Décision

Décision n° 2010-104 QPC du 17 mars 2011

Epoux B. [Majoration fiscale de 80 % pour activité occulte]
Conformité

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 17 décembre 2010 par le Conseil d'État (décision n° 331113 du 17 décembre 2010), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. et Mme Yves B., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du dernier alinéa de l'article 1728 du code général des impôts en tant qu'il prévoit une majoration de 80 % en cas de découverte d'une activité occulte.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,

Vu la Constitution ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu le code général des impôts ;

Vu loi n° 99-1172 du 30 décembre 1999 de finances pour 2000, ensemble la décision du Conseil constitutionnel n° 99-424 DC du 29 décembre 1999 ;

Vu l'ordonnance n° 2005-1512 du 7 décembre 2005 relative à des mesures de simplification en matière fiscale et à l'harmonisation et l'aménagement du régime des pénalités, notamment son article 13 entré en vigueur le 1er janvier 2006 ;

Vu la décision du Conseil constitutionnel n° 2005-520 DC du 22 juillet 2005 ;

Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ;

Vu les observations produites pour les requérants par la SCP Ortscheidt, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées le 5 janvier 2011 ;

Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 11 janvier 2011 ;

Vu les pièces produites et jointes au dossier ;

M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendu à l'audience publique du 8 février 2011 ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article 1728 du code général des impôts dans sa rédaction en vigueur avant le 1er janvier 2006 : « 1. Lorsqu'une personne physique ou morale ou une association tenue de souscrire une déclaration ou de présenter un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'un des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes établis ou recouvrés par la direction générale des impôts s'abstient de souscrire cette déclaration ou de présenter cet acte dans les délais, le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 10 %.
« 2. Le décompte de l'intérêt de retard est arrêté soit au dernier jour du mois de la proposition de rectification, soit au dernier jour du mois au cours duquel la déclaration ou l'acte a été déposé.
« 3. La majoration visée au 1 est portée à :
« 40 % lorsque le document n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure notifiée par pli recommandé d'avoir à le produire dans ce délai ;
« 80 % lorsque le document n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une deuxième mise en demeure notifiée dans les mêmes formes que la première.
« 80 % en cas de découverte d'une activité occulte » ;

2. Considérant que, selon les requérants, le dernier alinéa de l'article 1728 porte atteinte aux principes de nécessité, de proportionnalité et d'individualisation des peines, qui découlent de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ;

3. Considérant que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur le dernier alinéa de l'article 1728 du code général des impôts dans sa rédaction en vigueur avant le 1er janvier 2006 ;

4. Considérant que la disposition contestée a été introduite par l'article 103 de la loi du 30 décembre 1999 susvisée ; que, comme l'a jugé le Conseil constitutionnel dans les motifs de sa décision du 29 décembre 1999, cette disposition « ne porte atteinte à aucun principe, ni à aucune règle de valeur constitutionnelle » ; que, si le Conseil constitutionnel a précisé, dans sa décision du 22 juillet 2005, que le principe d'individualisation des peines découle de l'article 8 de la Déclaration de 1789, cette précision ne constitue pas un changement des circonstances de nature à imposer le réexamen du grief tiré de la méconnaissance de cet article 8 ; que, dès lors, le dernier alinéa de l'article 1728 du code général des impôts est conforme à la Constitution,

DÉCIDE :

Article 1er.- Le dernier alinéa de l'article 1728 du code général des impôts dans sa rédaction en vigueur avant le 1er janvier 2006 est conforme à la Constitution.

Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 17 mars 2011, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Pierre STEINMETZ.

Rendu public le 17 mars 2011.

Journal officiel du 18 mars 2011, page 4935, texte n° 94
Recueil, p. 145
ECLI : FR : CC : 2011 : 2010.104.QPC

Les abstracts

  • 4. DROITS ET LIBERTÉS
  • 4.23. PRINCIPES DE DROIT PÉNAL ET DE PROCÉDURE PÉNALE
  • 4.23.1. Champ d'application des principes de l'article 8 de la Déclaration de 1789
  • 4.23.1.3. Transposition en matière de répression administrative

La majoration de droits prévue par le dernier alinéa l'article 1728 du code général des impôts (80 % en cas de découverte d'activité occulte) dans sa rédaction en vigueur avant le 1er janvier 2006 est conforme aux principes de nécessité et de proportionnalité des peines.

(2010-104 QPC, 17 mars 2011, cons. 4, Journal officiel du 18 mars 2011, page 4935, texte n° 94)
  • 4. DROITS ET LIBERTÉS
  • 4.23. PRINCIPES DE DROIT PÉNAL ET DE PROCÉDURE PÉNALE
  • 4.23.3. Principes de nécessité et de proportionnalité
  • 4.23.3.2. Absence de méconnaissance des principes de nécessité et de proportionnalité des peines
  • 4.23.3.2.1. Détermination des infractions et des peines

La majoration de droits prévue par le dernier alinéa l'article 1728 du code général des impôts (80 % en cas de découverte d'activité occulte) dans sa rédaction en vigueur avant le 1er janvier 2006 est conforme aux principes de nécessité et de proportionnalité des peines.

