Décision

Décision n° 2007-3965 AN du 29 novembre 2007

A.N., Hauts-de-Seine (12ème circ.)
Annulation - Inéligibilité

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,

Vu la requête présentée par M. Philippe KALTENBACH, demeurant à Clamart (Hauts-de-Seine), enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 28 juin 2007 et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 10 et 17 juin 2007 dans la 12ème circonscription du département des Hauts-de-Seine pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;

Vu le mémoire en défense présenté pour M. Philippe Pemezec, député, enregistré comme ci-dessus le 30 juillet 2007 ; Vu le nouveau mémoire présenté pour M. KALTENBACH, enregistré comme ci-dessus le 26 septembre 2007 ;

Vu le nouveau mémoire présenté pour M. Pemezec, enregistré comme ci-dessus le 15 octobre 2007 ;

Vu le nouveau mémoire présenté pour M. KALTENBACH, enregistré comme ci-dessus le 19 octobre 2007 ;

Vu le nouveau mémoire présenté pour M. Pemezec, enregistré comme ci-dessus le 25 octobre 2007 ;

Vu les observations du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, enregistrées comme ci-dessus le 16 novembre 2007 ;

Vu la décision de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, en date du 8 octobre 2007, approuvant, après réformation, le compte de campagne de M. Pemezec ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ; Vu la Constitution, notamment son article 59 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu le code électoral ;

Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux des députés et des sénateurs ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs de la requête :

1. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 52-8 du code électoral : « Les personnes morales, à l'exception des partis ou groupements politiques, ne peuvent participer au financement de la campagne électorale d'un candidat, ni en lui consentant des dons sous quelque forme que ce soit, ni en lui fournissant des biens, services ou autres avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux qui sont habituellement pratiqués » ;

2. Considérant, en premier lieu, que M. KALTENBACH soutient, pour demander le rejet du compte de campagne de M. PEMEZEC, que les conditions dans lesquelles sa permanence électorale a été implantée dans un bâtiment provisoire sur le territoire de la commune du Plessis-Robinson à titre gratuit et sur le fondement d'un permis de construire signé par M. PEMEZEC, en sa qualité de maire du Plessis-Robinson, ont méconnu l'article L. 52-8 du code électoral ; qu'il résulte de l'instruction que, pour la période allant du 1er juin au 30 novembre 2006, la permanence électorale de M. PEMEZEC a été installée sur le domaine public de la commune du Plessis-Robinson sans que celle-ci perçoive, en contrepartie, une redevance domaniale ; que cette libéralité doit être regardée comme un don prohibé au sens des dispositions précitées de l'article L. 52-8 ;

3. Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que M. PEMEZEC a fait paraître, le 7 juin 2007, soit trois jours avant le premier tour, un ouvrage intitulé Bonheur de ville : un maire au chevet de sa banlieue et édité à 3 000 exemplaires dont 1 000 devaient lui être remis à titre gracieux ; qu'eu égard au contenu de cet ouvrage, qui promeut l'action municipale de son auteur, et à la campagne publicitaire dont il a fait l'objet dans le ressort de plusieurs communes de la circonscription électorale, notamment lors des diverses séances de dédicace organisées juste avant le premier tour du scrutin, sa publication doit être regardée comme ayant un lien direct avec cette élection ; que le compte de campagne de M. PEMEZEC ne retrace aucune dépense à ce sujet, ce qui est de nature à entacher sa sincérité ;

4. Considérant que la perception de ce don prohibé, eu égard à sa nature et aux conditions dans lesquelles il a été consenti, ainsi que le défaut de sincérité du compte de campagne de M. PEMEZEC, justifient le rejet de ce compte ;

5. Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article L.O. 128 du code électoral : « Est également inéligible pendant un an… celui dont le compte a été rejeté à bon droit » ; qu'il résulte de ces dispositions qu'il y a lieu pour le Conseil constitutionnel de constater l'inéligibilité de M. PEMEZEC pour une durée d'un an à compter du 29 novembre 2007 et d'annuler les opérations électorales qui se sont déroulées dans la 12ème circonscription du département des Hauts-de-Seine,

