Décision

Décision n° 93-1173/1267/1310 AN du 23 septembre 1993

A.N., Rhône (6ème circ.)
Rejet

Le Conseil constitutionnel,

Vu la requête présentée par M. Pierre Vial, demeurant à Villeurbanne (Rhône), enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 29 mars 1993 sous le numéro 93-1173, tendant à l'annulation des opérations électorales qui se sont déroulées dans la 6e circonscription du Rhône pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;

Vu la requête présentée par M. Pierre Bouquet, demeurant à Villeurbanne (Rhône), déposée à la préfecture du Rhône le 7 avril 1993 et enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 7 avril 1993 sous le numéro 93-1267, tendant à l'annulation des opérations électorales qui se sont déroulées les 21 et 28 mars 1993 dans la 6e circonscription du Rhône pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;

Vu la requête présentée par M. Jean-Paul Bret, demeurant à Villeurbanne (Rhône), déposée à la préfecture du Rhône le 8 avril 1993 et enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 8 avril 1993 sous le numéro 93-1310, tendant à l'annulation des opérations électorales qui se sont déroulées les 21 et 28 mars 1993 dans la 6e circonscription du Rhône pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;

Vu les observations complémentaires de M. Bret enregistrées comme ci-dessus le 27 avril 1993 ;

Vu les mémoires en défense présentés par M. Fraysse, enregistrés comme ci-dessus les 15 avril, et, à deux reprises, le 30 avril 1993 ;

Vu les observations du ministre de l'intérieur, enregistrées comme ci-dessus les 13 avril, 2 juin et 4 mai 1993 ;

Vu l'article 59 de la Constitution ;

Vu l'ordonnance no 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu le code électoral ;

Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant que les requêtes de MM. Vial, Bouquet et Bret sont dirigées contre les mêmes opérations électorales ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par une seule décision ;

Sur la requête de M. Vial :

2. Considérant que M. Vial a adressé sa requête le 26 mars 1993 ; qu'à cette date le second tour de scrutin n'avait pas eu lieu et qu'aucun candidat n'avait été élu ; que la requête s'avère donc prématurée, et qu'elle n'est, pour ce motif, pas recevable ;

Sur la requête de M. Bouquet :

3. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la présence, sur les bulletins de vote de Mme Mathon, candidate aux élections législatives dans la 6e circonscription du Rhône, de la mention « Nouveaux Ecologistes du rassemblement nature et animaux » ait constitué en elle-même une manoeuvre de nature à altérer la sincérité du scrutin ; qu'en effet l'utilisation de cette dénomination n'était pas de nature à entraîner une confusion dans l'esprit des électeurs entre cette candidate et le candidat soutenu par les formations politiques nationales dénommées « Les Verts » et « Génération écologie » qui se présentait sous l'étiquette « Entente des écologistes » que la présence de la mention précitée sur les bulletins de Mme Mathon n'a pas davantage méconnu l'article R. 103 du code électoral, qui n'interdit pas aux candidats de faire figurer sur leurs bulletins l'indication d'une étiquette politique en plus de la mention de leur nom et de celui de leur suppléant, et d'utiliser à cette fin les caractères de leur choix ;

4. Considérant que si le requérant soutient que la candidature de Mme Mathon n'aurait pas été enregistrée dans le respect des règles prévues aux articles L. 154 à L. 158 du code électoral, cette allégation n'est pas corroborée par les pièces du dossier ;

5. Considérant que, si le requérant soutient que Mme Mathon n'a été convaincue de présenter sa candidature que par des dons ou des promesses d'avantages, cette allégation n'est pas corroborée non plus par les pièces du dossier ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'aucun des griefs invoqués par M. Bouquet n'est de nature à justifier l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 21 et 28 mars 1993 dans la 6e circonscription du Rhône ;

Sur les conclusions tendant à ce que le Conseil constitutionnel annule les suffrages obtenus par Mme Mathon :

7. Considérant que M. Bouquet n'invoque pas au soutien de ces conclusions d'autre grief que ceux qui sont analysés ci-dessus ; que par suite, en tout état de cause, ces conclusions doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à ce que le Conseil constitutionnel constate que M. Bouquet a été irrégulièrement empêché d'obtenir un nombre de suffrages supplémentaires qui lui auraient permis de prétendre à l'allocation d'une somme complémentaire au profit de la formation politique à laquelle il appartient au titre de la loi du 15 janvier 1990 :

