Décision

Décision n° 2015-717 DC du 6 août 2015

Loi portant nouvelle organisation territoriale de la République
Non conformité partielle

Le Conseil constitutionnel a été saisi, dans les conditions prévues à l'article 61, deuxième alinéa, de la Constitution, de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, sous le numéro 2015-717 DC, le 22 juillet 2015, par MM. Christian JACOB, Élie ABOUD, Bernard ACCOYER, Yves ALBARELLO, Mme Laurence ARRIBAGÉ, MM. Jean-Pierre BARBIER, Sylvain BERRIOS, Etienne BLANC, Marcel BONNOT, Mme Valérie BOYER, MM. Xavier BRETON, Philippe BRIAND, Dominique BUSSEREAU, Jérôme CHARTIER, Guillaume CHEVROLLIER, Jean-Louis CHRIST, Dino CINIERI, Eric CIOTTI, Mme Marie-Christine DALLOZ, MM. Gérard DARMANIN, Bernard DEFLESSELLES, Patrick DEVEDJIAN, Nicolas DHUICQ, Mme Marianne DUBOIS, MM. Daniel FASQUELLE, Georges FENECH, Mme Marie-Louise FORT, MM. Yves FOULON, Marc FRANCINA, Yves FROMION, Laurent FURST, Claude de GANAY, Hervé GAYMARD, Mme Annie GENEVARD, MM. Daniel GIBBES, Franck GILARD, Claude GOASGUEN, Philippe GOSSELIN, Mmes Claude GREFF, Françoise GUÉGOT, MM. Jean-Claude GUIBAL, Jean-Jacques GUILLET, Patrick HETZEL, Philippe HOUILLON, Guénhaël HUET, Mme Nathalie KOSCIUSKO-MORIZET, MM. Jacques KOSSOWSKI, Marc LAFFINEUR, Jacques LAMBLIN, Jean-François LAMOUR, Mme Laure de LA RAUDIÈRE, MM. Guillaume LARRIVÉ, Charles de LA VERPILLIÈRE, Alain LEBOEUF, Mme Isabelle LE CALLENNEC, MM. Pierre LELLOUCHE, Bruno LE MAIRE, Pierre LEQUILLER, Philippe LE RAY, Mme Véronique LOUWAGIE, MM. Jean-François MANCEL, Thierry MARIANI, Hervé MARITON, Alain MARLEIX, Olivier MARLEIX, Alain MARSAUD, Philippe MARTIN, Patrice MARTIN-LALANDE, Alain MARTY, Pierre MOREL-A-L'HUISSIER, Mme Dominique NACHURY, MM. Patrick OLLIER, Mme Valérie PÉCRESSE, M. Jean-Frédéric POISSON, Mme Josette PONS, MM. Didier QUENTIN, Frédéric REISS, Franck RIESTER, Martial SADDIER, Fernand SIRÉ, Thierry SOLÈRE, Eric STRAUMANN, Claude STURNI, Mme Michèle TABAROT, MM. Lionel TARDY, Michel TERROT, Mme Catherine VAUTRIN, MM. Jean-Pierre VIGIER, Philippe VITEL, Michel VOISIN, Jean-Luc WARSMANN, Eric WOERTH, et Mme Marie-Jo ZIMMERMANN, députés,

