Décision

Décision n° 88-1063/1067 AN du 8 novembre 1988

A.N., Seine-Saint-Denis (9ème circ.)
Annulation

Le Conseil constitutionnel,

1 °

Vu la requête n° 88-1063 présentée par M. Jean-Jacques Ladel, demeurant à Rosny-sous-Bois, Seine-Saint-Denis, déposée à la préfecture de la Seine-Saint-Denis le 21 juin 1988, et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 5 et 12 juin 1988 dans la neuvième circonscription de la Seine-Saint-Denis pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;

Vu les observations en défense présentées par Mme Véronique Neiertz, député, enregistrées au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 5 juillet 1988 ;

Vu les observations présentées par le ministre de l'intérieur, enregistrées au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 29 juillet 1988 ;

2 °

Vu la requête n° 88-1067 présentée par M. Pierre Dufour, demeurant à Bondy, Seine-Saint-Denis, enregistrée su secrétariat général du Conseil constitutionnel le 21 juin 1988, et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé le 12 juin 1988 dans la neuvième circonscription de la Seine-Saint-Denis pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;

Vu l'article 59 de la Constitution ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu le code électoral ;

Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant que les requêtes de M. Ladel et de M. Dufour sont dirigées contre la même élection ; qu'il convient de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'une même décision ;

Sur la requête de M. Ladel :

Sur la fin de non-recevoir opposée par Mme Neiertz :

2. Considérant que la requête, qui contient l'exposé des faits et moyens sur lesquels elle s'appuie, est recevable alors même que n'y sont pas annexés les textes législatifs et les décisions de jurisprudence dont elle mentionne les références ;
Au fond :

3. Considérant que M. Ladel conteste l'élection de Mme Neiertz comme député de la neuvième circonscription de la Seine-Saint-Denis au seul motif que son remplaçant, M. Claude Fuzier, venant sur une liste de candidats aux élections sénatoriales dans ce département immédiatement après l'unique candidat élu, pourrait, en application de l'article L.O. 320 du code électoral, être appelé à remplacer ce sénateur en. cas de vacance de son siège ; qu'aucune irrégularité concernant les opérations de vote ou le déroulement du scrutin n'est alléguée ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de l'ordonnance n° 59-224 du 4 février 1959, codifié partiellement à l'article L.O. 134 du code électoral, « le remplaçant d'un membre d'une assemblée parlementaire ne peut être remplaçant d'un candidat à l'Assemblée nationale ou au Sénat » ;

5. Considérant que ce dernier texte édicte une inéligibilité ; que toute inéligibilité, qui a pour effet d'apporter une atteinte à la liberté des candidatures, doit être interprétée restrictivement ;

6. Considérant que l'inéligibilité instituée par l'article L.O. 134 du code électoral a pour objet d'assurer la disponibilité permanente de la personne appelée à remplacer le parlementaire dont le siège devient vacant ; qu'elle fait ainsi obstacle à ce qu'un candidat à l'Assemblée nationale puisse choisir comme remplaçant la personne qui, en cas de vacance du siège d'un sénateur, serait immédiatement appelée à remplacer ce dernier ;

7. Considérant que M. Claude Fuzier figurait sur une liste de candidats aux élections sénatoriales qui se sont déroulées dans le département de la Seine-Saint-Denis le 28 septembre 1986, immédiatement après M. Marcel Debarge, candidat proclamé élu ; qu'en raison des dispositions de l'article L.O. 320 du code électoral, M. Fuzier avait ainsi la qualité de remplaçant d'un sénateur au sens de l'article L.O. 134 du même code ; qu'il ne pouvait par suite être remplaçant de Mme Neiertz, candidate dans la neuvième circonscription de la Seine-Saint-Denis lors des élections législatives des 5 et 12 juin 1988 ;

8. Considérant que selon l'article L.O. 189 du code électoral le Conseil constitutionnel « statue sur la régularité tant du titulaire que du remplaçant » ; qu'il y a lieu, en raison de l'inéligibilité de M. Fuzier, d'annuler l'élection de Mme Neiertz ;

Sur la requête de M. Dufour :

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requête de M. Dufour, qui tend à l'annulation de l'élection de Mme Neiertz est devenue sans objet ; qu'il n'y a pas lieu en conséquence de statuer sur cette requête,

Décide :
Article premier :
L'élection de Mme Véronique Neiertz est annulée.
Article 2 - Il n'y a lieu de statuer sur la requête de M. Pierre Dufour.
Article 3 - La présente décision sera notifiée à l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans ses séances des 7 et 8 novembre 1988, o5 siégeaient : MM. Robert BADINTER , président, Louis JOXE, Robert LECOURT, Daniel MAYER Léon JOZEAU-MARIGNÉ, Georges VEDEL, Robert FABRE, Francis MOLLET-VIÉVILLE, Jacques LATSCHA.

