droits de l'homme.

3) La normativité des objectifs de valeur constitutionnelle se constate enfin au vu de leur fonction de permission. Selon le Conseil constitutionnel, le législateur peut limiter l'exercice des droits et libertés constitutionnels au nom de la réalisation des objectifs(26). L'exercice des droits et libertés doit être concilié avec les objectifs, révélant la dualité de ces derniers : ils limitent les droits et libertés et en garantissent l'effectivité. Ils les limitent ainsi qu'ils les protègent. La fonction des objectifs semble donc paradoxale.

Ce paradoxe n'est cependant qu'apparent. La cohérence fonctionnelle des objectifs s'organise autour de la fonction de protection des droits et libertés constitutionnels. En effet, si les objectifs permettent de limiter cet exercice, c'est non seulement parce qu'ils correspondent aux deux justifications avancées dans une société libérale pour limiter ces droits et libertés, à savoir le respect des droits d'autrui et l'intérêt général, mais aussi et surtout parce que l'obligation de mettre en œuvre les objectifs conduit à les concilier avec certains droits fondamentaux auxquels ils s'opposent. Par exemple, l'objectif de pluralisme permet de limiter la liberté de communication des émetteurs de l'information afin de rendre effective celle des récepteurs de l'information. De même, c'est pour réaliser l'objectif relatif au logement décent et ainsi assurer l'effectivité des droits qui en constituent le fondement que cet objectif permet au législateur d'apporter au droit de propriété les limitations qu'il estime nécessaires(27). Ainsi, la limitation de certains droits fondamentaux sert la protection d'autres droits fondamentaux. La permission créée par les objectifs de valeur constitutionnelle découle de l'obligation de les mettre en œuvre. Le souci d'assurer l'effectivité des droits et libertés constitutionnels garantis par les objectifs de valeur constitutionnelle conduit à concilier ces objectifs avec d'autres droits et libertés. Ceci empêche de ne voir dans les objectifs que des expressions de l'intérêt général faites au détriment des droits et libertés individuels.

Si les objectifs de valeur constitutionnelle constituent de véritables normes, à la fois prohibitives, impératives et permissives, leur portée normative rencontre néanmoins certaines limites.

B. La limitation de la portée normative des objectifs de valeur constitutionnelle

La vocation des objectifs de valeur constitutionnelle à déterminer les conduites est limitée, notamment par rapport à celle des droits fondamentaux. Leur portée normative est plus faible que celle de ces droits(28). Cette limitation affecte à la fois leurs fonctions d'interdiction, d'obligation et de permission. C'est la combinaison entre leur nature d'objectifs et de conditions d'effectivité des droits et libertés qui constitue le facteur explicatif de leur normativité limitée, qui se manifeste par leur inapplicabilité directe, par le fait qu'ils ne constituent que des obligations de moyens et enfin par leur protection globalement limitée.

1) Les objectifs ne déterminent la conduite que d'un nombre relativement restreint d'autorités puisqu'ils ne sont pas directement applicables. Ils s'appliquent aux pouvoirs publics et avant tout au législateur, mais non aux particuliers, car ils ne sont pas des droits mais de simples objectifs. Les interdictions, obligations et permissions qu'ils constituent portent essentiellement sur la production de normes. Ils ne peuvent, de ce point de vue, s'adresser qu'à des autorités édictant des normes générales, c'est-à-dire les pouvoirs publics. Ils ne constituent pas des droits fondamentaux parce qu'ils n'ont pas pour destinataires les citoyens et au-delà, toutes les personnes relevant d'un système juridique. Tels qu'ils apparaissent dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel, ils ne sont pas justiciables, car ils ne peuvent être invoqués par les particuliers devant les tribunaux. Cependant, la jurisprudence des juridictions ordinaires s'est parfois démarquée de cette position, de sorte que le principe de l'absence d'effet direct des objectifs doit être nuancé par le constat des hésitations du juge ordinaire.