Et le même jour, par MM. Bruno RETAILLEAU, Gérard BAILLY, François BAROUIN, Philippe BAS, Christophe BÉCHU, Jérôme BIGNON, Jean BIZET, François BONHOMME, Gilbert BOUCHET, François-Noël BUFFET, Christian CAMBON, Mme Agnès CANAYER, MM. Jean-Pierre CANTEGRIT, Jean-Noël CARDOUX, Jean-Claude CARLE, Mme Caroline CAYEUX, MM. Gérard CÉSAR, Patrick CHAIZE, Pierre CHARON, Daniel CHASSEING, Alain CHATILLON, François COMMEINHES, Philippe DALLIER, René DANESI, Mathieu DARNAUD, Serge DASSAULT, Mme Isabelle DEBRÉ, MM. Francis DELATTRE, Robert del PICCHIA, Mmes Catherine DEROCHE, Jacky DEROMEDI, Marie-Hélène DES ESGAULX, Chantal DESEYNE, Catherine DI FOLCO, MM. Eric DOLIGÉ, Philippe DOMINATI, Mmes Marie-Annick DUCHÊNE, Nicole DURANTON, MM. Louis DUVERNOIS, Jean-Paul EMORINE, Mme Dominique ESTROSI SASSONE, MM. Michel FORISSIER, Alain FOUCHÉ, Bernard FOURNIER, Jean-Paul FOURNIER, Mme Joëlle GARRIAUD-MAYLAM, MM. Jacques GAUTIER, Bruno GILLES, Mme Colette GIUDICELLI, MM. Alain GOURNAC, Jean-Pierre GRAND, Daniel GREMILLET, Jacques GROSPERRIN, Charles GUENÉ, Michel HOUEL, Mme Christiane HUMMEL, MM. Benoît HURÉ, Jean-François HUSSON, Jean-Jacques HYEST, Mmes Corinne IMBERT, Christiane KAMMERMANN, M. Roger KAROUTCHI, Mme Fabienne KELLER, M. Marc LAMÉNIE, Mme Elisabeth LAMURE, MM. Daniel LAURENT, Antoine LEFÈVRE, Jacques LEGENDRE, Dominique de LEGGE, Jean-Pierre LELEUX, Jean-Baptiste LEMOYNE, Jean-Claude LENOIR, Philippe LEROY, Mme Vivette LOPEZ, MM. Claude MALHURET, Didier MANDELLI, Patrick MASCLET, Jean-François MAYET, Mmes Colette MÉLOT, Marie MERCIER, Brigitte MICOULEAU, MM. Alain MILON, Albéric de MONTGOLFIER, Mme Patricia MORHET-RICHAUD, MM. Jean-Marie MORISSET, Philippe MOUILLER, Philippe NACHBAR, Louis NÈGRE, Louis-Jean de NICOLAŸ, Philippe PAUL, Cyril PELLEVAT, Cédric PERRIN, Jackie PIERRE, François PILLET, Rémy POINTEREAU, Hugues PORTELLI, Mmes Sophie PRIMAS, Catherine PROCACCIA, MM. Jean-Pierre RAFFARIN, Henri de RAINCOURT, Michel RAISON, André REICHARDT, Charles REVET, Bernard SAUGEY, Michel SAVIN, Bruno SIDO, André TRILLARD, Mme Catherine TROENDLÉ, MM. Michel VASPART, Alain VASSELLE, Jean-Pierre VIA, Mme Annick BILLON, MM. Olivier CADIC, Vincent CAPO-CANELLAS, Olivier CIGOLOTTI, Vincent DELAHAYE, Yves DETRAIGNE, Mme Elisabeth DOINEAU, M. Jean-Léonce DUPONT, Mmes Françoise GATEL, Nathalie GOULET, Jacqueline GOURAULT, M. Loïc HERVÉ, Mmes Sophie JOISSAINS, Chantal JOUANNO, MM. Claude KERN, Hervé MARSEILLE, Hervé MAUREY, Michel MERCIER, Mme Catherine MORIN-DESAILLY, MM. Yves POZZO DI BORGO, Gérard ROCHE et François ZOCCHETTO, sénateurs.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,

Vu la Constitution ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles ;

Vu les observations du Gouvernement, enregistrées le 31 juillet 2015 ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant que les députés et les sénateurs requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République ; qu'ils contestent la conformité à la Constitution de certaines dispositions de son article 59, relatives aux modalités de répartition des sièges de conseiller de la métropole du Grand Paris attribués à la commune de Paris et au mode d'élection de ces conseillers métropolitains ;

2. Considérant que les députés et les sénateurs requérants font valoir que les dispositions du 9 ° du paragraphe II et celles du paragraphe XX de l'article 59 portent atteinte au principe d'égalité devant la loi en introduisant des règles de répartition des sièges de conseiller métropolitain pour la commune de Paris qui diffèrent de celles applicables aux autres communes sans que cela soit justifié par un motif d'intérêt général ; qu'il en irait de même pour le mode d'élection des conseillers métropolitains par les conseillers de Paris de l'arrondissement prévu à titre transitoire par le paragraphe XX de l'article 59 ; que la combinaison de deux modes de scrutin à la représentation proportionnelle dans le cadre de l'arrondissement, en amplifiant la représentation majoritaire au sein de chaque arrondissement, conduirait à une méconnaissance du principe d'égalité devant le suffrage, de l'exigence de pluralisme des courants d'idées et d'opinions ainsi que du principe d'égal accès aux dignités, places et emplois publics ; que, selon les sénateurs requérants, il en résulte également une méconnaissance de l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi ; qu'enfin, selon les députés requérants, en modifiant les règles de désignation des membres du conseil de la métropole du Grand Paris par la commune de Paris postérieurement aux élections municipales de 2014, le législateur a porté atteinte à l'exigence de clarté et de loyauté du scrutin ;