D É C I D E :
Article premier.- M. Philippe PEMEZEC est déclaré inéligible pour une durée d'un an à compter du 29 novembre 2007.
Article 2.- Les opérations électorales qui ont eu lieu les 10 et 17 juin 2007 dans la 12ème circonscription des Hauts-de-Seine sont annulées.
Article 3.- La présente décision sera notifiée au président de l'Assemblée nationale, à M. Philippe PEMEZEC et publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 29 novembre 2007 où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, MM. Guy CANIVET, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Olivier DUTHEILLET de LAMOTHE, Pierre JOXE et Jean-Louis PEZANT, Mme Dominique SCHNAPPER et M. Pierre STEINMETZ.

Journal officiel du 5 décembre 2007, page 19677, texte n° 100
Recueil, p. 424
ECLI : FR : CC : 2007 : 2007.3965.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.1. PRINCIPES DU DROIT ÉLECTORAL
  • 8.1.5. Sincérité, loyauté et dignité du scrutin
  • 8.1.5.3. Sincérité des comptes de campagne

Contrôle de la sincérité du compte de campagne.

(2007-3965 AN, 29 novembre 2007, cons. 4, 5, Journal officiel du 5 décembre 2007, page 19677, texte n° 100)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.4. Recettes produites au compte de campagne
  • 8.3.5.4.5. Dons consentis à un candidat par une personne morale à l'exception des partis ou groupements politiques (article L. 52-8, alinéa 2, du code électoral)
  • 8.3.5.4.5.5. Bénéfice d'un don ou d'un avantage entraînant le rejet du compte

Il résulte de l'instruction que, pour la période allant du 1er juin au 30 novembre 2006, la permanence électorale du candidat élu a été installée sur le domaine public de la commune de P. sans que celle-ci perçoive, en contrepartie, une redevance domaniale. Cette libéralité doit être regardée comme un don prohibé au sens des dispositions de l'article L. 52-8 du code électoral.

(2007-3965 AN, 29 novembre 2007, cons. 2, Journal officiel du 5 décembre 2007, page 19677, texte n° 100)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.5. Dépenses produites au compte de campagne
  • 8.3.5.5.2. Dépenses devant figurer dans le compte
  • 8.3.5.5.2.8. Ouvrage, brochure, publication

Il résulte de l'instruction que le candidat élu, par ailleurs maire de A., a fait paraître, le 7 juin 2007, soit trois jours avant le premier tour, un ouvrage intitulé " Bonheur de ville : un maire au chevet de sa banlieue " et édité à 3 000 exemplaires dont 1 000 devaient lui être remis à titre gracieux. Eu égard au contenu de cet ouvrage, qui promeut l'action municipale de son auteur, et à la campagne publicitaire dont il a fait l'objet dans plusieurs communes de la circonscription électorale, notamment lors des diverses séances de dédicace organisées avant le premier tour du scrutin, sa publication doit être regardée comme ayant un lien direct avec cette élection. Le compte de campagne du candidat élu ne retrace aucune dépense à ce sujet, ce qui est de nature à entacher sa sincérité.

(2007-3965 AN, 29 novembre 2007, cons. 3, Journal officiel du 5 décembre 2007, page 19677, texte n° 100)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.9. Inéligibilité du candidat élu
  • 8.3.5.9.1. Annulation de l'élection

La perception d'un don prohibé, eu égard à sa nature et aux conditions dans lesquelles il a été consenti, ainsi que le défaut de sincérité du compte de campagne du candidat élu, justifient le rejet de ce compte. En application de l'article L.O. 128 du code électoral, il y a lieu pour le Conseil constitutionnel de constater l'inéligibilité du candidat élu pour une durée d'un an à compter du 29 novembre 2007 et d'annuler les opérations électorales qui se sont déroulées dans la 12e circonscription.

(2007-3965 AN, 29 novembre 2007, cons. 4, 5, Journal officiel du 5 décembre 2007, page 19677, texte n° 100)
À voir aussi sur le site : Références doctrinales, Voir décision 2007-3965R AN, Version PDF de la décision.
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