2) La normativité limitée des objectifs de valeur constitutionnelle se manifeste également à travers le fait qu'ils ne constituent que des obligations de moyens. Les objectifs ne constituent pas des obligations de résultat, dans la mesure où ils n'obligent pas le législateur quant à un résultat précis et où leur mise en œuvre aboutit à un résultat aléatoire. La fonction d'obligation des objectifs est ainsi limitée. La limitation ne porte plus ici sur les conduites déterminées mais sur la détermination elle-même. Le caractère limité de cette détermination s'explique par la nature téléologique des objectifs, les normes finalisées déterminant plus souplement les conduites que d'autres normes. L'inexistence d'obligations de résultat s'accompagne d'une liberté quant au choix des moyens pour réaliser les objectifs_._ Le législateur dispose d'une marge d'appréciation dans leur mise en œuvre. Le caractère discrétionnaire de ce pouvoir conduit le Conseil constitutionnel à effectuer un contrôle portant principalement sur l'erreur manifeste d'appréciation.

3) La limitation de la portée normative des objectifs de valeur constitutionnelle apparaît enfin à travers leur protection globalement limitée. Le Conseil constitutionnel accorde aux objectifs une protection inférieure à celle des droits et libertés constitutionnels, même si cette protection varie selon les objectifs et les circonstances. Cette moindre protection résulte en partie du faible nombre de déclarations de non conformité à la Constitution fondées sur les objectifs, mais transparaît principalement à travers l'avantage donné aux droits et libertés constitutionnels dans leur conciliation avec les objectifs(29). Elle démontre notamment le caractère limité de la fonction de permission des objectifs. Cette protection atténuée s'explique, ici encore, par le fait que les objectifs ne sont pas des droits et libertés constitutionnels mais de simples garanties objectives de ces droits, ce qui les place dans une situation subordonnée par rapport à eux. N'existant que par et pour les droits et libertés constitutionnels, ils ne peuvent bénéficier de la portée normative attachée à ces droits et libertés.

En définitive, les objectifs de valeur constitutionnelle ne forment pas un ensemble dépourvu de toute unité. Leur unité réside dans leur détermination ambiguë et leur normativité limitée, mais surtout dans les deux facteurs explicatifs de cette détermination et de cette normativité : leur nature d'objectifs et leur caractère de conditions d'effectivité des droits et libertés constitutionnels. Les objectifs de valeur constitutionnelle ne sont pas des droits mais des buts assignés par la Constitution au législateur, qui constituent des conditions objectives d'effectivité des droits fondamentaux constitutionnels. Ils découlent des droits et libertés et servent à en déterminer la portée exacte. Ils servent moins à les limiter qu'à les protéger. La « clef d'interprétation » des objectifs réside ainsi dans l'effectivité des droits et libertés.