- SUR LE DERNIER ALINÉA DU 9 ° DU PARAGRAPHE II DE L'ARTICLE 59 :

3. Considérant que le 9 ° du paragraphe II de l'article 59 modifie l'article L. 5219-9 du code général des collectivités territoriales ; que le troisième alinéa de l'article L. 5219-9 ainsi modifié par le dernier alinéa du 9 ° est relatif à la répartition des sièges attribués à la commune de Paris au conseil métropolitain du Grand Paris ;

4. Considérant que, selon le premier alinéa de l'article 72 de la Constitution : « les collectivités territoriales de la République sont les communes, les départements, les régions, les collectivités à statut particulier et les collectivités d'outre-mer régies par l'article 74. Toute autre collectivité territoriale est créée par la loi » ; que le troisième alinéa du même article dispose que ces collectivités « s'administrent librement par des conseils élus » dans les conditions prévues par la loi ; que selon le troisième alinéa de l'article 3 de la Constitution, le suffrage « est toujours universel, égal et secret » ; que l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 dispose que la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse » ;

5. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, dès lors que des établissements publics de coopération entre les collectivités territoriales exercent en lieu et place de ces dernières des compétences qui leur sont dévolues, leurs organes délibérants doivent être élus sur des bases essentiellement démographiques ; qu'il s'ensuit notamment que les personnes représentant une commune au sein de l'organe délibérant d'un établissement public de coopération, lorsqu'elles sont désignées au sein de circonscriptions électorales internes à la commune, doivent être élues sur des bases essentiellement démographiques selon une répartition des sièges et une délimitation des circonscriptions internes à la commune respectant au mieux l'égalité devant le suffrage ; qu'il peut toutefois être tenu compte, dans une mesure limitée, d'autres considérations d'intérêt général ;

6. Considérant que les dispositions du troisième alinéa de l'article L. 5219-9 du code général des collectivités territoriales prévoient une répartition des sièges de conseiller métropolitain attribués à la commune de Paris entre les arrondissements en fonction de leur population, à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne ; qu'elles prévoient également que chaque arrondissement dispose d'au moins un siège ;

7. Considérant qu'en prévoyant une répartition des sièges de conseiller métropolitain de Paris par arrondissement, le législateur a entendu assurer une représentation de chaque arrondissement de Paris au sein du conseil du Grand Paris ; que, toutefois, compte tenu du nombre de sièges à répartir et de la population respective de chaque arrondissement, en appliquant une règle de répartition à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne combinée à un minimum d'un siège par arrondissement, ces dispositions conduisent à ce que, dans les Ier, IIème, IVème, Vème, VIème, VIIème et IXème arrondissements, le rapport du nombre des conseillers métropolitains à la population de l'arrondissement s'écarte de la moyenne constatée à Paris dans une mesure qui est manifestement disproportionnée ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs à l'encontre de ces dispositions, le troisième alinéa de l'article L. 5219-9 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction résultant du dernier alinéa du 9 ° du paragraphe II de l'article 59 de la loi déférée, qui méconnaît le principe d'égalité devant le suffrage, est contraire à la Constitution ;

- SUR LE PARAGRAPHE XX DE L'ARTICLE 59 :

8. Considérant que les dispositions des trois premiers alinéas du paragraphe XX de l'article 59 de la loi déférée ont pour objet de répartir les sièges attribués à la commune de Paris au conseil du Grand Paris jusqu'au prochain renouvellement général des conseils municipaux suivant la création de la métropole du Grand Paris ; qu'elles prévoient l'attribution d'un siège pour le conseil de Paris puis une répartition des autres sièges de conseiller métropolitain entre les arrondissements en fonction de leur population, à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne ; qu'elles prévoient également que chaque arrondissement dispose d'au moins un siège ; que le quatrième alinéa du même paragraphe XX prévoit que les conseillers métropolitains de chaque arrondissement de Paris sont élus, au scrutin de liste à un tour, avec répartition des sièges à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne, par les conseillers de Paris de l'arrondissement parmi ces conseillers ;