Journal officiel du 9 novembre 1988 page 14067
Recueil, p. 193
ECLI : FR : CC : 1988 : 88.1063.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.2. Candidatures
  • 8.3.2.1. Conditions d'éligibilité
  • 8.3.2.1.9. Remplaçants

En application des articles L.O. 155 et L.O. 189 du code électoral, l'inéligibilité d'un remplaçant entraîne également l'annulation de l'élection du titulaire. Annulation.

(88-1063/1067 AN, 08 novembre 1988, cons. 8, Journal officiel du 9 novembre 1988 page 14067)

L'inéligibilité instituée par l'article L.O. 134 du code électoral a pour objet d'assurer la disponibilité permanente de la personne appelée à remplacer le parlementaire dont le siège devient vacant. Si cette inéligibilité fait obstacle à ce qu'un candidat à l'Assemblée nationale puisse choisir comme remplaçant la personne qui, en cas de vacance du siège d'un sénateur, serait immédiatement appelée à remplacer celui-ci, elle ne saurait être étendue aux autres personnes ayant seulement vocation à acquérir la qualité de remplaçant.

(88-1063/1067 AN, 08 novembre 1988, cons. 6, Journal officiel du 9 novembre 1988 page 14067)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.8. Contentieux - Recevabilité
  • 8.3.8.1. Dépôt de la requête
  • 8.3.8.1.5. Formes de la requête
  • 8.3.8.1.5.3. Motivation (voir également ci-dessous : Irrecevabilité des conclusions ; Griefs - Griefs insuffisamment précisés)

La requête qui contient l'exposé des faits et griefs sur lesquels elle s'appuie est recevable alors même que n'y sont pas annexés les textes législatifs et les décisions de jurisprudence dont elle mentionne les références.

(88-1063/1067 AN, 08 novembre 1988, cons. 2, Journal officiel du 9 novembre 1988 page 14067)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.10. Contentieux - Instruction
  • 8.3.10.3. Incidents de procédure, demandes particulières, non-lieu à statuer
  • 8.3.10.3.5. Non-lieu à statuer

L'annulation de l'élection rend sans objet une autre requête qui tend à cette annulation. En conséquence, non-lieu à statuer sur les conclusions de cette dernière requête.

(88-1063/1067 AN, 08 novembre 1988, cons. 9, Journal officiel du 9 novembre 1988 page 14067)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.11. Contentieux - Appréciation des faits par le Conseil constitutionnel
  • 8.3.11.3. Irrégularités donnant lieu à rectifications
  • 8.3.11.3.3. Annulation de l'élection
  • 8.3.11.3.3.1. Éligibilité

En application des articles L.O. 155 et L.O. 189 du code électoral l'inéligibilité d'un remplaçant entraîne également l'annulation de l'élection du titulaire.

(88-1063/1067 AN, 08 novembre 1988, cons. 8, Journal officiel du 9 novembre 1988 page 14067)
  • 10. PARLEMENT
  • 10.1. MANDAT PARLEMENTAIRE
  • 10.1.3. Exercice du mandat parlementaire
  • 10.1.3.4. Remplacement

L'inéligibilité instituée par l'article L.O. 134 du code électoral a pour objet d'assurer la disponibilité permanente de la personne appelée à remplacer le parlementaire dont le siège devient vacant ; si cette inéligibilité fait obstacle à ce qu'un candidat à l'Assemblée nationale puisse choisir comme remplaçant la personne qui, en cas de vacance du siège d'un sénateur, serait immédiatement appelée à remplacer celui-ci, elle ne saurait être étendue aux autres personnes ayant seulement vocation à acquérir la qualité de remplaçant.

(88-1063/1067 AN, 08 novembre 1988, cons. 6, Journal officiel du 9 novembre 1988 page 14067)
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