(1) Cons. const., n° 82-141 DC, 27 juill. 1982, communication audiovisuelle, Rec. p. 48, cons. 5. Cette décision constitue la décision « fondatrice » des objectifs, étant la première à les évoquer explicitement. Néanmoins, on discerne dans la jurisprudence antérieure, notamment dans les décisions n° 79-105 DC du 25 juillet 1979 (Droit de grève à la radio et à la télévision, Rec. p. 33), n° 79-111 DC du 30 décembre 1979 (Vote du budget II, Rec. p. 39) et surtout n° 80-127 DC des 19-20 janvier 1981 (Sécurité et liberté, Rec. p. 15), des signes avant-coureurs de cette consécration, de telle sorte que celle-ci s'est en réalité faite par étapes. V. notamment Genevois (Bruno), La jurisprudence du Conseil constitutionnel. Principes directeurs, Paris, STH, 1988, p. 204.
(2) V. par ex. Frison-Roche (Marie-Anne), Baranès (William), « Le principe constitutionnel de l'accessibilité et de l'intelligibilité de la loi », D., 2000, chron., p. 362 ; Prétot (Xavier), Jan (Pascal), « Bloc de constitutionnalité », J.-Cl. adm., Paris, éd. du Juris-Classeur, 2002, fasc. 1418, p. 16.
(3) Cons. const., « Le contrôle de constitutionnalité des normes juridiques par le Conseil constitutionnel », rapport présenté par la délégation française à la VIIe conférence des Cours constitutionnelles européennes (Lisbonne, 26-30 avr. 1987), RFD adm., 1987, p. 851 (souligné par nous).
(4) V. Genevois (Bruno), op. cit., p. 205
(5) V. Levade (Anne), « L'objectif de valeur constitutionnelle, vingt ans après. Réflexions sur une catégorie juridique introuvable », in L'esprit des institutions, l'équilibre des pouvoirs, Mélanges en l'honneur de Pierre Pactet, Paris, Dalloz, 2003, p. 688 et 702.
(6) V. par ex. Auby (Jean-Bernard), « Le recours aux objectifs des textes dans leur application en droit public », RD publ., 1991, p. 331-332 ; Constantinesco (Vlad.), Pierré-Caps (Stéphane), Droit constitutionnel, Paris, PUF, coll. « Thémis », 2004, p. 515 ; Grewe (Constance), Ruiz Fabri (Hélène), Droits constitutionnels européens, Paris, PUF, coll. « Droit fondamental », 1995, p. 155, § 121 ; Favoreu (Louis), Philip (Loïc), Les grandes décisions du Conseil constitutionnel, Paris, Dalloz, 13e éd., 2005, n° 34, § 4, p. 577 ; Luchaire (François), « Brèves remarques sur une création du Conseil constitutionnel : l'objectif de valeur constitutionnelle », RFD const., n° 64, 2005, p. 678 ; Robert (Jacques), « Les activités du Conseil constitutionnel », entretien, L'Astrée, n° 5, sept. 1998, p. 6-7 ; Roussillon (Henry), Le Conseil constitutionnel, Paris, Dalloz, coll. « Connaissance du droit », 5e éd., 2004, p. 82-83 ; Turpin (Dominique), Contentieux constitutionnel, Paris, PUF, coll. « Droit fondamental », 2e éd., 1994, p. 141 et s., § 87 et s.
(7) Molfessis (Nicolas), Le Conseil constitutionnel et le droit privé, Paris, LGDJ, coll. « Bibliothèque de droit privé », t. 287, 1997, p. 39.
(8) V. notamment Blachèr (Philippe), « Objectif de valeur constitutionnelle », in Cabrillac (Rémy) (dir.), Dictionnaire du vocabulaire juridique, Paris, Litec, Éditions du Juris-Classeur, coll. « Objectif droit », 2e éd., 2004, p. 271 ; Lavroff (Dmitri Georges), « à propos de la Constitution », in L'esprit des institutions, l'équilibre des pouvoirs, Mélanges en l'honneur de Pierre Pactet, Paris, Dalloz, 2003, p. 288 ; Rousseau (Dominique), Droit du contentieux constitutionnel, Paris, Montchrestien, coll. « Domat droit public », 7e éd., 2006, p. 111-112.
(9) Dans le même sens, Levade (Anne), « L'objectif de valeur constitutionnelle, vingt ans après. Réflexions sur une catégorie juridique introuvable », op. cit., p. 687 ; Molfessis (Nicolas), « La dimension constitutionnelle des libertés et droits fondamentaux », in Cabrillac (Rémy), Frison-Roche (Marie-Anne), Revet (Thierry) (dir.), Libertés et droits fondamentaux, Paris, Dalloz, 11e éd., 2005, p. 83, § 154.
(10) La Cour de justice des Communautés européennes a consacré la catégorie des « objectifs d'intérêt général poursuivis par la Communauté » ; CJCE, 14 mai 1974, Nold, 4/73, Rec. p. 491, pt. 14. V. notamment Genevois (Bruno), La jurisprudence du Conseil constitutionnel. Principes directeurs, op. cit., p. 205-206.
(11) Sur ces objectifs, v. notamment Grewe (Constance), Ruiz Fabri (Hélène), Droits constitutionnels européens, op. cit., p. 43 et s., § 34.