9. Considérant que, nonobstant l'attribution d'un siège pour le conseil de Paris, la règle de répartition des autres sièges de conseiller métropolitain de la commune de Paris entre les arrondissements en fonction de leur population, à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne combinée à un minimum d'un siège par arrondissement, a des conséquences similaires à celles résultant des dispositions du troisième alinéa de l'article L. 5219-9 du code général des collectivités territoriales ; que le rapport du nombre des conseillers métropolitains à la population de l'arrondissement s'écarte de la moyenne constatée à Paris dans une mesure qui est manifestement disproportionnée dans les Ier, IIème, IVème, Vème, VIIème, IXème et Xème arrondissements ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs, les dispositions des trois premiers alinéas du paragraphe XX de l'article 59, qui méconnaissent le principe d'égalité devant le suffrage, sont contraires à la Constitution ;

10. Considérant que les dispositions du dernier alinéa du paragraphe XX de l'article 59, qui sont relatives au mode d'élection des conseillers métropolitains de Paris, exigent pour leur application une répartition des sièges de conseiller métropolitain entre les arrondissements ; que, par suite, ces dispositions sont inséparables de celles des trois premiers alinéas du paragraphe XX, déclarées contraires à la Constitution ; que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs, elles sont également contraires à la Constitution ;

11. Considérant qu'il n'y a lieu, pour le Conseil constitutionnel, de soulever d'office aucune question de conformité à la Constitution,

D É C I D E :

Article 1er.- Sont contraires à la Constitution les dispositions suivantes de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République :

  • le troisième alinéa de l'article L. 5219-9 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction résultant du dernier alinéa du 9 ° du paragraphe II de l'article 59 ;
  • le paragraphe XX de l'article 59.

Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 6 août 2015, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Valéry GISCARD d'ESTAING, Lionel JOSPIN et Mme Nicole MAESTRACCI.

JORF n°0182 du 8 août 2015 page 13777 texte n°3
ECLI : FR : CC : 2015 : 2015.717.DC

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.1. PRINCIPES DU DROIT ÉLECTORAL
  • 8.1.1. Droits et libertés de l'électeur
  • 8.1.1.2. Égalité entre électeurs
  • 8.1.1.2.1. Principe d'équilibre démographique
  • 8.1.1.2.1.6. Élection aux conseils des établissements publics de coopération entre collectivités

Selon le premier alinéa de l'article 72 de la Constitution : « les collectivités territoriales de la République sont les communes, les départements, les régions, les collectivités à statut particulier et les collectivités d'outre-mer régies par l'article 74. Toute autre collectivité territoriale est créée par la loi ». Le troisième alinéa du même article dispose que ces collectivités « s'administrent librement par des conseils élus » dans les conditions prévues par la loi. Selon le troisième alinéa de l'article 3 de la Constitution, le suffrage « est toujours universel, égal et secret ». L'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 dispose que la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse ». Il résulte de ces dispositions que, dès lors que des établissements publics de coopération entre les collectivités territoriales exercent en lieu et place de ces dernières des compétences qui leur sont dévolues, leurs organes délibérants doivent être élus sur des bases essentiellement démographiques. Il s'ensuit notamment que les personnes représentant une commune au sein de l'organe délibérant d'un établissement public de coopération, lorsqu'elles sont désignées au sein de circonscriptions électorales internes à la commune, doivent être élues sur des bases essentiellement démographiques selon une répartition des sièges et une délimitation des circonscriptions internes à la commune respectant au mieux l'égalité devant le suffrage. Il peut toutefois être tenu compte, dans une mesure limitée, d'autres considérations d'intérêt général.
Les dispositions du troisième alinéa de l'article L. 5219-9 du code général des collectivités territoriales prévoient une répartition des sièges de conseiller métropolitain attribués à la commune de Paris entre les arrondissements en fonction de leur population, à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne. Elles prévoient également que chaque arrondissement dispose d'au moins un siège. En prévoyant une répartition des sièges de conseiller métropolitain de Paris par arrondissement, le législateur a entendu assurer une représentation de chaque arrondissement de Paris au sein du conseil du Grand Paris. Toutefois, compte tenu du nombre de sièges à répartir et de la population respective de chaque arrondissement, en appliquant une règle de répartition à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne combinée à un minimum d'un siège par arrondissement, ces dispositions conduisent à ce que, dans les Ier, IIème, IVème, Vème, VIème, VIIème et IXème arrondissements, le rapport du nombre des conseillers métropolitains à la population de l'arrondissement s'écarte de la moyenne constatée à Paris dans une mesure qui est manifestement disproportionnée. Par suite, le  troisième alinéa de l'article L. 5219-9 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction résultant du dernier alinéa du 9° du paragraphe II de l'article 59 de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, méconnaît le principe d'égalité devant le suffrage. Censure.