8. Considérant qu'il revient au Conseil constitutionnel saisi d'une requête tendant à l'annulation d'une élection de procéder aux rectifications du nombre de suffrages obtenus par les candidats dans la mesure où ces rectifications sont nécessaires à l'examen des griefs qui lui sont soumis à cette fin ;

9. Considérant en revanche qu'il ne lui appartient pas, dans le seul but de déterminer la nature et l'étendue des avantages financiers auxquelles un candidat ou la formation politique à laquelle celui-ci a déclaré se rattacher pourrait prétendre, de procéder à une reconstitution du nombre des voix attribuées à ce candidat ; que par suite les conclusions ci-dessus analysées doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à la condamnation de Mme Mathon et de l'Etat à verser une somme d'argent à M. Bouquet à titre de dommages-intérêts :

10. Considérant que de telles conclusions ne ressortissent pas à la compétence du Conseil constitutionnel ;

Sur la requête de M. Bret :

11. Considérant que M. Bret, premier adjoint au maire de Villeurbanne, a fait constater par huissier qu'un nombre très important d'enveloppes contenant les documents officiels destinés aux électeurs n'a pu être distribué pour cause de décès ou d'adresses inexactes ; qu'il n'est pas apporté de preuve que ces erreurs portant sur la liste des électeurs résultent de manoeuvres susceptibles de porter atteinte à la sincérité du scrutin ;

12. Considérant que M. Bret fait grief à M. Fraysse d'avoir fait distribuer des documents non autorisés pendant la campagne électorale, ce qu'il a fait constater par huissier ; qu'il résulte de l'instruction que des irrégularités de même nature et d'ampleur analogue ont été commises au profit de M. Bret ; que dans ces conditions le grief ne saurait être retenu ;

13. Considérant que M. Bret fait grief à M. Fraysse d'avoir diffusé une lettre diffamatoire en utilisant un fichier de la communauté israélite de Villeurbanne ; que M. Fraysse produit une lettre du président de l'association Judaïsme et liberté, sous le timbre de laquelle s'est faite cette diffusion, prenant la responsabilité de cet envoi ; qu'eu égard à la date d'envoi de ce document, M. Bret a été en mesure d'y répondre ; que la diffusion n'a pas revêtu une ampleur telle qu'elle puisse avoir eu une influence décisive sur le résultat du scrutin,

Décide :
Article premier :
Les requêtes de MM. Vial, Bouquet et Bret sont rejetées.
Article 2 :
La présente décision sera notifiée à l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 23 septembre 1993, où siégeaient : MM. Robert BADINTER, président, Robert FABRE, Maurice FAURE, Marcel RUDLOFF, Georges ABADIE, Jean CABANNES, Jacques LATSCHA, Jacques ROBERT et Mme Noëlle LENOIR.
Le président,
Robert BADINTER

Journal officiel du 28 septembre 1993, page 13492
Recueil, p. 306
ECLI : FR : CC : 1993 : 93.1173.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.3. Campagne électorale - Moyens de propagande
  • 8.3.3.3. Circulaires
  • 8.3.3.3.4. Envoi et diffusion des circulaires

Absence de distribution des documents officiels du fait d'erreurs dans l'établissement des listes électorales. Erreurs ne résultant pas d'une manœuvre susceptible de porter atteinte à la sincérité du scrutin.

(93-1173/1267/1310 AN, 23 septembre 1993, cons. 11, Journal officiel du 28 septembre 1993, page 13492)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.3. Campagne électorale - Moyens de propagande
  • 8.3.3.8. Lettres
  • 8.3.3.8.2. Manœuvres par lettres dirigées contre un candidat

Diffusion d'une lettre diffamatoire à l'encontre d'un candidat en utilisant le fichier d'une association. Diffusion de caractère limité à laquelle il était possible de répondre.

(93-1173/1267/1310 AN, 23 septembre 1993, cons. 13, Journal officiel du 28 septembre 1993, page 13492)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.8. Contentieux - Recevabilité
  • 8.3.8.1. Dépôt de la requête
  • 8.3.8.1.4. Délais
  • 8.3.8.1.4.3. Requête tardive

Requête introduite avant le second tour de scrutin. Requête prématurée et, pour ce motif, irrecevable.

(93-1173/1267/1310 AN, 23 septembre 1993, cons. 2, Journal officiel du 28 septembre 1993, page 13492)
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