(2010-104 QPC, 17 mars 2011, cons. 4, Journal officiel du 18 mars 2011, page 4935, texte n° 94)
  • 4. DROITS ET LIBERTÉS
  • 4.23. PRINCIPES DE DROIT PÉNAL ET DE PROCÉDURE PÉNALE
  • 4.23.5. Principe d'individualisation des peines
  • 4.23.5.1. Valeur constitutionnelle
  • 4.23.5.1.2. Rattachement à l'article 8 de la Déclaration de 1789

La majoration de droits prévue par le dernier alinéa l'article 1728 du code général des impôts (80 % en cas de découverte d'activité occulte) dans sa rédaction en vigueur avant le 1er janvier 2006 est conforme au principe de l'individualisation des peines.

(2010-104 QPC, 17 mars 2011, cons. 4, Journal officiel du 18 mars 2011, page 4935, texte n° 94)

Si le Conseil constitutionnel a précisé, dans sa décision n° 2005-520 DC du 22 juillet 2005, que le principe d'individualisation des peines découle de l'article 8 de la Déclaration de 1789, cette précision ne constitue pas un changement des circonstances de nature à imposer le réexamen d'une disposition déjà examinée par le Conseil constitutionnel avant sa décision du 22 juillet 2005 au regard de cet article 8.

(2010-104 QPC, 17 mars 2011, cons. 4, Journal officiel du 18 mars 2011, page 4935, texte n° 94)
  • 11. CONSEIL CONSTITUTIONNEL ET CONTENTIEUX DES NORMES
  • 11.6. QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITÉ
  • 11.6.2. Critères de transmission ou de renvoi de la question au Conseil constitutionnel
  • 11.6.2.3. Absence de décision antérieure du Conseil constitutionnel (1° de l'article 23-2 Ord. 7/11/1958)

La disposition contestée a été introduite par l'article 103 de la loi du 30 décembre 1999 de finances pour 2000. Comme l'a jugé le Conseil constitutionnel dans les motifs de sa décision n° 99-424 DC du 29 décembre 1999, cette disposition " ne porte atteinte à aucun principe, ni à aucune règle de valeur constitutionnelle ". Mais il ne l'a pas déclaré conforme dans le dispositif de cette décision. Dès lors, il lui appartient de réexaminer cette disposition et notamment de contrôler si, depuis sa décision, est intervenu un changement des circonstances de nature à imposer le réexamen du grief tiré, en l'espèce, de la méconnaissance de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

(2010-104 QPC, 17 mars 2011, cons. 4, Journal officiel du 18 mars 2011, page 4935, texte n° 94)
  • 11. CONSEIL CONSTITUTIONNEL ET CONTENTIEUX DES NORMES
  • 11.8. SENS ET PORTÉE DE LA DÉCISION
  • 11.8.7. Autorité des décisions du Conseil constitutionnel
  • 11.8.7.2. Hypothèses où la chose jugée n'est pas opposée
  • 11.8.7.2.7. Disposition n'ayant pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel

La disposition contestée a été introduite par l'article 103 de la loi du 30 décembre 1999 de finances pour 2000. Comme l'a jugé le Conseil constitutionnel dans les motifs de sa décision n° 99-424 DC du 29 décembre 1999, cette disposition " ne porte atteinte à aucun principe, ni à aucune règle de valeur constitutionnelle ". Mais il ne l'a pas déclaré conforme dans le dispositif de cette décision. Dès lors, il lui appartient de réexaminer cette disposition et notamment de contrôler si, depuis sa décision, est intervenu un changement des circonstances de nature à imposer le réexamen du grief tiré, en l'espèce, de la méconnaissance de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

(2010-104 QPC, 17 mars 2011, cons. 4, Journal officiel du 18 mars 2011, page 4935, texte n° 94)
  • 11. CONSEIL CONSTITUTIONNEL ET CONTENTIEUX DES NORMES
  • 11.8. SENS ET PORTÉE DE LA DÉCISION
  • 11.8.7. Autorité des décisions du Conseil constitutionnel
  • 11.8.7.2. Hypothèses où la chose jugée n'est pas opposée
  • 11.8.7.2.8. Changement des circonstances

Si le Conseil constitutionnel a précisé, dans sa décision n° 2005-520 DC du 22 juillet 2005, que le principe d'individualisation des peines découle de l'article 8 de la Déclaration de 1789, cette précision ne constitue pas un changement des circonstances de nature à imposer le réexamen d'une disposition déjà examinée par le Conseil constitutionnel avant sa décision du 22 juillet 2005 au regard de cet article 8.

(2010-104 QPC, 17 mars 2011, cons. 4, Journal officiel du 18 mars 2011, page 4935, texte n° 94)
À voir aussi sur le site : Communiqué de presse, Commentaire, Dossier documentaire, Décision de renvoi CE, Références doctrinales, Version PDF de la décision, Vidéo de la séance.
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