(2015-717 DC, 06 août 2015, cons. 3, 4, 5, 6, 7, JORF n°0182 du 8 août 2015 page 13777 texte n°3)

Selon le premier alinéa de l'article 72 de la Constitution : « les collectivités territoriales de la République sont les communes, les départements, les régions, les collectivités à statut particulier et les collectivités d'outre-mer régies par l'article 74. Toute autre collectivité territoriale est créée par la loi ». Le troisième alinéa du même article dispose que ces collectivités « s'administrent librement par des conseils élus » dans les conditions prévues par la loi. Selon le troisième alinéa de l'article 3 de la Constitution, le suffrage « est toujours universel, égal et secret ». L'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 dispose que la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse ». Il résulte de ces dispositions que, dès lors que des établissements publics de coopération entre les collectivités territoriales exercent en lieu et place de ces dernières des compétences qui leur sont dévolues, leurs organes délibérants doivent être élus sur des bases essentiellement démographiques. Il s'ensuit notamment que les personnes représentant une commune au sein de l'organe délibérant d'un établissement public de coopération, lorsqu'elles sont désignées au sein de circonscriptions électorales internes à la commune, doivent être élues sur des bases essentiellement démographiques selon une répartition des sièges et une délimitation des circonscriptions internes à la commune respectant au mieux l'égalité devant le suffrage. Il peut toutefois être tenu compte, dans une mesure limitée, d'autres considérations d'intérêt général.
Les dispositions des trois premiers alinéas du paragraphe XX de l'article 59 de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République ont pour objet de répartir les sièges attribués à la commune de Paris au conseil du Grand Paris jusqu'au prochain renouvellement général des conseils municipaux suivant la création de la métropole du Grand Paris. Elles prévoient l'attribution d'un siège pour le conseil de Paris puis une répartition des autres sièges de conseiller métropolitain entre les arrondissements en fonction de leur population, à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne. Elles prévoient également que chaque arrondissement dispose d'au moins un siège. Nonobstant l'attribution d'un siège pour le conseil de Paris, la règle de répartition des autres sièges de conseiller métropolitain de la commune de Paris entre les arrondissements en fonction de leur population, à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne combinée à un minimum d'un siège par arrondissement, conduit à ce que le rapport du nombre des conseillers métropolitains à la population de l'arrondissement s'écarte de la moyenne constatée à Paris dans une mesure qui est manifestement disproportionnée dans les Ier, IIème, IVème, Vème, VIIème, IXème et Xème arrondissements. Par suite, les dispositions des trois premiers alinéas du paragraphe XX de l'article 59 méconnaissent le principe d'égalité devant le suffrage. Censure.

(2015-717 DC, 06 août 2015, cons. 4, 5, 8, 9, JORF n°0182 du 8 août 2015 page 13777 texte n°3)
  • 11. CONSEIL CONSTITUTIONNEL ET CONTENTIEUX DES NORMES
  • 11.8. SENS ET PORTÉE DE LA DÉCISION
  • 11.8.4. Caractère séparable ou non des dispositions déclarées inconstitutionnelles
  • 11.8.4.3. Inséparabilité des dispositions non conformes à la Constitution et de tout ou partie du reste de la loi
  • 11.8.4.3.3. Inséparabilité au sein d'un même article (exemples)
  • 11.8.4.3.3.1. Cas d'inséparabilité

Les dispositions du dernier alinéa du paragraphe XX de l'article 59 de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, qui sont relatives au mode d'élection des conseillers métropolitains de Paris, exigent pour leur application une répartition des sièges de conseiller métropolitain entre les arrondissements. Par suite, ces dispositions sont inséparables de celles des trois premiers alinéas du paragraphe XX, qui fixent cette répartition des sièges de conseiller métropolitain entre les arrondissements et qui sont déclarées contraires à la Constitution. Les dispositions du dernier alinéa du paragraphe XX sont également censurées.

(2015-717 DC, 06 août 2015, cons. 10, JORF n°0182 du 8 août 2015 page 13777 texte n°3)
À voir aussi sur le site : Communiqué de presse, Commentaire, Dossier documentaire, Texte adopté, Saisine par 60 députés, Saisine par 60 sénateurs, Observations du Gouvernement, Dossier législatif AN, Dossier législatif Sénat, Références doctrinales, Version PDF de la décision.
Toutes les décisions