(12) On peut d'ailleurs souhaiter que le Conseil constitutionnel mentionne à l'avenir les fondements textuels précis des objectifs de sauvegarde de l'ordre public, de recherche des auteurs d'infractions et du respect de la liberté d'autrui, ce qu'il ne fait pas à l'heure actuelle, par facilité de rédaction ou par économie de motivation.
(13) Cons. const., n° 88-244 DC, 20 juill. 1988, Loi d'amnistie, Rec. p. 119, cons. 11-12.
(14) Le pluralisme a plusieurs facettes : la préservation du caractère pluraliste des courants d'expression socioculturels, le pluralisme des quotidiens d'information politique et générale, des moyens de communication et des courants d'idées et d'opinions.
(15) Cet objectif, issu de l'article 72-2, alinéa 5, de la Constitution relatif à la péréquation, doit être distingué du principe interdisant la tutelle d'une collectivité territoriale sur une autre, consacré à l'article 72, alinéa 5.
(16) Mathieu (Bertrand), in Mathieu (Bertrand), Verpeaux (Michel), « Chronique de jurisprudence constitutionnelle n° 10, décembre 1994-janvier 1995 (1re partie) », Les petites affiches, n° 68, 7 juin 1995, p. 10.
(17) Mme Kosciusko-Morizet (Nathalie), député, dans son rapport n° 1595 fait au nom de la commission des lois et déposé à l'Assemblée nationale le 12 mai 2004, parle de « neuf objectifs constitutionnels et du principe de précaution ».
(18) Il n'est pas non plus impossible que le Conseil consacre un objectif de valeur constitutionnelle sur le fondement de l'article 10, aux termes duquel « la présente Charte inspire l'action européenne et internationale de la France ». Mais il s'agit moins d'un objectif adressé au législateur qu'aux autorités diplomatiques.
(19) Par ailleurs, M. Luchaire voit dans la loi constitutionnelle du 28 mars 2003 la source d'autres objectifs de valeur constitutionnelle, comme celui d'une « action commune entre plusieurs collectivités territoriales ». Luchaire (François), « Brèves remarques sur une création du Conseil constitutionnel : l'objectif de valeur constitutionnelle », op. cit., p. 683-684. Cette analyse ne peut être retenue, au regard des conditions d'existence évoquées plus haut.
(20) V. par ex. Ardant (Philippe), Institutions politiques et droit constitutionnel, Paris, LGDJ, coll. « Manuels », 17e éd., 2005, p. 123, § 95 ; Hamon (Francis), Troper (Michel), Droit constitutionnel, Paris, LGDJ, coll. « Manuels », 29e éd., 2005, p. 840 ; Luchaire (François), op. cit., p. 681 ; Roussillon (Henry), Le Conseil constitutionnel, op. cit., p. 82-83. Sur cette question de la normativité des objectifs, v. notamment Faure (Bertrand), « Les objectifs de valeur constitutionnelle : une nouvelle catégorie juridique ? », RFD const., n° 21, 1995, p. 63 et s. (21) Luchaire (François), op. cit., p. 678.
(22) Par ex., dans la décision n° 2003-475 DC du 24 juillet 2003 (Loi portant réforme de l'élection des sénateurs, Rec. p. 397, cons. 26), l'objectif d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi sert explicitement de fondement à une déclaration de non conformité à la Constitution.
(23) V. par ex., Auby (Jean-Bernard), « Le recours aux objectifs des textes dans leur application en droit public », RD publ., 1991, p. 330-331.
(24) Par ex., à propos de l'objectif relatif au logement décent, v. Cons. const., n° 94-359 DC, 19 janv. 1995, Diversité de l'habitat, Rec. p. 176, cons. 8.
(25) Cons. const., n° 86-210 DC, 29 juill. 1986, régime de la presse, Rec. p. 110 ; n° 86-217 DC, 18 sept. 1986, liberté de communication, Rec. p. 141. Dans chacune de ces décisions, le Conseil constitutionnel a déclaré la non conformité à la Constitution de la loi soumise à son examen pour réalisation insuffisante de l'objectif de pluralisme.
(26) L'affirmation de cette fonction est présente dès la première décision consacrant explicitement les objectifs de valeur constitutionnelle. Cons. const., n° 82-141 DC, 27 juill. 1982, préc., cons. 5.
(27) Cons. const., n° 98-403 DC, 29 juill. 1998, Taxe d'inhabitation, Rec. p. 276, cons. 7. (28) Dans le même sens, v. Schoettl (Jean-Éric), « La loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (Cons. const., 19 déc. 2000) », Les petites affiches, n° 255, 22 déc. 2000, p. 12.
(29) V. notamment Mathieu (Bertrand), Verpeaux (Michel), Contentieux constitutionnel des droits fondamentaux, Paris, LGDJ, coll. « Manuels », 2002, p. 430. Sur le lien unissant la conciliation entre normes constitutionnelles et l'existence d'une hiérarchie au sein du « bloc de constitutionnalité », v. Drago (Guillaume), Contentieux constitutionnel français, Paris, PUF, coll. « Thémis », 2e éd., 2006, p. 283 et s., § 321 et s.